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élections / en débat

Manon Aubry écrit à Raphaël Glucks­mann

pascal bpar pascal b9 avril 2024

Cher Raphaël,

Dans une récente inter­view, tu as annoncé vouloir faire une union débar­ras­sée de la ligne incar­née par Jean-Luc Mélen­chon. “Il faudra une union poli­tique après ces élec­tions mais ce ne sera pas sur la ligne de Jean-Luc Mélen­chon”.
Bien que je sois, tu t’en doutes, en profond désac­cord, ta décla­ra­tion a le mérite de lever deux hypo­cri­sies.
La première est de dire que cette élec­tion euro­péenne ne va pas impac­ter la struc­tu­ra­tion de la poli­tique française. Certains pous­saient des cris d’or­fraie quand nous parlions de l’im­por­tance capi­tale de cette élec­tion dans le paysage poli­tique natio­nal. Tu en fais désor­mais un argu­ment de campagne en deman­dant la faveur des scru­tins pour fonder une nouvelle union à gauche. Merci de nous donner raison sur ce point.

La seconde est que l’op­po­si­tion à Mélen­chon ne repose pas sur son style ou ses “excès verbaux”, mais bien sur sa ligne poli­tique. Cela a le mérite de la clarté. On comprend mieux pourquoi tu n’as pas soutenu le programme de la NUPES il y a deux ans, qui a pour­tant remporté le 1er tour des élec­tions légis­la­tives en 2022.

L’après-Macron plutôt que l’après-Mélen­chon

Quand nous sommes occu­pés à construire l’après-Macron, tu prépares donc l’après-Mélen­chon. C’est, je pense, une erreur poli­tique à de nombreux titres.

Penser tout d’abord que le pouvoir pourra se conqué­rir sans le bloc popu­laire qu’a réuni Jean-Luc Mélen­chon et la France Insou­mise, seul parti de gauche à avoir dépassé les 20% ces 12 dernières années, c’est non seule­ment se priver d’une force popu­laire mais c’est néces­sai­re­ment chan­ger le bary­centre poli­tique.

Qu’est ce qui te pose problème dans “la ligne Mélen­chon” et donc son corol­laire le programme de l’ave­nir en commun ? Est-ce l’en­ga­ge­ment à rompre avec un modèle écono­mique géné­ra­teur d’iné­ga­li­tés et de désastres écolo­giques ? La plani­fi­ca­tion écolo­gique ? Le protec­tion­nisme soli­daire ? La retraite à 60 ans ? La taxa­tion des plus riches et des multi­na­tio­nales ? 

Renon­cer à son ambi­tion et à cette “ligne” c’est renon­cer à une ambi­tion écolo­gique et sociale, dans l’es­poir de char­mer un élec­to­rat hypo­thé­tique, désillu­sionné par Macron, qui se conten­te­rait de panse­ments sur une jambe de bois.

C’est sans doute ce qui carac­té­rise le mieux la social-démo­cra­tie dont on a déjà bien vu avec François Hollande les limites et les échecs. L’union sans Mélen­chon a déjà été testée entre 2012 et 2017. On a vu le résul­tat : la loi El Khomri, la déchéance de natio­na­lité, le traité budgé­taire euro­péen et Manuel Valls à Mati­gnon ! Merci, mais non merci.

La social-démo­cra­tie, ancrée dans une philo­so­phie désor­mais obso­lète, se limite à redis­tri­buer les béné­fices d’une crois­sance écono­mique, endos­sant ainsi taci­te­ment les prin­cipes du capi­ta­lisme.

C’est, à mon sens, une double impasse.

Poli­tique­ment, cette approche ne remet pas en cause le rapport de forces favo­ri­sant ceux qui ont déjà amassé des richesses consi­dé­rables – pas éton­nant que tu ne vois d’ailleurs “ aucun problème si les riches paient leurs impôts”. Struc­tu­rel­le­ment, elle se base sur une crois­sance illi­mi­tée dans un monde aux ressources finies, déjà plongé dans une crise écolo­gique insou­te­nable.

