Antisémitisme : la diabolisation de LFI fait oublier que l’extrême droite est le vrai danger pour notre démocratie
Non, LFI n’est pas antisémite, mais oui, certains de ses dirigeants ont cultivé une sorte de cécité s’agissant de l’emprise d’un antisémitisme latent. Or le racisme et l’antisémitisme historiques du RN ont fait, eux, l’objet d’innombrables condamnations, et la xénophobie est inscrite dans son programme
par Thomas Legrand
Le président du Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif) explique que les insoumis, en mettant en permanence au cœur de toutes Comment en est-on arrivé à se poser cette question ahurissante : La France insoumise est-elle antisémite ? Comment en est-on arrivé au point ou Yonathan Arfi puisse répondre par un simple « ce n’est pas d’actualité », sur France Inter jeudi 20 juin, à la question de savoir si, le cas échéant, il faut, comme le disent Serge Klarsfeld ou Alain Finkielkraut, « faire barrage à LFI avec un bulletin RN » ? (…)
(…) il suffit maintenant d’être favorable à la reconnaissance immédiate de la Palestine pour être considéré par certains commentateurs de notre vie politique comme un antisémite, quelqu’un de complice ou de complaisant avec l’antisémitisme. Voilà une bien terrible et dangereuse banalisation de l’antisémitisme.
L’antisémitisme progresse de façon préoccupante
La faute initiale de Jean-Luc Mélenchon (politique et morale, qu’il n’a jamais voulu reconnaître) c’est sa réaction au 7 Octobre et son refus obtus de qualifier l’acte de « terroriste ». Au-delà des arguments juridiques qui peuvent s’entendre, l’homme politique Mélenchon aurait dû comprendre ce que cette qualification signifiait, s’agissant de l’horreur absolue des images, pour la plupart des Français et pour les juifs en particulier. L’autre faute, c’est d’avoir semblé minimiser l’antisémitisme en France en le qualifiant de « résiduel ». Les chiffres des observateurs officiels (préfecture) ou les observations des agents de terrains (enseignants) sont sans ambiguïté, l’antisémitisme progresse de façon préoccupante. Et le viol de Courbevoie – crime que les principaux responsables de LFI ont d’ailleurs condamné sans réserves et rapidement – nous rappelle la puissance et la profondeur des stéréotypes antisémites
Ces fautes sont heureusement corrigées dans le « contrat de législature » du Nouveau Front populaire, signée par LFI, et qui, lui, ne souffre d’aucune ambiguïté : « L’antisémitisme a une histoire tragique dans notre pays qui ne doit pas se répéter, est-il écrit. Tous ceux qui propagent la haine des juifs doivent être combattus. » Les partis promettant notamment « un plan interministériel pour analyser, prévenir et lutter contre l’antisémitisme en France, notamment à l’école ».
A chacune de leurs interventions publiques, les responsables de LFI rappellent leur aversion pour l’antisémitisme et s’inscrivent explicitement dans la lignée de la gauche jauressienne, celle qui, lors de l’affaire Dreyfus, a défini les canons humanistes de ce camp. Non, LFI n’est pas antisémite, d’ailleurs aucun de ses membres n’a jamais été condamné par la justice pour antisémitisme. Oui, LFI a cultivé une sorte de cécité s’agissant de l’emprise de l’antisémitisme latent. Il a semblé le nourrir par les amalgames effectués par certains militants propalestiniens qui ont l’oreille du mouvement de Jean-Luc Mélenchon.
Il est quand même tragique de constater que bien des centristes et une partie de la droite modérée disent déjà qu’entre les deux tours ils ne choisiront pas entre un candidat LFI et un candidat RN ou, pire, qu’ils voteront pour l’extrême droite. Le racisme et l’antisémitisme historiques du RN ont fait l’objet d’innombrables condamnations. La xénophobie est même inscrite dans le programme de ce parti (préférence nationale, rebaptisée « priorité »). La diabolisation de LFI sur le thème de l’antisémitisme, au-delà de la critique légitime, ne fait que détourner le regard du vrai danger pour notre démocratie : l’extrême droite. L’extrême droite qui, début juillet, a toutes les chances d’être au pouvoir en France pour la première fois depuis 1944.