Pétain n’a pas été fusillé. / Les bandits qui sont cause des guerres sont des tyrans!

Un texte reçu de Philippe Valls.

Une mise en page person­nelle

PB, 10 novembre

« Le “grand soldat” Pétain n’est pas devenu un grand crimi­nel contre l’hu­ma­nité en 1940 ! Comme tous les maré­chaux célé­brés aujourd’­hui par Macron, il fut l’un des prin­ci­paux respon­sables de l’im­mense carnage de 14–18, et c’est loin des tran­chées – embusqué – qu’il envoyait chaque jour à la mort des milliers de jeunes hommes. Quand il succède au géné­ral Nivelle -le boucher de Verdun-, il se signale d’abord en dépor­tant et en fusillant afin d’écra­ser les muti­ne­ries.

En 1936, le géné­ral Franco intro­dui­sit la guerre totale en Europe, mais on oublie souvent qu’il s’illus­tra en 1925/1926, avec le “grand soldat” Pétain, en paci­fiant le Rif maro­cain de la même façon qu’il paci­fia plus tard Guer­nica, c’est-à dire avec des tapis de bombes sur les popu­la­tions civiles et l’uti­li­sa­tion massive de gaz moutarde. Qui se souvient des noms de ces villages rifains?

Ce qui fait l’in­di­gnité du “grand soldat” Pétain et autres galon­nés de la Grande Guerre, ce n’est pas seule­ment leur anti­sé­mi­tisme (parti­cu­liè­re­ment vivace dans l’ar­mée française dans l’entre-deux guerres) et leur parti­ci­pa­tion active à l’ex­ter­mi­na­tion nazie des Juifs et des Tsiganes, mais aussi leur mili­ta­risme et leur profond mépris (au nom de la Patrie) des pauvr’s gars qui crevaient dans les tran­chées.

Ce qui fait l’in­di­gnité du “grand soldat” Pétain et autres galon­nés, c’est d’avoir été les insti­ga­teurs et les auteurs de massacres colo­niaux (qui relèvent aujourd’­hui de crimes contre l’hu­ma­nité), les soudards de l’im­pé­ria­lisme et son idéo­lo­gie raciale. Impé­ria­lisme qui, comme le rappelle Hannah Arendt à notre bon souve­nir, est la matrice du tota­li­ta­risme.

Bref, frap­per d’in­di­gnité le seul Pétain pour sa seule colla­bo­ra­tion au nazisme revient à l’ab­soudre de ses crimes dans cette guerre infâme, en accor­dant du même coup une dignité indue aux sinistres maré­chaux Foch, Lyau­tey, Joffre, Gallieni, etc. qui ressemblent comme deux gouttes d’eau aux “grands soldats” qui marty­risent aujourd’­hui les peuples de la Birma­nie au Yémen en passant par les guerres sans fin du Moyen-Orient et le cœur des ténèbres en Afrique.

S’il faut rendre un hommage 100 ans après 14–18 que soit sans céder un pouce au mili­ta­risme d’hier qui nour­rit celui d’aujourd’­hui . Que ce soit un hommage aux héros anonymes, à ceux qui ont été floués par la der’ des ders et sont partis fleurs au fusil, à ceux qui ont roulé dans le ravin, ense­ve­lis dans la boue, déchique­tés par les obus et les barbe­lés, à ceux qui ont entendu « le râle épais d’un blessé qu’on oublie / Au bord d’un lac de sang, sous un grand tas de morts / Et qui meurt, sans bouger, dans d’im­menses efforts »[Baude­laire, La cloche Fêlée], à ceux qui ont pleuré des copains, à ceux qui ont dit Adieu la vie, adieu l’amour, à ceux qui ont eu la gueule cassée et les poumons bouf­fés au gaz moutarde, à ceux qui se sont muti­nés, à ceux qui ont été fusillés pour l’exem­ple…
Pour garder en mémoire leurs chan­sons à pleu­rer toutes les larmes de la terre:

La butte rouge
Sur cette butte-là y’avait pas d’gi­go­lettes
Pas de marlous ni de beaux musca­dins.
Ah c’était loin du Moulin d’la Galette,
Et de Paname qu’est le roi des pate­lins.
C’qu’elle en a bu du bon sang cette terre,
 Sang d’ou­vriers et sang de paysans,
 Car les bandits qui sont cause des guerres
 N’en meurent jamais, on n’tue qu’les inno­cents !

 La butte rouge, c’est son nom, l’bap­tême s’fit un matin
 Où tous ceux qui grim­paient roulaient dans le ravin.
 Aujourd’­hui y’a des vignes, il y pousse du raisin,
 Qui boira d’ce vin là, boira l’sang des copains.

Sur cette butte là on n’y f’sait pas la noce
Comme à Mont­martre où l’cham­pagne coule à flots,
Mais les pauvr’s gars qu’a­vaient laissé des gosses
Y f’saient entendre de terribles sanglots …
C’qu’elle en a bu des larmes cette terre,
Larmes d’ou­vriers et larmes de paysans
Car les bandits qui sont cause des guerres
Ne pleurent jamais, car ce sont des tyrans !

La butte rouge, c’est son nom, l’bap­tême s’fit un matin
Où tous ceux qui grim­paient roulaient dans le ravin.
Aujourd’­hui y’a des vignes, il y pousse du raisin,
Qui boit de ce vin là, boit les larmes des copains.

Sur cette butte là, on y r’fait des vendanges,
On y entend des cris et des chan­sons :
Filles et gars douce­ment qui échangent
Des mots d’amour qui donnent le fris­son.
Peuvent-ils songer, dans leurs folles étreintes,
Qu’à cet endroit où s’échangent leurs baisers,
> J’ai entendu la nuit monter des plaintes
Et j’y ai vu des gars au crâne brisé !

La butte rouge, c’est son nom, l’bap­tême s’fit un matin
> Où tous ceux qui grim­paient roulaient dans le ravin.
> Aujourd’­hui y’a des vignes, il y pousse du raisin.
> Mais moi j’y vois des croix portant l’nom des copains …
>

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