Pourquoi le NPA ne veut pas pour­suivre l’in­ven­tion ?

(ce texte n’en­gage que son auteur)

Le NPA86 a pour­tant parti­cipé à toutes les rencontres entre ces partis, a contri­bué à l’écri­ture de l’appel et du programme « Inven­tons la Vienne écolo­gique et soli­daire ». Pour­tant, au dernier moment, le NPA a décidé de se reti­rer sur la pointe des pieds et de ne plus parti­ci­per à l’aven­ture.

Une déci­sion dont la logique nous échappe

Deux raisons prin­ci­pales avaient été évoquées par nos cama­rades pour dire leurs réti­cences. D’abord la complexité réelle d’une situa­tion dépar­te­men­tale où seule une partie d’Eu­rope Écolo­gie-Les Verts (EELV) s’est enga­gée dans la démarche Inven­tons.

Il faut savoir qu’EELV86 est compo­sée de deux sections, une au nord autour de Châtel­le­rault et de sa dépu­tée Masson­neau, et une au Sud enga­gée notam­ment dans l’ex­pé­rience « Osons Poitiers ». Pour ces élec­tions dépar­te­men­tales, dans 3 ou 4 cantons sur 19, la section Nord Vienne-Châtel­le­rault d’EELV partira avec le PS. Par contre la section Sud Vienne-Poitiers d’EELV s’est engagé à soute­nir l’al­ter­na­tive unitaire dans tout le dépar­te­ment, dans 19 cantons sur 19. Compliqué, non ?

Certes. Mais l’idée de « Inven­tons » depuis son origine est basée sur le regrou­pe­ment des orga­ni­sa­tions et des indi­vi­dus qui veulent construire une alter­na­tive écolo­gique et poli­tique à gauche. Ce qui se trouve mis en avant c’est le programme, les analyses exigeantes et les propo­si­tions réelles et précises, le choix de valeurs communes. Il ne s’agit pas d’un accord élec­to­ral a minima pour la répar­ti­tion de prébendes ou une alliance de circons­tance de la carpe et du lapin.

Le NPA s’est plaint du manque de visi­bi­lité des déci­sions d’EELV. Mais ne voit-il pas que la coupe est à 15/19ème pleine ? Et que l’ap­pel d’EELV Sud à soute­nir la démarche dans tout le dépar­te­men­tal est un enga­ge­ment fort et coura­geux ? Et que la situa­tion actuelle est le reflet de débats internes à EELV à un instant t ?

L’autre raison invoquée par le NPA pour refu­ser de parti­ci­per à Inven­tons tourne autour du rapport au PS.

Là, nous avons du mal à suivre le raison­ne­ment du NPA. En effet, si EELV parti­cipe à la majo­rité PS du Conseil Régio­nal depuis des années (et n’a pas voté contre le dernier budget) cela n’a pour­tant pas empê­ché le NPA de s’en­ga­ger sur la liste Osons Poitiers qui a regroupé EELV, PG, NPA et Ensemble ! (17 % des voix et 4 élu.es dont une du NPA) lors des dernières Muni­ci­pales à Poitiers.

Pourquoi parti­ci­per à Osons et pas à Inven­tons ?

La diffé­rence avec Osons tient-elle à la présence du PCF86 dans Inven­tons ? Certes, le PCF86 parti­cipe à la majo­rité muni­ci­pale de Poitiers domi­née par le PS et son député maire. Le NPA consi­dère-t-il que le PCF est moins à gauche, moins présent dans les luttes que EELV86 ? Où est la ques­tion de prin­cipe ?

Quelle est la ques­tion ?

La ques­tion posée par Inven­tons recoupe celle d’Osons : faut-il favo­ri­ser le regrou­pe­ment des forces (indi­vi­dus et orga­ni­sa­tions) qui offrent une alter­na­tive anti-austé­rité et écolo­gique à la poli­tique libé­rale de la droite et de la gauche ? Sachant que sinon c’est le FN qui est en posi­tion de capter cette oppo­si­tion.

