par Marion Rousset Publié le 24 juillet 2023
Extraits de l’interview de Sebastian Roché
Que vous inspirent les prises de position récentes de la hiérarchie policière ?
C’est un choc sans précédent. On connaissait déjà l’expression de la « grogne policière », employée en 1983 après le décès de deux policiers tués dans une fusillade. Des collègues avaient marché sur la place Vendôme et même sur l’Élysée au cri de « Badinter, démission ! ». Mais que l’administration policière revendique le rôle de quatrième pouvoir, à côté des pouvoirs judiciaire, législatif et exécutif, on ne connaissait pas… Aujourd’hui, ce sont deux chefs – des fonctionnaires – qui disent que l’organisation de l’État ne leur convient pas, de même que l’égalité devant la loi, codifiée par l’article 6 de la Déclaration des droits de l’homme, qui est l’un des principes cardinaux de toutes les démocraties occidentales.
Tout d’un coup, l’administration laisse entendre que les juges ne devraient pas avoir les pouvoirs qu’ils ont actuellement et déclare que les policiers devraient bénéficier d’un traitement différent des autres citoyens. Une manière de déroger à son devoir de neutralité et de réserve. Et elle le fait sans le paravent de l’exécutif.
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Que dit le silence de Gérald Darmanin et d’Emmanuel Macron du rapport de force entre le gouvernement et la police ?
L’autorité de l’État commence par l’autorité sur ses propres fonctionnaires. Or aujourd’hui, je pense que le gouvernement a peur. On le voit, l’équilibre du rapport de force est très précaire. Les syndicats de police ont le pouvoir qu’on leur donne et celui-ci dépend de la solidité du gouvernement. Darmanin est absent. Et ça, c’est stupéfiant de la part d’un ministre qui a un tel sens de la communication. On n’entend pas non plus le ministre de la Justice. Ce silence assourdissant traduit la très grande faiblesse de l’exécutif, qui est liée à sa faiblesse au Parlement. (…)