Libé­ra­tion. 21 juin. Anti­sé­mi­tisme : la diabo­li­sa­tion de LFI fait oublier que l’ex­trême droite est le vrai danger pour notre démo­cra­tie

Anti­sé­mi­tisme : la diabo­li­sa­tion de LFI fait oublier que l’ex­trême droite est le vrai danger pour notre démo­cra­tie

Non, LFI n’est pas anti­sé­mite, mais oui, certains de ses diri­geants ont cultivé une sorte de cécité s’agis­sant de l’em­prise d’un anti­sé­mi­tisme latent. Or le racisme et l’an­ti­sé­mi­tisme histo­riques du RN ont fait, eux, l’objet d’in­nom­brables condam­na­tions, et la xéno­pho­bie est inscrite dans son programme

par Thomas Legrand

Le président du Conseil repré­sen­ta­tif des insti­tu­tions juives de France (Crif) explique que les insou­mis, en mettant en perma­nence au cœur de toutes Comment en est-on arrivé à se poser cette ques­tion ahuris­sante : La France insou­mise est-elle anti­sé­mite ? Comment en est-on arrivé au point ou Yona­than Arfi puisse répondre par un simple « ce n’est pas d’ac­tua­lité », sur France Inter jeudi 20 juin, à la ques­tion de savoir si, le cas échéant, il faut, comme le disent Serge Klars­feld ou Alain Finkiel­kraut, « faire barrage à LFI avec un bulle­tin RN » ? (…)

(…) il suffit main­te­nant d’être favo­rable à la recon­nais­sance immé­diate de la Pales­tine pour être consi­déré par certains commen­ta­teurs de notre vie poli­tique comme un anti­sé­mite, quelqu’un de complice ou de complai­sant avec l’an­ti­sé­mi­tisme. Voilà une bien terrible et dange­reuse bana­li­sa­tion de l’an­ti­sé­mi­tisme.

L’an­ti­sé­mi­tisme progresse de façon préoc­cu­pante

La faute initiale de Jean-Luc Mélen­chon (poli­tique et morale, qu’il n’a jamais voulu recon­naître) c’est sa réac­tion au 7 Octobre et son refus obtus de quali­fier l’acte de « terro­riste ». Au-delà des argu­ments juri­diques qui peuvent s’en­tendre, l’homme poli­tique Mélen­chon aurait dû comprendre ce que cette quali­fi­ca­tion signi­fiait, s’agis­sant de l’hor­reur abso­lue des images, pour la plupart des Français et pour les juifs en parti­cu­lier. L’autre faute, c’est d’avoir semblé mini­mi­ser l’an­ti­sé­mi­tisme en France en le quali­fiant de « rési­duel »Les chiffres des obser­va­teurs offi­ciels (préfec­ture) ou les obser­va­tions des agents de terrains (ensei­gnants) sont sans ambi­guïté, l’an­ti­sé­mi­tisme progresse de façon préoc­cu­pante. Et le viol de Cour­be­voie – crime que les prin­ci­paux respon­sables de LFI ont d’ailleurs condamné sans réserves et rapi­de­ment – nous rappelle la puis­sance et la profon­deur des stéréo­types anti­sé­mites

Ces fautes sont heureu­se­ment corri­gées dans le « contrat de légis­la­ture » du Nouveau Front popu­laire, signée par LFI, et qui, lui, ne souffre d’au­cune ambi­guïté : « L’an­ti­sé­mi­tisme a une histoire tragique dans notre pays qui ne doit pas se répé­ter, est-il écrit. Tous ceux qui propagent la haine des juifs doivent être combat­tus. » Les partis promet­tant notam­ment « un plan inter­mi­nis­té­riel pour analy­ser, préve­nir et lutter contre l’an­ti­sé­mi­tisme en France, notam­ment à l’école ».

A chacune de leurs inter­ven­tions publiques, les respon­sables de LFI rappellent leur aver­sion pour l’an­ti­sé­mi­tisme et s’ins­crivent expli­ci­te­ment dans la lignée de la gauche jaures­sienne, celle qui, lors de l’af­faire Drey­fus, a défini les canons huma­nistes de ce camp. Non, LFI n’est pas anti­sé­mite, d’ailleurs aucun de ses membres n’a jamais été condamné par la justice pour anti­sé­mi­tisme. Oui, LFI a cultivé une sorte de cécité s’agis­sant de l’em­prise de l’an­ti­sé­mi­tisme latent. Il a semblé le nour­rir par les amal­games effec­tués par certains mili­tants propa­les­ti­niens qui ont l’oreille du mouve­ment de Jean-Luc Mélen­chon.

Il est quand même tragique de consta­ter que bien des centristes et une partie de la droite modé­rée disent déjà qu’entre les deux tours ils ne choi­si­ront pas entre un candi­dat LFI et un candi­dat RN ou, pire, qu’ils vote­ront pour l’ex­trême droite. Le racisme et l’an­ti­sé­mi­tisme histo­riques du RN ont fait l’objet d’in­nom­brables condam­na­tions. La xéno­pho­bie est même inscrite dans le programme de ce parti (préfé­rence natio­nale, rebap­ti­sée « prio­rité »). La diabo­li­sa­tion de LFI sur le thème de l’an­ti­sé­mi­tisme, au-delà de la critique légi­time, ne fait que détour­ner le regard du vrai danger pour notre démo­cra­tie : l’ex­trême droite. L’ex­trême droite qui, début juillet, a toutes les chances d’être au pouvoir en France pour la première fois depuis 1944.

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