Grèce:un été en chute accé­lé­rée.

Syriza en gloire.
Syriza fut un parti très mino­ri­taire pendant plusieurs années, puis il devint majo­ri­taire (rela­ti­ve­ment) lors des élec­tions du 25 janvier 2015. Cela fut dû au fait que les mémo­ran­dums impo­sés part la « Troïka » (UE, BCE, FMI) étaient reje­tés par Syriza qui propo­sait une alliance à tous les groupes de gauche en accord avec ce rejet ; l’élec­to­rat le situa comme alter­na­tive audible et crédible à la droite et au PASOK (PS grec). Puis, en posi­tif s’ajouta le « programme de Thes­sa­lo­nique » fin 2014. Ce programme visait à mettre fin à la crise huma­ni­taire et à donner des moyens poli­tiques à Syriza pour que soit effec­tive la rupture avec l’aus­té­rité impo­sée par les élites capi­ta­listes tant de l’UE que du FMI et des capi­ta­listes grecs.

 
L’épreuve soli­taire du gouver­ne­ment Tsipras. Son succès, ses échecs.
Dès le 5 février, la Banque centrale euro­péenne asphyxiait la Grèce. Les longues négo­cia­tions entre février et début juillet ont permis de consta­ter que la Troïka ne négo­ciait en rien. Si les néoli­bé­raux n’ont que des chiffres à la bouche, ils se montrèrent indif­fé­rents à toute démons­tra­tion écono­mique de Varou­fa­kis et de ses amis, et exigèrent une reddi­tion sans condi­tion du gouver­ne­ment Tsipras. Tsipras nous le montra.
Mais le même Tsipras s’isola dans ce tête-à-tête morti­fère avec des usuriers sadiques. Il n’écouta pas la « Plate-forme de gauche » (gauche de Syriza) qui propo­sait un contrôle des capi­taux et une natio­na­li­sa­tion des banques (qui ne cria pas ses désac­cords, il faut le recon­naître). Il empê­cha Syriza de vivre comme une forma­tion poli­tique plura­liste, indé­pen­dante et source de propo­si­tions : les struc­tures de Syriza se réunirent très peu et son Comité central presque jamais.
Nous remarquions que la mission d’au­dit de la dette confiée par la Prési­dente de l’As­sem­blée natio­nale Zoe Kons­tan­to­poulo à Éric Tous­saint et à une équipe d’éco­no­mistes ne rece­vait aucun écho de la part de Tsipras et de son entou­rage. Plus tard peut-être, pensâmes nous…­non, il s’avéra que Tsipras n’uti­li­sait pas une des rares armes à sa dispo­si­tion pour dénon­cer la dette .
Et aucun appel de Tsipras et de ses amis à une soli­da­rité inter­na­tio­nale (hormis le fait qu’il ait eu quelque espé­rance dans les vertus de gauche de Hollande, ce qui est une étrange naïveté) alors qu’un rassem­ble­ment inter­na­tio­nal durant l’été était attendu par tant d’entre nous. Un rassem­ble­ment inter­na­tio­nal pour dénon­cer cette odieuse, insou­te­nable, absurde et irrem­bour­sable, pour dire notre soutien au peuple grec. Cela ne fut pas.

 
Le Non au réfé­ren­dum ouvre une nouvelle période.
Certes, la faiblesse du mouve­ment de soli­da­rité au peuple grec, en Europe et ailleurs , en France en parti­cu­lier, fut mani­feste. Nous aurions dû être plus actifs et plus effi­caces, sans doute. Mais il était bien diffi­cile de dire les enjeux d’une mobi­li­sa­tion popu­laire alors que le gouver­ne­ment grec ne l’ap­pe­lait que si peu de ses vœux. Alors que c’est par la presse que nous appre­nions, comme les mili­tants de Syriza, les rebon­dis­se­ments du feuille­ton grec projeté en mondo­vi­sion.
Puis ce fut le réfé­ren­dum du 5 juillet, appelé par Tsipras, à la surprise de toutes et de tous, tant des néoli­bé­raux que des mouve­ments de soli­da­rité. 61% de non aux exigences de la Troïka fut le résul­tat qui nous enthou­siasma.
Enthou­siasme de courte durée puisque le Tsipras , « le pisto­let sur la tempe », accepta, moins d’une semaine plus tard, un nouveau mémo­ran­dum de la Troïka . Tsipras affirma ne pas croire à l’ef­fi­ca­cité de ce nouveau mémo­ran­dum.
Le ministre des finances alle­mand Schaüble laissa dire qu’il n’ y croyait pas non plus, et qu’il voulait virer la Grèce de la « zone euro », qu’il atten­dait encore un peu pour ce faire, qu’il n’au­rait plus à attendre long­temps. Les capi­ta­listes alle­mands et leurs poli­ti­ciens (droite, SPD, une partie des Verts)se montrèrent fort déci­dés à diri­ger cette UE néoli­bé­rale, avec l’ac­cord des capi­ta­listes des autres pays, sans diver­gence impor­tante avec les gouver­ne­ments d’autres pays.
Ce fut un coup d’État, une vengeance des néoli­bé­raux.
Et la situa­tion en Grèce est catas­tro­phique, l’in­dé­pen­dance natio­nale réduite à néant comme aupa­ra­vant.

