Crise : texte poli­tique D’En­semble! natio­nal

1 Quelle analyse de la crise démo­cra­tique ?

L’en­semble des pays euro­péens est touché par un rejet de l’Eu­rope actuelle s’ex­pri­mant par  une absten­tion massive et une percée des forma­tions xéno­phobes et natio­na­listes. Mais, dans cette vague domi­nante, s’ex­priment aussi des scores impor­tants pour la gauche radi­cale comme en Grèce avec la victoire de Syrisa ainsi que dans d’autres pays en parti­cu­lier dans l’Etat espa­gnol.

La singu­la­rité française réside en la victoire de l’ex­trême droite qui creuse un écart déter­mi­nant avec la gauche radi­cale. Même si cette victoire était parfai­te­ment prévi­sible et annon­cée par tous les sondages,  il faut mesu­rer le malaise et le choc  provoqués dans la société qui montre que le FN n’est pas perçu comme  un parti comme les autres (et c’est posi­tif). Cette victoire est d’abord le résul­tat de la poli­tique menée par ce gouver­ne­ment venant de la gauche, (alors qu’en Europe on a une majo­rité de gouver­ne­ment de droite ou de coali­tions gauche-droite) qui, porté au pouvoir pour résis­ter à la finance, fait exac­te­ment l’in­verse  en bouchant l’ho­ri­zon poli­tique pour toutes les victimes de la crise. Le résul­tat en a été une absten­tion massive de l’élec­to­rat de gauche, qui n’a nulle­ment basculé vers le FN, mais que le FdG a été inca­pable d’at­ti­rer.

Le désar­roi l’a emporté, y compris dans le mouve­ment social. Paral­lè­le­ment à un retrait des urnes, on a aussi assisté à un retrait dans les mobi­li­sa­tions, qui sont restées loca­le­ment impor­tantes, mais d’un faible niveau quand il fallait mettre en cause les choix du gouver­ne­ment. La conscience anti­li­bé­rale n’a pas su trou­ver une expres­sion poli­tique capable de prendre l’hé­gé­mo­nie à gauche, et a donc reculé, lais­sant la place aux valeurs de repli et d’ex­clu­sion que la droite et l’ex­trême-droite ont su porter de leur côté. D’abord frappé par l’abs­ten­tion aux muni­ci­pales, y répon­dant par l’ag­gra­va­tion de sa poli­tique avec la nomi­na­tion de Valls et l’an­nonce du pacte de respon­sa­bi­lité, il a alors achevé le décou­ra­ge­ment et augmenté le rejet, et ouvert ainsi la voie au renfor­ce­ment d’un vote sanc­tion de droite autour du FN. Le PS connait une défaite histo­rique, les écolo­gistes régressent pour avoir accom­pa­gné cette poli­tique gouver­ne­men­tale, mais la gauche de gauche n’en profite pas, ainsi  que le montrent les scores main­te­nus du Front de gauche et la dispa­ri­tion élec­to­rale de LO et du NPA. Seule « Nouvelle Donne » avec 3% s’in­vite dans le nouveau paysage poli­tique.

Dans les années 90 et 2000, en France mais aussi en Europe (Italie, Alle­magne, Portu­gal, puis Grèce), la combi­nai­son d’un haut niveau de comba­ti­vité,  l’ap­pa­ri­tion de nouveaux mouve­ments sociaux, et le déve­lop­pe­ment de gauches radi­cales, avait commencé à modi­fier la donne et fait mûrir bien des espoirs. Aujourd’­hui sur ces trois terrains la situa­tion n’a pas été suivie de progrès linéaires (surtout en France), elle s’est parfois inver­sée, des reculs se sont produits, comme si des ressorts de comba­ti­vité sociale et de nouvelles alter­na­tives poli­tiques s’étaient affai­blis. De nouveaux ressorts de radi­ca­lité appa­raissent dans le domaine de la produc­tion ou de la consom­ma­tion mais sans être à la hauteur néces­saire et sans expres­sion poli­tique ou élec­to­rale.

