Conso­li­der la Nupes

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Treize jours, treize nuits. L’ac­cé­lé­ra­tion de l’his­toire à gauche s’est jouée à une vitesse impres­sion­nante, le temps d’un accord inédit avec la créa­tion de la Nupes. Ce qui nous a propulsé, c’est la défense d’un projet de trans­for­ma­tion. Il n’en reste pas moins que la Nupes est fragile, et qu’elle ne peut se déployer que si elle fait vivre le plura­lisme en son sein. Je plaide ici pour un rassem­ble­ment qui ne soit pas dans l’entre-soi, mais tourné vers ce qui bouge, ce qui conteste, ce qui s’in­vente dans la société.

Conso­li­der la Nupes 

Treize jours, treize nuits. L’ac­cé­lé­ra­tion de l’his­toire à gauche s’est jouée à une vitesse impres­sion­nante, le temps d’un accord inédit avec la créa­tion de la Nupes. Alors qu’à l’au­tomne dernier, nombre d’édi­to­ria­listes s’in­ter­ro­geaient sur notre mort immi­nente, nous avons réussi non seule­ment à sortir la tête de l’eau mais surtout à appa­raître crédible pour dispu­ter la majo­rité aux élec­tions légis­la­tives. Cette percée, nous la devons au score de Jean-Luc Mélen­chon à la prési­den­tielle et à la stra­té­gie qu’il a impul­sée, celle du rassem­ble­ment. Avec la Nupes, le duel qui menaçait de struc­tu­rer le champ poli­tique entre le néoli­bé­ra­lisme et l’ex­trême droite a été déjoué. Nous avons consi­dé­ra­ble­ment renforcé la présence de la gauche et des écolo­gistes à l’As­sem­blée natio­nale, passant d’une soixan­taine à cent-cinquante-et-un sièges. Le face-à-face entre LREM et le Rassem­ble­ment natio­nal appa­raît derrière nous. Nous formons désor­mais un pôle qui, s’op­po­sant et propo­sant, inquiète le pouvoir en place pour sa capa­cité à repré­sen­ter une alter­na­tive sérieuse. C’est une réus­site. 

La Nupes, indis­pen­sable mais fragile

Notre irrup­tion recon­fi­gure l’en­semble de l’échiquier autour de trois pôles, auquel il faut bien sûr ajou­ter les absten­tion­nistes, que chaque bloc va cher­cher à atti­rer, à convaincre puisque c’est celui qui réus­sira à en mobi­li­ser le plus qui pren­dra la main. Mais ce nouvel atte­lage n’est pas encore inscrit dans le marbre. Ne prenons pas la Nupes comme un acquis : elle est encore fragile. Confi­gu­ra­tion toute nouvelle, contes­tée par certains à gauche fût-ce à bas bruit pour l’ins­tant, elle doit résis­ter aux tenta­tives de désta­bi­li­sa­tion externes qui ne vont pas manquer. La macro­nie comme le RN rêvent de voir notre union explo­ser en vol et cherchent sans cesse à nous divi­ser pour mieux régner. Or nous avons le devoir de conso­li­der la Nupes qui est la clé pour gagner dans notre pays. Au regard de l’ins­ta­bi­lité de la situa­tion poli­tique, avec une macro­nie qui gouverne sans majo­rité, il faut la chérir et la soli­di­fier. Vite.

La créa­tion de la Nupes traduit une mue qui concerne toutes ses compo­santes : des insou­mis qui cherchent des alliés pour être majo­ri­taires, des écolo­gistes qui choi­sissent l’an­crage à gauche, des socia­listes qui assument de reprendre le fil de leur histoire au long cours, des commu­nistes qui, après une prési­den­tielle d’auto-affir­ma­tion, renouent avec le rassem­ble­ment. 

Le choix d’une gauche franche

Ce qui nous a propulsé, c’est la défense d’un projet de trans­for­ma­tion en profon­deur du pays.  

Le parti pris de l’ac­com­pa­gne­ment a non seule­ment violem­ment échoué en 2017 après l’ère Hollande mais il ne s’est pas relevé en 2022. Ceux et celles qui voudraient rame­ner le score de Mélen­chon à un erre­ment de l’his­toire ou à ses seules quali­tés de tribun pour en reve­nir main­te­nant aux « choses sérieuses », une ligne plus « raison­nable » qui nous rendrait « crédible pour gouver­ner », font fausse route. Ce qui rend crédible pour gouver­ner, c’est d’abord le nombre. Et le nombre a choisi à gauche Jean-Luc Mélen­chon sur la base d’une orien­ta­tion qui rompt avec les normes domi­nantes. Le nombre a plébis­cité – toutes choses égales par ailleurs – une Nupes porteuse d’un programme de franc chan­ge­ment. C’est une carac­té­ris­tique de notre temps : seule une propo­si­tion poli­tique qui prend les problèmes à la racine peut susci­ter de l’adhé­sion popu­laire. 