Cette ques­tion taraude toutes les orga­ni­sa­tions de gauche (hors appa­reil du PS). Si rappe­ler le passé du PCF (ou d’EELV) , c’est résu­mer leur exis­tence à des inva­riants, à des choses qui ne chan­ge­ront jamais (« les hommes sont comme ceci ou comme cela et ça toujours été comme ça »), la pensée poli­tique serait bien pauvre et hors sol. Cela empêche de voir les chan­ge­ments en cours dans ces groupes poli­tiques et conduit à l’im­puis­sance et à la margi­na­li­sa­tion.

Il suffit pour­tant de lire le texte de l’ap­pel Inven­tons pour comprendre les ruptures à l’œuvre, tant chez EELV que chez le PCF. C’est inédit, enthou­sias­mant et porteur d’ave­nir !

Cela n’em­pêche pas par ailleurs que cette conni­vence poli­tique du PCF et d’EELV avec le PS reste un gros problème non résolu, un obstacle à une recom­po­si­tion claire et visible du paysage poli­tique. La gauche du PS est trop souvent assi­mi­lée dans la popu­la­tion au PS, qui a capté le mot « gauche » à son seul profit. Nous sommes assi­mi­lés de fait, peu ou prou – et pour certaines orga­ni­sa­tions dont Ensemble! , à leur corps défen­dant – à la poli­tique du PS.

C’est un problème qui se traduit au niveau syndi­cal dans l’ato­nie des syndi­cats de trans­for­ma­tion sociale quand le PS est au pouvoir. Au niveau poli­tique cette ques­tion se posera encore et à nouveau au fur et à mesure que la poli­tique d’aus­té­rité étran­glera les budgets des collec­ti­vi­tés terri­to­riales. Que feront les élu.es EELV et PCF qui sont dans des majo­ri­tés diri­gées par le PS ? Ce débat crucial a déjà lieu aussi chez EELV et au PCF.

Comment expliquer ce refus du NPA de rejoindre Inven­tons ?

Le NPA ne s’est pas exprimé à ce jour sur son refus de signer. On ne peut pour l’ins­tant que se risquer à propo­ser une série d’hy­po­thèses.

A pu joué dans ce refus la non maîtrise poli­tique au niveau dépar­te­men­tal alors que le NPA est surtout implanté sur Poitiers. La tradi­tion anti-stali­nienne a pu jouer : une bonne connais­sance de l’his­toire du PCF pous­se­rait au moins à la prudence. L’ab­sence de luttes sociales progres­sistes d’am­pleur ne permet pas non plus de décan­ter les posi­tions des uns et des autres.

Tout se passe aussi comme si les mili­tant.e.s du NPA étaient tenté.es de rela­ti­vi­ser les tendances dans EELV à la colla­bo­ra­tion passée et actuelle avec le libé­ra­lisme et le PS , tout en rédui­sant le PCF a un appa­reil bureau­cra­tique et mono­li­thique imper­méable aux évolu­tions de la société. Et là, c’est selon nous, une erreur d’ana­lyse qui empêche de voir les bonds en avant à l’œuvre dans ces deux orga­ni­sa­tions de la Vienne.

Il nous semble aussi que le NPA86, à l’ap­proche de son congrès, peut être tenté par ce patrio­tisme d’or­ga­ni­sa­tion qui préfère culti­ver les réflexes iden­ti­taires plutôt que de se lancer à l’as­saut du possible, réflexe qui n’est pas l’apa­nage du seul NPA et qui reste le ferment de tous les  secta­rismes.

Enfin il reste un débat non résolu au sein de la tradi­tion marxiste révo­lu­tion­naire dont se reven­dique le NPA et qui est aussi la mienne. Quelle est l’au­to­no­mie du poli­tique par rapport au social ? Quel rapport entre État et classes sociales ? Plus prosaïque­ment comment peut-on prôner, comme le fait égale­ment Ensemble !, un « front social et poli­tique » et refu­ser le front poli­tique dans une période d’ab­sence de luttes signi­fi­ca­tives ?

