Appel du Prin­temps de la Psychia­trie du 23 juin2024

Appel du Prin­temps de la Psychia­trie

Dimanche 9 juin au soir, nous avons été saisi.es par l’évé­ne­ment : la disso­lu­tion déci­dée par Macron a rendu possible l’ar­ri­vée de l’ex­trême droite au pouvoir. Il est urgent d’agir pour se rassem­bler et empê­cher cette bascule périlleuse. Permettre l’ins­tal­la­tion d’un régime d’ex­trême droite, c’est lais­ser libre cours à cette logique de destruc­ti­vité et de déshu­ma­ni­sa­tion contre laquelle nous luttons déjà au quoti­dien.
Souve­nons-nous de la fonda­tion d’une psychia­trie huma­niste dans la résis­tance anti­fas­ciste pendant la Seconde guerre mondiale avec François Tosquelles et Lucien Bonnafé qui, dans le cadre de la Résis­tance, luttèrent pied à pied à Saint-Alban avec celles et ceux qui se tenaient là, patient.es,
reli­gieuses, paysan.nes, réfu­gié.es, alors que se produi­sait ailleurs une « héca­tombe des fous » avec 45000 mort.es de faim. C’est depuis cette posi­tion résis­tante et inven­tive que cette révo­lu­tion psychia­trique s’opéra, et que se construi­sirent ces mouve­ments éman­ci­pa­teurs en psychia­trie que sont la psycho­thé­ra­pie insti­tu­tion­nelle, le désa­lié­nisme et la psychia­trie de secteur.
La destruc­tion de l’hô­pi­tal public a été menée depuis quarante ans par les gouver­ne­ments succes­sifs avec des attaques contre la Sécu­rité Sociale, contre la Soli­da­rité comme orga­ni­sa­trice de notre système de santé, tenta­tive d’ef­fa­ce­ment de ce que le Conseil Natio­nal de la Résis­tance
imagina dès le mois de mai 1943. Les dizaines de milliers de lits fermés en psychia­trie au fil des décen­nies, ainsi que la dimi­nu­tion coupable du nombre de CMP, CATTP… ont barré l’ac­cès aux soins des « moins malades », adultes et enfants, obligé.es de se conten­ter de pres­crip­tions de psycho­tropes à vie par leur géné­ra­liste, d’une inclu­sion au rabais, et jeté les plus fragiles, les exilés, les migrants dans la rue ou en prison. Depuis la construc­tion de la figure du schi­zo­phrène dange­reux jusqu’aux fichiers Hopsy­web, les gouver­ne­ments ont dési­gné les « hors la norme » comme une des figures de l’en­nemi. La conten­tion est réap­pa­rue, le recours
à l’iso­le­ment s’est démul­ti­plié, les hospi­ta­li­sa­tions sans consen­te­ment se sont géné­ra­li­sées.
Depuis la « nuit sécu­ri­taire » de Sarkozy, nos diffé­rents collec­tifs citoyens – qu’ils soient d’usa­ger.e.s, de familles, de profes­sion­nell.e.s (de soin, du social, du médico-social notam­ment)- œuvrent à défendre une psychia­trie humaine, celle qui permet à chacun.e, avec du temps et de la présence, de sortir de la catas­trophe et de retis­ser les fils de l’exis­tence humaine.
Les 24 et 25 mai, les Assises citoyennes du soin psychique se concluaient en insis­tant sur les prin­cipes qui nous portent : l’hos­pi­ta­lité à la folie, la défense de notre système de santé, l’ac­cès aux soins pour tou.te.s, l’hô­pi­tal public, et la défense des soins psychiques dans le médico-social et partout.
On peut parier que l’ar­ri­vée de l’ex­trême-droite au pouvoir ne ferait qu’ag­gra­ver la casse d’une psychia­trie pour enfants et adultes soucieuse de l’hu­main et de l’al­té­rité, luttant contre les proces­sus ségré­ga­tifs et discri­mi­nants. Le programme du Rassem­ble­ment Natio­nal, en
propo­sant d’aug­men­ter le pouvoir d’achat des sala­rié.es en dimi­nuant leurs coti­sa­tions sociales rédui­rait encore les moyens de la santé en géné­ral et de la psychia­trie en parti­cu­lier.
Pour empê­cher cette catas­trophe, nous appe­lons à soute­nir toutes les initia­tives et à rejoindre les mani­fes­ta­tions citoyennes, asso­cia­tives et syndi­cales qui vont se tenir autour du mot d’ordre de Front Popu­laire. Dans nos pratiques et dans nos vies, dans la rue et par nos
votes, pour que les 30 juin et 7 juillet prochains les urnes ne soient pas le tombeau de nos liber­tés, mobi­li­sons-nous !
Et après les élec­tions, quoi qu’il arrive, nous nous battrons pour ces valeurs et ces pratiques de soins psychiques respec­tueuses de toutes et tous, de l’État de Droit et des Liber­tés fonda­men­tales.

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