Il semble bien qu’en France, mais sans doute dans d’autres pays euro­péens, se nouent diffé­rents niveaux de crise qui consti­tue  une crise globale, à laquelle s’ajoute un moment de crise poli­tique / crise de régime au sens plein du terme :

– Les diffé­rentes crises écono­mique, sociale qui déstruc­turent depuis des décen­nies le monde du travail et la société dans son ensemble avec un proces­sus de paupé­ri­sa­tion, le recul de l’au­to­no­mie réelle, de pers­pec­tives frap­pant les jeunes et les femmes avec la montée du chômage et de la préca­rité.

–       Une crise d’épui­se­ment des modes de produc­tion et de consom­ma­tion nour­ris­sant une prise de conscience gran­dis­sante des besoins et des urgences écolo­giques qui contraste avec l’iner­tie gouver­ne­men­tale en la matière ou la pour­suite de projets inutiles et dange­reux

–       L’exis­tence d’un  racisme impor­tant qui coha­bite conflic­tuel­le­ment tandis que le métis­sage continu de la popu­la­tion se pour­suit

–       Un senti­ment de déclas­se­ment, de pertes de repères, dans un monde où le centre de gravité se déplace au Sud et en Orient ; une inquié­tude géné­rale face à la mondia­li­sa­tion dont les effets de concur­rence et de compé­ti­tion n’épargne presque plus aucune caté­go­rie de la popu­la­tion

–       L’Eu­rope telle qu’elle est appa­raît davan­tage comme une menace de plus que comme une protec­tion : sa construc­tion n’étant ni soli­daire, ni sociale, ni démo­cra­tique, le rejet est géné­ral

–       Le main­tien quels que soient les chan­ge­ments de gouver­ne­ment, les résul­tats de réfé­ren­dum, les crises et des effon­dre­ments finan­ciers bancaires, des mêmes poli­tiques libé­rales

–       La mise en cause du clivage gauche/droite. Sous une double pres­sion : celle du constat que le parti qui est perçu comme étant la gauche mène au gouver­ne­ment une poli­tique de droite ; ce qui se traduit par une perte de fonc­tion­na­lité de la bipo­la­ri­sa­tion poli­tique PS/UMP ; celle du FN qui travaille à substi­tuer aux oppo­si­tions de classe une oppo­si­tion sur critère « natio­nal-ethnique »…

–       Une crise de légi­ti­mité poli­tique, quand la poli­tique menée par le gouver­ne­ment est à ce point contra­dic­toire avec les aspi­ra­tions de celles et ceux qui l’ont porté au pouvoir qu’elle entraîne absten­tion massive ,et  provoque un vaste mouve­ment de rejet de la poli­tique, dans l’élec­to­rat de gauche, puisqu’une nouvelle fois est démon­trée, et avec violence, l’ab­di­ca­tion devant le libé­ra­lisme sans aucune volonté de chan­ge­ment.

–       La crise de l’al­ter­na­tive et du projet d’éman­ci­pa­tion : nous ne sommes ainsi pas sortis de la crise du projet de trans­for­ma­tion sociale issu de l’ef­fon­dre­ment du « socia­lisme réel­le­ment exis­tant » et nous ne pouvons aujourd’­hui nous ados­ser à rien de compa­rable à ce qui a été l’es­pé­rance commu­niste il y a quelques décen­nies ; cela rend plus diffi­cile de porter un projet d’éman­ci­pa­tion critique du capi­ta­lisme, ce d’au­tant plus que le PS, ce récla­mant de la gauche n’a de cesse de clamer qu’il n’y pas d’autre poli­tique possible.

A ce stade, cette crise globale s’ex­prime par un rejet du système de repré­sen­ta­tion poli­tique, une crise démo­cra­tique au sens large du terme : que reste-t-il du pouvoir du peuple à l’âge de la domi­na­tion de l’oli­gar­chie capi­ta­liste mondiale ?

Dans cette situa­tion le FN dispose d’une avance inquié­tante.

En revanche, Le rejet des  poli­tiques menées n’a pas profité à la gauche de la gauche,  les résul­tats des listes FDG même s’ils se main­tiennent repré­sentent un échec dont il faut analy­ser les causes :

– malgré un programme clair et l’avan­cée stra­té­gique de l’ar­ti­cu­la­tion « rompre, déso­béir, refon­der » nous n’avons pas su  être suffi­sam­ment concrets ;

– dans le meilleur des cas, nos propo­si­tions ne sont pas ressor­ties clai­re­ment, dans le pire, c’est un discours caco­pho­nique qui s’est fait entendre

– la compo­si­tion de nos listes lais­sait  peu de place à la diver­sité ;

– La tona­lité de la campagne n’était pas celle d’une gauche radi­cale et alter­na­tive porteuse d’es­poir et de rêve.

