La guerre inhumanitaire d’Israël dans la bande de Gaza
Extraits
(…) certaines organisations de défense des droits humains l’ont reprise à leur compte, Amnesty International dénonçant à Gaza un « génocide en direct ». Les débats sur ce sujet sont très agités dans le monde universitaire, y compris en Israël, où deux spécialistes de l’histoire de la Shoah estiment que, « même sans Auschwitz à Gaza, il s’agit bien d’un génocide ». (…) Les controverses sont d’autant plus vives que la guerre contre Gaza se traduit par une troublante inversion du langage, l’armée israélienne revendiquant son bilan « humanitaire », malgré la banalisation des traitements inhumains contre la population locale.
Selon la Cour internationale de justice, Israël n’a jamais cessé, depuis 1967, d’être à Gaza la « puissance occupante », même après le retrait, en 2005, de son armée et de ses colons, et ce du fait du « contrôle des frontières » de l’enclave palestinienne. Ce « contrôle » s’est mué en blocus après la prise du pouvoir par le Hamas à Gaza, en 2007. (…)
Mais le premier ministre, Benyamin Nétanyahou, a continué d’être convaincu que le « levier » humanitaire était son arme la plus efficace pour faire fléchir le Hamas. C’était oublier que les dirigeants islamistes étaient davantage préoccupés par leur propre domination que par le bien-être de leurs compatriotes, une évidence tragiquement rappelée par les attaques du 7 octobre 2023.
Après seize années de blocus de la bande de Gaza, c’est un siège hermétique qui lui a été imposé par Israël durant les trois premières semaines de ce conflit. Puis, de novembre 2023 à décembre 2024, la moyenne quotidienne des camions admis dans Gaza a oscillé, suivant les mois, entre 37 et 165, alors même que les Etats-Unis considéraient que la catastrophe humanitaire ne pouvait être endiguée que par l’entrée quotidienne de 600 camions, dont 50 de carburant.
(…)
Cependant, 200 camions seulement ont été admis en trois jours dans Gaza, du 20 au 22 mai – une « goutte d’eau dans l’océan », selon les Nations unies, et un « écran de fumée », aux yeux de Médecins sans frontières. Le directeur général de l’Organisation mondiale de la santé, l’Ethiopien Tedros Adhanom Ghebreyesus, a adjuré Israël de « faire preuve de pitié », rappelant qu’il était « injuste de faire de la nourriture une arme ».
La tragédie dans laquelle sont plongés les civils de Gaza depuis près de vingt mois est loin d’être perçue dans toute son horreur, du fait du black-out médiatique imposé par Israël sur l’enclave palestinienne, interdite d’accès à la presse internationale. Le bilan établi par les sources locales, jugées fiables par les Nations unies, est d’au moins 53 000 morts (dont plus de 16 000 enfants), soit plus de 2,5 % de la population.
Ce total, déjà effarant, de victimes directes des hostilités peut sans doute s’aggraver d’un montant équivalent de morts indirectes, en raison de l’épuisement généralisé de la population face à la faim, aux maladies et au manque d’accès aux soins, sans même compter les milliers de dépouilles toujours ensevelies sous les décombres. Ce bilan aurait été encore plus terrifiant sans le courage et l’abnégation des personnels de santé, qui ont payé un très lourd tribut, avec plus de 1 300 tués.
La militarisation par Israël de l’action humanitaire n’est pas seulement une violation du droit international, qui prescrit à la « puissance occupante d’autoriser et de faciliter les opérations de secours ». (…)
(…) Et ce sont ces masses de civils désarmés, qu’une puissance occupante et une communauté internationale dignes de ce nom devraient protéger, qui subissent de plein fouet l’escalade des hostilités, devenue une fin en soi.
Au vu d’un dévoiement aussi systématique de l’action humanitaire et de la banalisation des traitements inhumains infligés à la population, la guerre d’Israël contre la bande de Gaza, plutôt que contre le Hamas, peut légitimement être qualifiée d’inhumanitaire.
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