Il est un scandale sanitaire annoncé, celui des « Ehpad »s, celui des maisons de retraite. Caroline Fiat, notre camarade devenue députée exprime avec une force particulière la souffrance au travail des aide-soignantes et le sort fait aux ancien.ne.s en fin de vie. Dans le journal « l’Humanité ». Ici:
PB, 4–9–2017.
« S’il n’y avait que moi, j’interdirais de gagner de l’argent sur l’humain »
Dénoncée par les grévistes de Foucherans, la situation indigne des Ehpad va être examinée, à partir de lundi, par une « mission flash » de l’Assemblée nationale.
Entretien.
La députée Caroline Fiat participera à la « mission flash » annoncée cet été par la présidente de la commission des Affaires sociales de l’Assemblée nationale,
Brigitte Bourguignon (LREM), pour dresser un état des lieux précis des établissements d’hébergement de personnes âgées dépendantes (Ehpad).
Vous avez rencontré les grévistes de Foucherans. Qu’avez-vous ressenti ?
Caroline Fiat Leur détermination, mais également leur détresse. J’ai forcément beaucoup d’affinités avec elles, puisque j’exerce le même métier dans un Ehpad privé
lucratif. Dans ces établissements, les personnes accueillies sont de plus en plus dépendantes. Or, les gestionnaires n’embauchent pas, sous-payent les soignants, et rognent
sur le matériel.
L’Ehpad de Foucherans serait-il un cas d’école ?
Caroline Fiat C’est certain. Des groupes, parfois européens, rachètent des hôtels qu’ils transforment en établissements d’accueil des personnes âgées. Et toute la famille, le
résidant, ses enfants, ses petits-enfants doivent mettre la main au portefeuille pour payer parfois jusqu’à 3 800 euros par mois pour sa prise en charge. Le patrimoine de toute une vie peut être ainsi englouti. Il est indécent de faire de l’argent sur les personnes âgées. De plus, ces groupes profitent des aides publiques sans que la facture des résidants diminue. Or, l’État mise sur eux pour créer des places, au détriment des établissements publics asphyxiés par les coupes budgétaires.
Qu’attendez-vous de la « mission flash » dont vous êtes un peu à l’origine ?
Caroline Fiat C’est en effet à la suite d’une intervention sur le système de santé où je faisais référence à la grève des Opalines que la présidente de la commission des Affaires sociales a annoncé la mission. J’ai l’intention de participer à toutes les auditions. Je défendrai l’inscription du principe de bientraitance dans la Constitution.
Un projet de décret ou une loi qui fixe les quotas de personnel obligatoire pour la prise en charge de personnes dépendantes. Et qui rendrait obligatoire, les remplacements.
S’il n’y avait que moi, j’interdirais la possibilité de gagner le moindre argent sur l’humain. J’imposerais la gratuité pour que chacun puisse vieillir et partir dignement,
comme c’est le cas pour la naissance.
Entretien réalisé par S. D.
12,77 euros. Avec de tels tarifs, les Ehpad du réseau Opaline du Jura, propriété du groupe SGMR, propriétaire de 46 établissements en France, sont parmi les plus chers. La palme, avec plus de 100 euros par jour, revient toutefois à un établissement voisin, propriété du numéro un des maisons de retraite médicalisées commerciales, le groupe Korian. Cotée en Bourse, l’action s’échange ces jours-ci à une trentaine d’euros. Certes, beaucoup moins que le second de la catégorie, le groupe Orpea, dont les
titres se monnayent à 99 euros.
Nombre de personnes âgées dépendantes restent à la porte de ces établissements
« L’une des premières questions que l’on vous pose lors d’une demande d’accueil d’un parent est de savoir s’il a des biens », se désole Murielle. Avec un niveau
de pension moyen de retraite de 1 400 euros par mois, nombre de personnes âgées dépendantes restent à la porte de ces établissements. Quitte à se satisfaire d’un taux d’occupation légèrement inférieur (95 %) à celui des Ehpad publics ou associatifs (98 %). Un risque limité, compte tenu de l’effet d’aubaine que constitue la pénurie de places. Dans le Jura, le taux d’équipements médico-sociaux ouverts aux plus de 75 ans s’établit à 168 pour 1 000 seniors, selon l’Insee.
Bien en deçà des besoins. « Il y a un problème avec l’argent public. 30 % de nos salaires sont financés par les conseils départementaux. 70 % par les agences
régionales de santé (ARS). Nos employeurs déboursent un minimum. Ils bénéficient même, comme à Foucherans, de largesses de l’ARS, qui a financé quatre postes
d’aide-soignante non pourvus. Cela en fait de bonnes affaires », regrette Anne-Sophie.
Sylvie Ducatteaunité