Au-delà, il faut s’in­ter­ro­ger sur le fait de savoir pourquoi les élec­teurs de gauche qui se sont abste­nus pour mani­fes­ter le rejet de la poli­tique du gouver­ne­ment n’ont pas voté pour le FDG ;

2/La compré­hen­sion de ce qu’est le FN.

Beau­coup a été écrit : première force natio­nale, première chez les jeunes et chez les ouvriers,  exten­sion géogra­phique aux régions jusqu’ici peu touchées. Capa­cité à partir d’un noyau initial de convic­tion (le rejet de l’im­mi­gra­tion) à récu­pé­rer un discours anti austé­rité, social cher­chant à impo­ser la ques­tion iden­ti­taire et sécu­ri­taire.

On oscille alors dans les commen­taires entre :

– une vision catas­tro­phiste (le FN serait aux portes du pouvoir, parce qu’il fédé­re­rait toutes les compo­santes du camp réac­tion­naire mobi­lisé sur de multiples thèmes…), à quoi s’ajoute une hési­ta­tion sur la carac­té­ri­sa­tion : extrême-droite, droite extrême, fasciste ?

– et une rela­ti­vi­sa­tion pouvant aller jusqu’au déni : ce serait une réalité seule­ment élec­to­rale (qu’il ne faut pas gros­sir), voire un simple arte­fact orga­nisé par les médias au service d’in­té­rêts poli­ti­ciens (ceux du PS). Ou bien alors une réac­tion, une pous­sée de fièvre chro­nique, face à des tendances de fond : mondia­li­sa­tion, métis­sage, euro­péa­ni­sa­tion, modi­fi­ca­tion des struc­tures fami­liales, qui fina­le­ment s’im­po­se­ront. Mais quelque fois la fièvre peut empor­ter le mala­de…

La direc­tion du FN se pose main­te­nant la ques­tion de l’ac­cès au pouvoir. D’au­tant que le FN dispose de réserves élec­to­rales au sein des absten­tion­nistes en parti­cu­lier au sein des secteurs profon­dé­ment déso­cia­li­sés et margi­na­li­sés (non inscrits aujourd’­hui sur les listes). Dans cette hypo­thèse drama­tique, l’uti­li­sa­tion de tous les aspects néga­tifs de la consti­tu­tion de la Vème Répu­blique pour­rait entrai­ner des effets consi­dé­rables.

Or, il y a une montée en puis­sance du FN, et de sa crédi­bi­lité, qui agit sur toutes les forces poli­tiques et tire à droite l’en­semble du champ poli­tique, ce qui consti­tue l’élé­ment le plus grave de la conjonc­ture : légi­ti­ma­tion du racisme et des discri­mi­na­tions, droi­ti­sa­tion supplé­men­taire de l’UMP et justi­fi­ca­tion d’un cours gouver­ne­men­tal encore plus droi­tier. Le FN y répond à sa manière ; raciste, xéno­phobe, sexiste, homo­phobe, anti­sé­mite, isla­mo­phobe Il déve­loppe une réponse simpliste aux inquié­tudes et aux diffé­rentes facettes de la crise actuelle. En parti­cu­lier, il exprime le rejet de la classe poli­tique, de la poli­tique tradi­tion­nelle, des affaires, la volonté de renou­vel­le­ment (beau­coup de candi­dats jeunes). De plus, le FN conti­nue à piller les thèmes sociaux, écolo­giques, alter­mon­dia­listes, anti-austé­rité, entre­te­nant la confu­sion et renouant ainsi avec une tradi­tion qui était celle du fascisme origi­nel.

3– Quels chan­ge­ments poli­tiques dans la nouvelle phase poli­tique ?

a)    Les contra­dic­tions du PS.

