Smarves, le 20 janvier 2015
A l’attention de Madame Ségolène ROYAL
Ministre de l’Ecologie, du Développement durable et de l’Energie.
Hôtel de Roquelaure
246, boulevard Saint-Germain, Paris 7e
Siège social : Communauté de communes de la Villedieu du Clain
25 Route de Nieuil, 86340 La Villedieu du Clain
http://www.non-lgv-poitiers-limoges.fr
Madame la Ministre,
En ce sombre début d’année, permettez-nous de vous faire part de notre tristesse et de notre colère d’avoir trouvé au bas de la Déclaration d’Utilité Publique concernant la LGV Poitiers-Limoges votre signature. Bien évidemment, le fait qu’elle ait été réalisée au pire moment possible, dans un contexte où le gouvernement appelait à la solidarité nationale et à la réaffirmation des valeurs républicaines est déjà en soi une faute politique grave. Vous n’êtes pas sans savoir que toutes les institutions républicaines chargées de la surveillance de l’exécutif avaient positionné un avis négatif sur la question de la réalisation de cette Ligne à Grande Vitesse entre Poitiers et Limoges. Le passage en force du Gouvernement sur ce dossier apparaît comme un déni de réalité, au pire comme un cadeau à des amis politiques dans un contexte de rigueur budgétaire et de réflexion sur les solutions d’avenir. Il est de plus totalement illisible par vos concitoyens.
Où est l’ancienne Présidente de la Région Poitou-Charentes qui pensait en termes de TER, de mobilité durable, de concertation citoyenne ? Certainement pas dans ces bas calculs politiques court-termistes indignes de la relation de confiance que nous pensions avoir établie avec vous.
Ce retournement n’est pas seulement dommageable pour votre image, il est dramatique pour vos anciens administrés. Tout d’abord, cette DUP fige de fait l’ensemble des territoires mitoyens de cette ligne et ce pour l’insoutenable durée de 15 ans ! Avez-vous pris la mesure des conséquences d’une telle décision ? Comment, en l’absence de tout début de financement, les citoyens du nord Limousin et du sud Vienne qui, pour une quelconque raison devront vendre leurs biens immobiliers, seront-ils en mesure de le faire ? Dans l’état actuel, ces biens n’ont plus aucune valeur, et ne sont même pas expropriables. Et je ne parle pas des propriétés situées aux abords de la zone d’expropriation qui vont voir leur valeur très largement diminuée. Comment les exploitations agricoles situées sur le trajet (des centaines d’hectares !) pourront-elles envisager des investissements, quelle banque prendra le risque de leur prêter de l’argent, comment des successions pourront-elles se réaliser alors que tout est gelé pour 15 ans ? Quelles conséquences aura la constitution de réserves foncières destinées à ce projet pour l’installation de futurs exploitants ? Il apparaît clair qu’en signant cette DUP, vous n’avez pas pris en compte la souffrance que ce « simple » geste impliquait pour vos anciens administrés. Le sentiment de trahison est très fort et le risque de radicalisation nous inquiète tous. D’autant plus que c’est bien parce que nous avions confiance en vous que nous avions accepté sans barguigner le report sine die du rendez-vous que nous avions obtenu en décembre auprès de Mr Vidalies afin de vous faire part de nos craintes envers les conséquences d’une signature de cette DUP. A posteriori, cette annulation apparaît comme un déni de démocratie très difficile à accepter.
Nous comprenons parfaitement la nécessité pour une Ministre de faire preuve de solidarité gouvernementale, mais vous n’avez clairement rien fait pour infléchir cette décision, ni la rendre plus supportable en la limitant dans le temps.
Pour finir, nous pensons que ce mauvais coup porté à la démocratie et aux institutions n’est pas un cadeau pour le Limousin et la future Grande Région : en effet, comment des discussions sérieuses sur l’organisation des transports dans cette future Région pourront-elles avoir lieu sans être en permanence polluées par la volonté du Limousin d’obtenir un financement pour Sa LGV ? La question de l’amélioration des dessertes TER, du service de transport d’avenir que les Régions se doivent de mettre en place pour les défis de demain ne pourra plus être discutée tant que le Limousin n’aura pas obtenu satisfaction. D’autre part, tout l’effort financier sera détourné vers ce but par cette partie de la future Région. C’est donc au final un très mauvais calcul. Je n’oublie évidemment pas d’évoquer les conséquences que pourront tirer de cette situation les citoyens en termes électoraux.
Tout ce que nous espérons aujourd’hui, c’est que le gouvernement n’exerce pas de pressions sur le Conseil d’État à l’occasion des recours que nous envisageons, mais dans ce contexte de retour de services entre amis politiques, tout est malheureusement possible.
Dans ce cadre, nous faisons tout notre possible pour contenir une radicalisation des citoyens en colère (à quand une ZAD supplémentaire ?), et comptons sur vous pour nous aider dans cette tâche en agissant partout où vous le pourrez pour arrêter ce projet délétère.
Toujours à votre disposition pour discuter d’avenir et travailler ensemble,
Le Président du Collectif « Non à la LGV Poitiers-Limoges »
Nicolas BOURMEYSTER