Nous sommes nombreux et nombreuses à souhai­ter que le NPA revienne sur sa déci­sion et parti­cipe à la campagne, de la façon qui lui semblera la plus adéquate avec ses convic­tions.

Pascal C

4 réflexions sur « Pourquoi le NPA ne veut pas pour­suivre l’in­ven­tion ? »

  1. Le NPA86 est présent à la Municipalité de Poitiers, avec deux militante et militant d’EE-LV et un militant du PG (qui représente le PG et Ensemble!).

    Il est très étonnant que le NPA86 ait abandonné les discussions qui ont abouti à constituer  le programme de « Inventons ». Il est difficile de penser que le PCF soit moins présent dans les luttes (sauf Notre dame des Landes) que EE-LV. Difficile de dire que l’alliance « Osons » augmentée du PCF en est devenue trop à droite. Que disent donc nos amis du NPA86?

    Toute initiative qui permet un front des antilibéraux et des anticapitalistes est bonne à prendre. Nos camarades du NPA86 en étaient d’accord jusqu’à présent, il me semblait.

    Il est vrai que le NPA, nationalement, ne veut pas se mêler à d’autres que LO et Alternative libertaire, LO qui manifeste un mépris constant à leur égard. Mais les expérimentations locales sont une spécificité gardée par le NPA, et à Quimper, par exemple, Front de gauche et NPA font liste commune. Alors?

     

    1. Salut Alex,

      La réponse du NPA86 est donc publiée. Quelques remarques sur votre argumentation.

      Les analyses que vous faites de EE-LV, celle du PCF, et localement et nationalement sont assez justes selon moi. Et aussi celle de la nécessité pour la gauche radicale d’être dans une opposition de gauche résolue à ce gouvernement néolibéral PS.

      Vous ne dites cependant pas en quoi l’accord départemental de « Inventons » est un mauvais accord départemental, non indépendant du PS, en opposition à ces principes.

      Si l’évolution d’EE-LV est surdéterminée par l’évolution du groupe EE-LV de la députée EE-LV Véronique Massonneau au nord du département, et par les interventions de JM Placé, envisagez-vous de ne plus être dans le groupe municipal de Poitiers  « Osons » dirigé par une militante d’EE-LV? Je ne le crois pas et vous avez raison. Mais votre argumentation est alors un peu faible.

      L’argument du nombre de postes à réserver au NPA apparait alors comme central. Or, il n’ y a pas eu d’annonces de candidatures, pas de répartition comme vous le souhaitiez de postes avant la conférence de presse de présentation de l’accord départemental unitaire. Vous y teniez, vous aviez su être en position éligible sur la liste Osons, ce qu’Ensemble n’a pas alors  su obtenir. Nous, Ensemble86,  tenions tout d’abord, hier comme aujourd’hui, à un accord qui engage l’ arc des forces à la gauche du PS, c’est une divergence. Peut-être pas une divergence fondamentale…

      Vous, NPA86, aviez votre place dans cet accord départemental et la presse locale ne s’y est pas trompée en vous incluant par erreur dans cette alliance électorale.

      La situation est inquiétante avec la montée du racisme, de la xénophobie, des replis identitaires. Oui, sans les luttes et l’auto-organisation de ces luttes, la situation ne peut pas s’améliorer. Mais nous considérons que dans le champ politique nous avons des responsabilités propres, dont celles de constituer des alliances politiques, de porter un discours antilibéral clair et franc. Ce n’est pas la révolution par les urnes que nous préparons comme Jl Mélenchon le proposa, mais la formation d’un bloc de résistance à visée hégémonique.

      Et les élections sont un des moments de cette construction, montrer que nous pouvons nous entendre sur l’essentiel à un moment donné électoral est important.

      Aujourd’hui, l’Espagne apparait comme un pays où avec Podemos la gauche radicale est au premier plan. C’est arrivé en quelques mois. Syriza est aux portes du pouvoir en Grèce, c’est le fruit d’un travail politique plus proche de celui du Front de gauche, en plus réussi. Dans les deux cas, les échéances électorales ne sont pas minorées.

       

       

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