La poli­tique de François Hollande a conduit le PS à subir une défaite élec­to­rale majeure, qui compro­met dura­ble­ment son assise terri­to­riale. La deuxième phase du quinquen­nat avec la nomi­na­tion de Valls va être domi­née par une poli­tique d’aus­té­rité beau­coup plus sévère et systé­ma­ti­sée. Il est inévi­table que cette situa­tion conduise à des contra­dic­tions de plus en plus fortes au sein du PS et dans la majo­rité gouver­ne­men­tale, et à des reclas­se­ments poli­tiques impor­tants. Le gouver­ne­ment Valls se présente en effet comme disposé à mettre sa propre majo­rité au pied du mur, voire à l’af­fron­ter, sur le thème : « c’est l’ac­cep­ta­tion de ma poli­tique ou le chaos de la crise gouver­ne­men­tale, à vous de choi­sir ». Il semble bien que le projet de Hollande et de Valls vise à pous­ser plus loin le proces­sus de  trans­for­ma­tion du PS en parti démo­crate, proces­sus déjà en cours mais forcé­ment facteur de crise et de résis­tance par son coût social (et élec­to­ral !).

Les premières modi­fi­ca­tions sont appa­rues à l’ini­tia­tive du Président.

° Le gouver­ne­ment Valls, c’est  une meilleure commu­ni­ca­tion et davan­tage d’au­to­rité, avec l’exi­gence d’une disci­pline accrue deman­dée à  la majo­rité. C’est aussi para­doxa­le­ment,  du fait de la sortie d’EELV du gouver­ne­ment et de la contes­ta­tion au sein du PS, davan­tage de jeu dans la vie parle­men­taire, en fonc­tion de la néces­sité de répondre à cette contes­ta­tion, de conte­nir la crise de légi­ti­mité de Hollande (d’où l’épi­neuse hypo­thèse de la disso­lu­tion), et de favo­ri­ser l’ex­pres­sion de soutiens venant de la droite à la poli­tique menée.

Même si, à l’ex­cep­tion du FN, l’exi­gence de la disso­lu­tion n’est pas actuel­le­ment avan­cée, la ques­tion d’une autre majo­rité est posée, à partir des deux bords de l’échiquier parle­men­taire. Conti­nuons à y réflé­chir mais en l’as­sor­tis­sant de la double exigence de la 6ème répu­blique et du proces­sus consti­tuant comme réponse à la crise de la poli­tique et au moment de crise de régime.

A gauche du PS, avec la contes­ta­tion de la nomi­na­tion de Valls et le refus d’ap­prou­ver sa feuille de route, à quoi s’ajoute le refus d’EELV de parti­ci­per au gouver­ne­ment, se dessinent les contours poten­tiels d’un rassem­ble­ment de forces prônant une rupture avec la poli­tique d’aus­té­rité.

La droite est elle-même en crise : une crise profonde qui est en fait l’ad­di­tion du Sarko­zysme. Celui-ci en se faisant élire en 2007 en vampi­ri­sant les voix du FN et en cher­chant à se faire réélire en rompant les digues construites en 1945 entre la droite et l’ex­trême droite, a laissé un héri­tage explo­sif. Dans un contexte où s’ad­di­tionnent affaires et règle­ments de comptes, c’est bien la ligne poli­tique qui est en ques­tion. La réponse du trium­vi­rat qui a déposé Copé, à défaut de pouvoir toucher pour l’heure Sarkozy, vise à recons­truire une droite libé­rale alliée avec le centre droit.

Du côté des centristes, voire de certains UMP, l’abs­ten­tion et quelques votes posi­tifs par rapport à la poli­tique portée par Valls, en cohé­rence avec le soutien au Pacte de respon­sa­bi­lité, indique une possible majo­rité avec un centre de gravité centriste. Si celle-ci se concré­ti­sait, elle libé­re­rait des espaces de recom­po­si­tions, d’un côté entre droite néocon­ser­va­trice et extrême-droite, de l’autre, entre gauche non gouver­ne­men­tale et des secteurs du PS voulant main­te­nir l’an­crage « socia­liste » du PS.

Ces dyna­miques sont entra­vées par le carcan de la Ve Répu­blique, mais elles indiquent des évolu­tions qui peuvent s’ac­cé­lé­rer en cas d’ag­gra­va­tion de la crise écono­mique et poli­tique. Inver­se­ment elles se verront d’au­tant plus bloquées que devien­dra progres­si­ve­ment prégnante l’échéance de 2017. Ce à quoi s’est immé­dia­te­ment attelé le nouveau Secré­taire natio­nal du PS.

