L’al­liance du gouver­ne­ment avec la droite, c’est main­te­nant !

Un article de Regards, de Guillaume Liégard daté du 15 avril.

Ces derniers jours, la feuille de route de l’équipe de Hollande-Valls-Macron est publiée: l’objec­tif est de prépa­rer un gouver­ne­ment d’union natio­nale avec la droite dès 2017. Cela passe par la destruc­tion de la gauche sociale et poli­tique. Nous sommes préve­nus. C’était le sens de l’émis­sion télé­vi­sée animée par Hollande le 14 avril.PB.

 

http://www.regards.fr/web/article/l-alliance-avec-la-droite-c-est

« De Valls à Macron en passant par Le Guen et Camba­dé­lis, le PS et le gouver­ne­ment préparent le terrain au grand rappro­che­ment à venir. Appels du pied, lance­ments de bidules attrape-tout : pour survivre, cette gauche compte sur la droite.

C’est Jean-Marie Le Guen, en éclai­reur des basses besognes, qui a balisé le terrain : « Ça ne me choque­rait pas que demain, après 2017, il y ait des person­na­li­tés d’ho­ri­zons diffé­rents qui travaillent ensemble ». Le secré­taire d’État chargé des Rela­tions avec le Parle­ment ajoute : « Est-ce qu’on peut penser véri­ta­ble­ment qu’on va gouver­ner la France demain avec 25% ou 30% avec les réformes et les diffi­cul­tés liées au terro­risme ? »

Et pour que cela soit tout à fait clair, il précise encore son propos au sujet des futures légis­la­tives : « Si demain, c’est le candi­dat de gauche qui est en tête au premier tour, enfin qui est quali­fié, il faudra qu’il aille cher­cher les élec­teurs de droite. Si c’est le candi­dat de droite, il faudra qu’il aille cher­cher les élec­teurs de gauche. Pas en les mépri­sant, pas en ne passant pas des compro­mis avec leurs aspi­ra­tions ».

 

« Dépas­se­ment des clivages », forma­tion « non parti­sane » et « belle alliance »

Signe que les fameux éléments de langage sont bien en place, Manuel Valls ne déclare pas autre chose dans une récente inter­view à Libé­ra­tion. En vrac on y apprend que la prochaine élec­tion prési­den­tielle « ne pourra pas être une répé­ti­tion des précé­dentes avec l’af­fron­te­ment clas­sique entre la droite et la gauche. Je ne vois pas non plus les gagnants gouver­ner seuls, et les perdants reprendre leur cycle de congrès ou d’as­sises », et qu’é­vi­dem­ment il « conti­nue à penser que le dépas­se­ment des clivages parti­sans s’im­pose » et que tout natu­rel­le­ment droite et gauche peuvent « parfai­te­ment nouer des pactes ».

De son côté, la nouvelle forma­tion En marche, lancée par le ministre de l’Éco­no­mie, ne sera « ni à gauche, ni à droite » et se reven­dique d’une « démarche non parti­sane ». Adou­bée par le chef de l’État, cette initia­tive a été encen­sée par Jean-Pierre Raffa­rin et quali­fiée de « rafraî­chis­sante » par Pierre Gattaz (lire « Macron, l’as­pi­ra­tion par le vide »). Bref, rien que de très normal.

Pour que le tableau soit complet, il manquait la touche d’in­ven­ti­vité du premier secré­taire du Parti socia­liste. C’est chose faite avec la Belle alliance popu­laire. Cette fédé­ra­tion qui, selon Jean-Chris­tophe Camba­dé­lis, vise à « la substi­tu­tion au PS d’une forma­tion poli­tique rassem­blant tous ceux qui auront parti­cipé » à la prochaine élec­tion de 2017. On ne peut pas dire que le casting – ni beau, ni popu­laire à dire vrai – fasse bien envie : Jean-Luc Benha­mias (ex EELV, ex Modem…), l’iné­vi­table Jean-Vincent Placé, la recrue de choix qu’est l’an­cienne ministre de Sarkozy, Fadela Amara… Ajou­tons un soupçon de Parti radi­cal de gauche et la boucle et bouclée.

Unir la gauche pour gouver­ner avec la droite

Pour­tant, les mêmes enjoignent toute la gauche, sous peine de cata­clysme ou d’apo­ca­lypse, à se rassem­bler dès le premier tour derrière François Hollande. Unir toute la gauche pour gouver­ner ensuite avec la droite relève assu­ré­ment d’une concep­tion subtile de la dialec­tique. Mais le pari des fossoyeurs de l’Ély­sée et Mati­gnon peut se résu­mer ainsi :

1. D’abord essayer d’as­su­rer une présence au second tour de François Hollande face à Marine Le Pen, syno­nyme de réélec­tion même si le score risque d’être étriqué. C’est à dire vrai, le plus compliqué.
2. La réélec­tion du président sortant devrait logique­ment susci­ter une défla­gra­tion au sein de la droite parle­men­taire face à ce qui aurait dû être une élec­tion imper­dable. Une parti­tion devrait alors s’opé­rer entre le secteur le plus réac­tion­naire qui se tour­nera vers le Front natio­nal et le secteur plus modéré qui s’y refu­sera.
3. François Hollande sait parfai­te­ment que son éven­tuelle réélec­tion le serait par défaut et qu’il ne béné­fi­cie­rait d’au­cune dyna­mique au moment des légis­la­tives. En bref, il sait qu’il n’aura pas avec ses seuls soutiens de majo­rité parle­men­taire et qu’il lui faudra s’ap­puyer sur une partie de la droite modé­rée.

Hollande et sa clique ne sont pas seule­ment respon­sables d’un quinquen­nat cala­mi­teux et désho­no­rant. Ils ambi­tionnent désor­mais de parache­ver leur œuvre par un gouver­ne­ment gauche/droite qui est la norme au sein de l’Union euro­péenne. Il ne s’agit pas là d’un quel­conque procès d’in­ten­tion, mais le constat d’une orien­ta­tion plei­ne­ment assu­mée et expri­mée comme telle.

Face à un tel projet, chacun à gauche est désor­mais devant ses respon­sa­bi­li­tés et doit en tirer toutes les consé­quences. Le temps n’est plus aux arabesques et aux circon­vo­lu­tions, mais à l’af­fron­te­ment. »

Guillaume Liégard, Regards, 15 avril 2016

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