 
Syriza et Unité popu­laire.
Seule l’hy­po­thèse de Tsipras atten­dant le moment propice pour rompre avec l’UE, au nom du programme de Thes­sa­lo­nique, dans un ou deux ou trois mois, pour­rait permettre de conti­nuer à soute­nir Tsipras et ses amis.
Cette hypo­thèse parait non réaliste aux 25 dépu­tés qui ont quitté Syriza pour consti­tuer un nouveau groupe « Unité popu­laire », le 21 août. Depuis, d’autres dépu­tés les ont rejoints. Lafa­za­nis qui était ministre il y a encore peu de temps dirige ce mouve­ment. C’est un regrou­pe­ment poli­tique qui s’est consti­tué en août pour faire vivre la majo­rité du Non au réfé­ren­dum, et qui se déve­loppe.

Pour une Europe soli­daire.
Nous le savons désor­mais: aucune négo­cia­tion avec les hommes grisâtres des struc­tures de l’Union euro­péenne n’est possible. C’est le vote popu­laire qu’ils méprisent lorsqu’il les contre­dit ; nos poli­ti­ciens français, déjà les Sarkozy-Hollande-Royal, dès le Non au réfé­ren­dum sur le TCE en 2005 nous le montrèrent. C’est une Europe soli­daire en rupture et oppo­si­tion fron­tale aux insti­tu­tions de l’Union euro­péenne actuelle que nous avons la respon­sa­bi­lité poli­tique de faire vivre.
C’est une démo­cra­tie à sauver et à réin­ven­ter que nous avons comme tâche poli­tique. La rupture avec les trai­tés euro­péens, la « déso­béis­sance » à ces carcans qui nous accablent est à concré­ti­ser au plus vite.
Dans l’im­mé­diat, nous parti­ci­pons comme hier à toutes les initia­tives de soli­da­rité avec le peuple grec. Nous en repar­le­rons très bien­tôt.

Pascal Bois­sel, 30 août 2015.

 

 

Pour en savoir plus :
Sur ce site, cher­cher :
-Grèce
-Stathis Kouve­la­kis : ex membre du Comité central de Syriza venu à Poitiers, main­te­nant mili­tant de l’Unité popu­laire).
-Éric Tous­saint : membre de la commis­sion d’au­dit de la dette grecque, ses inter­ven­tions avant et après le réfé­ren­dum sont en ligne, mili­tant du CADTM.
-Michel Husson : écono­miste français, qui est inter­venu lors de l’Uni­ver­sité d été de Ensemble.
-Alexis Cukier : philo­sophe, mili­tant d’En­semble, venu animer à Poitiers une réunion de soli­da­rité avec le peuple grec cette année. Il anima la réunion avec Stathis Kouve­la­kis. Il inter­vint lors de notre univer­sité d’été.
-Cédric Durand : écono­miste favo­rable à une sortie de l’euro orga­ni­sée, venu à Poitiers présen­ter son livre « en finir avec l’Eu­rope ». Proche de Stathis Kouve­la­kis.

-Vous consul­te­rez avec grand inté­rêt le site natio­nal d’En­semble sur ce sujet et bien d’autres.

-Et aussi le site Europe sans fron­tière,

-le site Alen­contre,

-le site du CADTM.

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