° La nomi­na­tion à la tête du PS de Camba­dé­lis ce n’est pas seule­ment la reprise en main de la direc­tion du parti, c’est un ordre de mission : sauver le soldat PS en 2017. D’où la valo­ri­sa­tion de la thèse du « tripar­tisme » : sous menace d’une catas­trophe, il faut assu­rer la présence du PS au 2è tour, ce qui implique de rassem­bler le PS, et la/les gauche(s)… Du coup on esca­mote la poli­tique d’aus­té­rité, dont Bruxelles serait davan­tage respon­sable que l’Ély­sée. Ce qui tend à consi­dé­rer que ceux qui à gauche font de leur prio­rité de la dénon­cia­tion du Pacte de respon­sa­bi­lité cèdent à un gauchisme irres­pon­sable.

b.    Diffi­cul­tés et pers­pec­tives du Front de Gauche 

Le débat ouvert au sein du PC mobi­lise au-delà des habi­tuels cadres oppo­sés au Front de gauche, les pertes subies lors des muni­ci­pales et les tensions avec J-L Mélen­chon relancent la critique d’un FdG qui ne permet pas, contrai­re­ment aux promesses de la direc­tion, de renfor­cer les posi­tions du Parti. Le rapport au PS n’est donc pas encore clari­fié malgré une condam­na­tion sans équi­voque de la poli­tique gouver­ne­men­tale.

Du côté du PG ,un débat va-t-il s’ou­vrir sur la sures­ti­ma­tion d’un rapport de force censé bous­cu­ler toute la gauche et le Front de gauche lui-même, et qui justi­fiait une posture de conflit et de rapport de forces au sein du FDG, sur le profil public que cela entraî­nait et sur le fait de privi­lé­gier une auto­cons­truc­tion de ce parti autour de son leader ? Si le PG main­tient l’op­tique du rassem­ble­ment dans le FDG, ces ques­tions ne sont pas réso­lues.

La contes­ta­tion au sein du PS et d’EELV va conti­nuer à se déve­lop­per alimen­tée par le cours de plus en plus droi­tier de Hollande/Valls Elle peut permettre des conver­gences entre ce que défend l’en­semble du FDG en termes de nouvelle majo­rité à gauche, mais celles-ci sont égale­ment suscep­tibles d’être percu­tées par la poli­tique que va enga­ger Camba­dé­lis en terme de rassem­ble­ment de toute la gauche face au danger FN en 2017.

Cela dit, le type de poli­tique suivi par Hollande, les diffi­cul­tés rencon­trées dans le Front de gauche, peuvent lais­ser place à un sursaut collec­tif.

La divi­sion du NPA ne doit pas être lue comme super­fi­cielle et ne donnant lieu qu’à quelques manœuvres pseudo unitaires. A présent deux sensi­bi­li­tés se jugent réci­proque­ment comme anta­go­niques. Ce qui signi­fie des évolu­tions qu’il faudra prendre au sérieux et qui appel­le­ront des propo­si­tions (comme Ensemble l’a préco­nisé à propos des euro­péennes). Sans ulti­ma­tisme c’est un rappro­che­ment avec le FDG que nous devons propo­ser au NPA. De même l’exis­tence de Nouvelle Donne risque d’être pérenne. Il faut donc là aussi être force de propo­si­tions par rapport à eux.

Il semble qu’il faille clari­fier en quoi l’af­fir­ma­tion d’un « pôle » rassem­blant forces poli­tiques, syndi­ca­listes, asso­cia­tives, pour porter une poli­tique alter­na­tive au néoli­bé­ra­lisme, n’in­ter­fère pas (ou inter­fère de manière posi­tive) avec la néces­saire unité syndi­cale et sala­riale porteuse de mobi­li­sa­tions sociales. Face à la montée du FN, l’unité des forces revient comme une néces­sité première pour le contrer, cela concerne le mouve­ment syndi­cal et social, mais aussi la recherche du rassem­ble­ment à gauche, non pas autour de la poli­tique du PS au gouver­ne­ment, mais autour d’une poli­tique s’op­po­sant à la poli­tique du gouver­ne­ment et l’aus­té­rité et offrant une alter­na­tive de pouvoir, qui ne peut se résu­mer au Front de gauche seul.

Il y aura dans les mois qui viennent, dans la phase d’ap­pli­ca­tion du pacte de respon­sa­bi­lité, une série de déci­sions concer­nant des réduc­tions massives de crédits : services public, hôpi­taux, collec­ti­vi­tés terri­to­riales, trans­for­ma­tion écolo­gique… A chaque fois ce sera une occa­sion pour le mouve­ment social de se mani­fes­ter en oppo­si­tion, et à chaque fois ce doit être aussi l’oc­ca­sion de tester et confor­ter la conver­gence d’une oppo­si­tion commune FdG/EELV/PS dissi­dent-e-s/NPA/ND, et avec la néces­sité de mettre en avant des solu­tions alter­na­tives. A chaque fois, il revien­dra au Front de gauche d’être actif , offen­sif, unitaire, pour rassem­bler une oppo­si­tion poli­tique de gauche, en lien avec le mouve­ment social, tout en faisant avan­cer un travail commun avec écolos et socia­listes dissi­dents sur les conte­nus autour desquels pour­rait se dessi­ner une majo­rité alter­na­tive. On va donc avoir une période, plus ou moins longue, où il est possible et souhai­table, qu’un rassem­ble­ment se forge dans l’ex­pé­rience des débats parle­men­taires et des réac­tions du mouve­ment social.

Dans la construc­tion du rassem­ble­ment large, allant du NPA à la gauche du PS, il peut y avoir une tenta­tion ou une volonté (venant de divers côtés) de s’en tenir à des échanges, des débats, par ailleurs abso­lu­ment indis­pen­sables comme première étape. Ces débats publics incluant le Front de gauche peuvent dessi­ner l’hy­po­thèse d’une autre poli­tique et d’une autre alliance pour les années à venir, dont le centre de gravité serait évidem­ment diffé­rent de celui de Hollande en 2012. Mais la crise actuelle de la confiance et de la repré­sen­ta­tion poli­tique est telle que cela ne saurait suffire. Il est néces­saire de tenter par des actes, dans les mobi­li­sa­tions et sur le plan parle­men­taire, de faire émer­ger l’es­poir qu’une autre poli­tique est possible main­te­nant et pas en 2017, même si cela doit passer par une mise en mino­rité parle­men­taire et une crise du gouver­ne­ment. Si cela n’est pas tenté à gauche, le risque existe que cela soit tenté à droite, aggra­vant encore plus la situa­tion.

Dans ce cadre, le Front de gauche devrait prépa­rer soigneu­se­ment des propo­si­tions autour des axes d’une autre poli­tique, afin de nouer éven­tuel­le­ment des alliances le moment venu :

– une grande réforme fiscale

– des mesures pour déso­béir à l’Eu­rope libé­rale et refon­der l’Eu­rope

– des mesures d’ur­gence pour de nouvelles insti­tu­tions plus démo­cra­tiques (vers une 6ème Répu­blique)

– des mesures pour une tran­si­tion éner­gé­tique en rupture avec le produc­ti­visme

– des mesures d’ur­gence pour les droits sociaux (protec­tion sociale, droit du travail, réduc­tion du temps de travail…) et humains fonda­men­taux.

Tout ceci est lié aux ques­tions déci­sives pour le FdG : quelle autre poli­tique oppo­ser à celle du pouvoir socia­liste telle que concen­trée dans le Pacte de respon­sa­bi­lité ? Quelles arti­cu­la­tions entre mesures pouvant peser sur des points de rupture de cette poli­tique ? Quelle cohé­rence écono­mique oppo­ser à celle du néoli­bé­ra­lisme ? Quelle pers­pec­tive de société ?

Il y a néces­sité pour Ensemble et pour le Front de gauche d’af­fir­mer une dispo­ni­bi­lité à travailler à une nouvelle majo­rité anti­li­bé­rale et anti-austé­ri­taire, impliquant un rassem­ble­ment avec des secteurs du PS  et de EELV s’op­po­sant au couple Hollande/Valls et aux dogmes du Pacte de stabi­lité, et dessi­nant la possi­bi­lité d’une autre majo­rité, incluant aussi Nouvelle Donne, le NPA, les courants écolo­gistes critiques et les liber­taires qui le souhai­te­raient. Le pôle de résis­tance sociale et poli­tique apparu le 12 avril peut être un point d’ap­pui pour cette pers­pec­tive ; et inver­se­ment, tout pas en avant dans cette voie poli­tique nouvelle et alter­na­tive  serait un encou­ra­ge­ment pour les mobi­li­sa­tions.

4. Les résis­tances et les points d’ap­pui pour une alter­na­tive

Une des diffi­cul­tés de la situa­tion réside dans l’ab­sence de conflits sociaux majeurs s’op­po­sant à la poli­tique du gouver­ne­ment et aux diktats du MEDEF. La mobi­li­sa­tion concer­nant les retraites en 2010 s’est soldée par une défaite. Sarkozy durant son quinquen­nat a métho­dique­ment divisé et affai­bli les secteurs de mobi­li­sa­tion forte. L’adop­tion du traité de Lisbonne foulant aux pieds les résul­tats de la mobi­li­sa­tion citoyenne qui avait accom­pa­gné le non au TCE en 2005 a égale­ment provoqué un désar­roi d’au­tant que cette rati­fi­ca­tion parle­men­taire avait été faci­li­tée par l’ac­cord avec le PS.

Un chan­ge­ment d’état d’es­prit est possible parmi les sala­rié.es comme le montre la mobi­li­sa­tion des chemi­nots et des inter­mit­tents du spec­tacle. Il peut y avoir une prise de conscience qu’il faut reve­nir à la mobi­li­sa­tion collec­tive décom­plexée face à un gouver­ne­ment de gauche qui fait une poli­tique de droite. Des mobi­li­sa­tions et des résis­tances s’ex­priment et qui sont d’au­tant plus impor­tantes qu’elles annoncent sans doute les carac­té­ris­tiques des luttes de demain.  D’au­tant plus que s’y ajoutent des aspi­ra­tions dans la société à produire , à consom­mer et à vivre autre­ment.

Ainsi la victoire de Fralib est à noter non seule­ment sur les capa­ci­tés de résis­tance des travailleurs/travailleuses de cette entre­prise, parce beau­coup de luttes de ce type se sont soldées par des défaites et des ferme­tures de sites,  mais parce qu’elle implique une capa­cité à reprendre en charge la produc­tion, à défendre une écono­mie soli­daire et à ouvrir un autre hori­zon celui de la coopé­ra­tion, de l’éco­lo­gie et le l’au­to­ges­tion.

Les mobi­li­sa­tions contre l’aé­ro­port de NDDL et contre la ferme des Milles Vaches  sont porteuses d’ave­nir. Parce qu’elles croisent les combats écolo­giques, démo­cra­tiques, contes­tant aux grandes firmes le contrôle des choix d’ave­nir. Elles montrent toute l’im­por­tance des mobi­li­sa­tions contre les équi­pe­ments inutiles et dange­reux, le produc­ti­visme et l’im­por­tance de mener ces luttes à l’échelle inter­na­tio­nale. Les campagnes STOP TAFTA contre le grand marché trans­at­lan­tique et l’ini­tia­tive inter­na­tio­nale COP 21 pour le climat sont des enjeux majeurs pour cela.

Les mobi­li­sa­tions de jeunes contre le FN qui viennent de débu­ter sont égale­ment un terrain de poli­ti­sa­tion des nouvelles géné­ra­tions à suivre atten­ti­ve­ment. Faire barrage, contrer le racisme, s’af­fron­ter à ceux qui du même âge votent et adhèrent aux idées du FN, ce sont sans doute des éléments d’en­trée en poli­tique au même titre que se battre contre le chômage, le préca­riat ou la cherté du loge­ment. Toutes luttes dont nous ne connais­sons sans doute  pas les formes actuel­le­ment.

La fonc­tion publique va subir de plein fouet  les 50 milliards d’éco­no­mie. La possi­bi­lité de résis­tances, de mobi­li­sa­tions pour défendre pouvoir d’achat et services publics au vu de la bruta­lité des poli­tiques qui vont être menées doit égale­ment rete­nir toute notre atten­tion.

Une réflexion sur « Crise : texte poli­tique D’En­semble! natio­nal »

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