En 2005, la dyna­mique du « non de gauche » aux trai­tés néoli­bé­raux a donné le sens de la pers­pec­tive éman­ci­pa­trice au XXIe siècle. À gauche, nous ne pouvons être popu­laires, et donc gagner, que si nous sommes capables de nous en prendre à l’éco­no­mie libé­rale qui crée des inéga­li­tés et de la concur­rence à tous les étages, au produc­ti­visme qui détruit la planète comme nos désirs, à l’aus­té­rité budgé­taire dictée par la finance et la tech­no­cra­tie. Nous oppo­sons à ce monde qui tourne à l’en­vers la justice sociale et la coopé­ra­tion, la bifur­ca­tion écolo­gique qui protège l’éco­sys­tème et conduit à une vie meilleure, la protec­tion des biens communs. Ce qui fait la force de la Nupes, c’est d’af­fron­ter les logiques destruc­trices à l’œuvre depuis des décen­nies. C’est d’exi­ger des protec­tions, des droits, des plans d’in­ves­tis­se­ment pour faire bascu­ler notre système social dans l’en­traide et le bien vivre. C’est de mettre en cause les profi­teurs de crise et les hyper-riches, condi­tion pour faire recu­ler la préca­rité et la pauvreté. Et c’est d’avoir plei­ne­ment conscience que le corol­laire au néoli­bé­ra­lisme, c’est la pente auto­ri­taire, l’abais­se­ment des liber­tés. Aussi récla­mons-nous la démo­cra­tie, partout. S’il existe des sensi­bi­li­tés, des histoires, des cultures diffé­rentes au sein de la Nupes, son unité réside, me semble-t-il, dans ce parti pris désor­mais partagé de méta­mor­phose de notre modèle de déve­lop­pe­ment. 

L’in­dis­pen­sable plura­lisme

Il n’en reste pas moins que la Nupes ne peut se déployer que si elle fait vivre le plura­lisme en son sein. Nous le savons par l’ex­pé­rience, l’at­ti­tude hégé­mo­nique de la force en tête fait recu­ler les construc­tions unitaires. Il revient donc à la France Insou­mise de permettre à chacune des compo­santes de la Nupes de conti­nuer à faire vivre sa sensi­bi­lité. C’est évidem­ment une tension car nous avons besoin d’être à la fois cohé­rents et divers. Aussi la respon­sa­bi­lité n’in­combe-t-elle pas seule­ment à la FI. Si telle ou telle orga­ni­sa­tion ne joue pas le jeu de l’es­pace commun, espé­rant profi­ter de la séquence pour se renfor­cer au détri­ment de la démarche commune, nous en paie­rons collec­ti­ve­ment les pots cassés. Il ne s’agit pas seule­ment de struc­tures permet­tant de faire vivre le plura­lisme, même si l’in­ter­groupe à l’As­sem­blée natio­nale, le Parle­ment de la Nupes présidé par Auré­lie Trouvé et les assem­blées locales de la Nupes – là où elles existent – sont des points d’ap­pui consi­dé­rables pour construire du commun. C’est avant tout un état d’es­prit. Le plura­lisme me semble capi­tal pour que vive la Nupes, pour rayon­ner plus large­ment dans la société française, pour déga­ger à chaque étape une stra­té­gie et des conte­nus affi­nés. Je suis même convain­cue que certaines tensions entre nous sont produc­tives. Entre réforme et révo­lu­tion, par exemple. Mais aussi, en matière de profil poli­tique, entre « respec­ta­bi­lité » et « inso­lence ». S’il faut respec­ter les cultures et apports de chacun, ne figeons pas les rôles, cher­chons à progres­ser ensemble. 

Travailler, cher­cher, affi­ner

J’alerte sur l’idée que nous aurions un programme fini, une stra­té­gie au cordeau, un récit terminé, et qu’il ne suffi­rait plus que d’en­fon­cer le clou en déployant des forces mili­tantes sur la base de l’exis­tant. Sans cesse nous devons travailler. Sans cesse nous devons conti­nuer à cher­cher. Cette capa­cité d’éla­bo­ra­tion, de recherche d’idées neuves, de mots et d’in­ter­ven­tions toujours plus en phase avec l’époque doit deve­nir une quête commune. Chacun, chacune peut la mener à partir de son histoire, de sa culture. Mais ne croyons pas qu’il suffi­rait de mettre en commun ce que chaque force a aujourd’­hui dans sa besace, et de touiller pour déga­ger le compro­mis entre nous. La réponse ne peut être juste et propul­sive que si elle cherche dans la société les façons de mieux répondre aux défis contem­po­rains. Et cela suppose du travail, beau­coup de travail. Le succès de la France Insou­mise est aussi lié à cette éner­gie qu’elle a su déployer, en lien avec les mouve­ments dans le pays. Le travail, c’est évidem­ment aussi le mili­tan­tisme, l’an­crage local, le déploie­ment partout. Je veux ici plai­der pour un rassem­ble­ment qui ne soit pas dans l’entre-soi mais bel et bien tourné vers ce qui bouge, ce qui conteste, ce qui s’in­vente dans la société. Le risque du cartel élec­to­ral tourné sur lui-même doit être mesuré. Nous devons sans cesse regar­der en dehors de nous, se ressour­cer et se raccor­der à la vie sociale, cultu­relle, intel­lec­tuelle du pays. Car au final, il ne s’agit pas seule­ment de se mettre d’ac­cord entre nous mais surtout de placer la Nupes toujours plus en phase avec le peuple français. 

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