Figée dans ses origines, la social-démo­cra­tie a visé des gains mineurs dans le cadre du système écono­mique actuel, sans explo­rer de véri­tables alter­na­tives. Sa soumis­sion aux lois du marché l’a même pous­sée à éroder les protec­tions sociales qu’elle avait jadis mises en place.

Par consé­quent, ses bases l’ont aban­don­née, cher­chant des ruptures poli­tiques capables de mettre fin à la dégra­da­tion de leurs condi­tions de vie, tant écolo­giques que sociales.

C’est sur cette gauche lais­sée en jachère par les trahi­sons de François Hollande que nous avons cher­ché à recons­truire. C’est ce projet aussi qui m’a convain­cue d’aban­don­ner le monde asso­cia­tif pour m’en­ga­ger en poli­tique il y a 5 ans quand la France insou­mise est venue me cher­cher. Il fallait retrou­ver un récit et un hori­zon éman­ci­pa­teurs. Et rassem­bleurs. C’est le double défi que nous avons réussi, je crois, en 2022 avec le score de Jean-Luc Mélen­chon de 22%.

Le programme de la NUPES comme bous­sole 

Nous aurions pu à ce moment acter une victoire, comme une forme de revanche sur ceux qui ont fait perdre à la gauche sa bous­sole ces dernières années. Mais nous avons fait le choix d’ou­vrir les portes et les fenêtres, de rassem­bler encore plus large­ment, pour créer la NUPES.

Derrière la NUPES une stra­té­gie poli­tique et un programme communs. Sur lesquels le Parti Socia­liste dont tu as pris la tête de liste pour les euro­péennes, a pour­tant fait campagne et lui a permis d’ob­te­nir un groupe poli­tique à l’As­sem­blée natio­nale. Comment expliquer main­te­nant que le parti socia­liste aurait renoncé à ce programme ? Sa stra­té­gie ? C’était juste un bout de papier sur lequel faire campagne pour sauver quelques sièges de dépu­tés ?

A toutes fins utiles, je rappelle que ce programme compor­tait un chapitre entier sur les ques­tions euro­péennes. Qui, je pense, pouvait marquer un moment fonda­teur au sein de la gauche, 17 ans après la déchi­rure du Traité Cons­ti­tu­tion­nel euro­péen en recon­nais­sant enfin la primauté du vote des Français contre les règles libé­rales de l’Union euro­péenne. Pour la 1ère fois, la gauche dans son ensemble était capable d’as­su­mer les néces­saires rapports de force pour dépas­ser les blocages posés par les règles euro­péennes. 

Le marché de l’élec­tri­cité euro­péen impose une déré­gu­la­tion de nos tarifs régle­men­tés de l’élec­tri­cité. Les règles de la concur­rence imposent la vente à la découpe de fret SNCF. Les règles budgé­taires imposent des coupes budgé­taires dans nos services publics et la protec­tion sociale comme les annonces de Bruno Le Maire le confirment. 

Nous disons que nous n’ap­plique­rons pas ces règles.

Je sais que tu n’as jamais soutenu la NUPES mais je veux ici inter­ro­ger les millions d’élec­teurs et élec­trices de gauche qui ont cru et croient encore à son programme : veulent-ils un retour en arrière ?

Tu évoque­ras certai­ne­ment les ques­tions inter­na­tio­nales comme pomme de discorde. Sur l’Ukraine, je connais nos diver­gences. Tu fais le choix de l’es­ca­lade mili­taire vers la guerre, je fais celui de l’ac­tion diplo­ma­tique pour la paix. Sur le plan de la guerre, tu sais que j’ai voté au Parle­ment euro­péen tous les textes de soutien à l’Ukraine. J’ai d’ailleurs proposé égale­ment l’an­nu­la­tion de la dette ukrai­nienne plutôt que de les livrer aux griffes des marchés finan­ciers. Nous étions bien seuls à mener ce combat. