Coup sur coup plusieurs études démontrent que la disparition des espèces vivantes n’est pas un phénomène lointain, qui ne concernerait que les grands animaux ou des plantes exotiques, mais qu’elle est bien avérée en France et singulièrement en Nouvelle-Aquitaine.
Fin mars, le Muséum national d’Histoire naturelle et le CNRS dans un communiqué intitulé « Le printemps 2018 s’annonce silencieux dans les campagnes françaises » annonçaient les résultats de deux études de suivi des oiseaux, l’une menée à une échelle nationale, l’autre menée localement par le Centre d’Etudes Biologiques de Chizé (situé près de Niort). Elle arrivent au même constat : « les oiseaux des campagnes françaises disparaissent à une vitesse vertigineuse. En moyenne, leurs populations se sont réduites d’un tiers en 15 ans. Au vu de l’accélération des pertes ces deux dernières années, cette tendance est loin de s’infléchir… Cette disparition massive observée à différentes échelles est concomitante à l’intensification des pratiques agricoles ces 25 dernières années, plus particulièrement depuis 2008–2009. Une période qui correspond entre autres à la fin des jachères imposées par la politique agricole commune, à la flambée des cours du blé, à la reprise du sur-amendement au nitrate permettant d’avoir du blé sur-protéiné et à la généralisation des néonicotinoïdes, insecticides neurotoxiques très persistants. Ces deux études, menées toutes deux sur une vingtaine d’années et à des échelles spatiales différentes, révèlent l’ampleur du phénomène : le déclin des oiseaux en milieu agricole s’accélère et atteint un niveau proche de la catastrophe écologique. »
Dans la foulée, il y eu aussi de nombreuses alertes sur la surmortalité des abeilles et le tergiversations sur l’abandon du glyphosate.
Ce 18 juin 2018 , l’observatoire national de la biodiversité a publié son bilan 2018 « Menaces sur le vivant : quand la nature ne peut plus suivre », une synthèse de référence qui confirme ce déclin vertigineux de populations d’oiseaux mais aussi que ce déclin ne concerne pas que les oiseaux sur le territoire français, métropole et Outre-mer confondus ; une espèce sur trois est en danger de disparition. Les causes ? la consommation des pesticides en agriculture, l’artificialisation des sols, mauvais états des milieux naturels et notamment des zones humides, des zones naturelles d’intérêt écologique, floristique et faunistique sont perdus ou menacés. Lire ci après le détail du rapport.
Cliquer pour accéder à Publication-ONB-Menaces-sur-le-vivant-vf.pdf
Enfin, last but not least, le même jours le comité scientifique régional interdisciplinaire sur la biodiversité et les services écosystémiques ECOBIOSE présentait ses premiers travaux sur « le rôle de la biodiversité en territoires de plaine et grandes cultures ». Créé en 2017 à l’initiative de la région Nouvelle-Aquitaine, ce comité regroupe environ 150 scientifiques, spécialistes en sciences de l’écologie et en sciences humaines et sociales. Ce premier rapport qui fait la une synthèse d’environ 250 publications régionales et de la contribution de 39 scientifiques retient que la biodiversité aide à la pollinisation des cultures, au maintien de la qualité des sols et peut être envisagée comme une solution alternative à l’utilisation de l’azote inorganique et à l’usage des produits phytosanitaires en grandes cultures. Il remarque aussi que la préservation de la biodiversité, des éléments semi-naturels du paysages, comme les bosquets et les haies et des fleurs des champs apparaissent comme des solutions pour les activités agricoles tout en maintenant des multiples services sur le territoire. Cf. le document de présentation et la résumé dit exécutif ci-après :
Cliquer pour accéder à ECOBIOSEsynthèseChapitreI180618.pdf
Voir aussi le compte rendu qu’en a fait France 3 : « Abeilles, vers de terre, hirondelles, coquelicots… Autant d’espèces en profond déclin en Nouvelle-Aquitaine. C’est le constat alarmant que dresse ECOBIOSE. Ce comité scientifique régional vient de rendre la première partie de son rapport sur les relations entre biodivesité et agriculture. »
Il en est de ce rapport comme de cet autre comité scientifique régional, sur le changement climatique cette fois, AcclimaTerra « Anticiper les changements climatiques en Nouvelle-Aquitaine pour agir dans les territoires » présenté à La Rochelle le 1er juin dernier. Ils sont réalisés par des chercheurs de différentes disciplines, y compris des sciences sociales, souvent en relation avec les acteurs de terrain, à l’initiative de la collectivité territoriale pour « éclairer » les choix des élus. Or, l’expérience montre que les lobbies et les arrangements habituels de basse politique ont souvent raison de la connaissance scientifique et des préconisations privilégiant le bien commun aux intérêts particuliers.
Vous pouvez télécharger le rapport d’AcclimaTerra réalisé sous la direction de Hervé Le Treut (488 pages, disponible aussi en version imprimée) ou sa synthèse (96 pages).