Pourquoi le drame écolo­gique mobi­lise-t-il si peu ? (extraits d’un article de Repor­terre)

6 septembre 2018 / Émilie Masse­min (Repor­terre)

Nico­las Hulot a avoué ne pas comprendre l’inac­tion géné­rale face à la crise écolo­gique. Repor­terre a cher­ché les expli­ca­tions. Et trouvé dans les sciences cogni­tives, la philo­so­phie et l’éco­lo­gie des éléments pour expliquer ce phéno­mène. Ce qui dessine, en creux, les pistes vers la tran­si­tion.

«  Incen­dies un peu partout dans le monde — Grèce, Suède, États-Unis ; inon­da­tions suivies de cani­cules au Japon ; records de tempé­ra­tures en France, etc. (…) Le film catas­trophe est là, sous nos yeux. (…) Est-ce que vous pouvez m’ex­pliquer pourquoi, ration­nel­le­ment, ce n’est pas la mobi­li­sa­tion géné­rale contre ces phéno­mènes et pour le climat ?  »«  Je vous ferai une réponse très brève : non.  » Cet échange entre le jour­na­liste Nico­las Demo­rand et Nico­las Hulot a précédé de quelques minutes l’an­nonce de la démis­sion du ministre de la Tran­si­tion écolo­gique et soli­daire, mardi 28 août 2018. Les jours suivants, les appels se sont multi­pliés pour «  un élec­tro­choc  » et une mobi­li­sa­tion géné­rale. Mais l’ins­tal­la­tion de François de Rugy, écolo «  prag­ma­tique  » et Macron-compa­tible, à l’hô­tel de Roque­laure laisse craindre une poli­tique busi­ness as usual qui relègue les mesures envi­ron­ne­men­tales loin derrière la pour­suite des objec­tifs de crois­sance écono­mique, de compé­ti­ti­vité, de libre-échange, etc.

Repor­terre a cher­ché à comprendre les raisons d’une telle iner­tie. Nico­las Hulot a accusé une «  commu­nauté inter­na­tio­nale  » qui «  s’éver­tue à entre­te­nir voire à réani­mer le modèle écono­mique marchand qui est la cause de tous ces désordres  ». De nombreuses voix se sont élevées pour souli­gner l’in­com­pa­ti­bi­lité entre l’éco­lo­gie et le libé­ra­lisme prôné par le président de la Répu­blique, et, plus globa­le­ment, l’aveu­gle­ment de l’élite poli­tique et écono­mique sur les ques­tions envi­ron­ne­men­tales. «  Le désastre n’est pas supporté par les grands déci­sion­naires de la planète et qui, à l’in­verse, conti­nuent de pratiquer le court-terme, qui est seul évalué lors des élec­tions et seul valo­risé dans l’éco­no­mie finan­cière, a écrit à Repor­terre la philo­sophe Cynthia Fleury. Pour l’ins­tant, les lobbies et autres parties prenantes indus­trielles poussent pour profi­ter encore du système exis­tant. Il y a aussi tous ceux qui, plus ou moins sincè­re­ment, se pensent “progres­sistes” et consi­dèrent que l’homme a toujours avancé grâce au promé­théisme et que la solu­tion sera tech­nique et non pas “éthique”, et qu’il faut donc plus encore de crois­sance pour soute­nir de l’in­no­va­tion tech­nique.  »

(…)

Alter­na­tiba, l’ac­tion collec­tive et conta­gieuse


Alors, quelles pistes pour agir ? (…)Le mouve­ment Alter­na­tiba, lui, est passé à l’ac­tion dès 2013. «  La manière dont on parle du chan­ge­ment clima­tique avec la hausse des émis­sions de gaz à effet de serre, des tempé­ra­tu­res… tout ça n’est pas très palpable. C’est pourquoi Alter­na­tiba a choisi de montrer concrè­te­ment les alter­na­tives qui existent déjà sur le terri­toire, dont l’im­pact est mesu­rable : repas végé­ta­riens à la cantine, la réno­va­tion éner­gé­tique d’une maison, le vélo plutôt que la voiture, etc. Et de donner à voir à quoi ressem­ble­rait un système plus soute­nable et plus dési­rable  », explique à Repor­terre Pauline Boyer, char­gée des rela­tions presse du mouve­ment. Cela en s’ap­puyant sur l’ef­fet convi­vial et réjouis­sant du groupe. La recette a fonc­tionné : «  On a rassem­blé plus de 12.000 personnes au Village des alter­na­tives de 2013 à Bayonne. L’éner­gie produite par ce rassem­ble­ment était impres­sion­nante. Les gens sont repar­tis hyper­mo­ti­vés et, depuis, plus de 130 villages ont été orga­ni­sés un peu partout, ainsi que deux tours de France à vélo. Aujourd’­hui, plus de 750.000 personnes ont parti­cipé à ces mobi­li­sa­tions !  » (…)

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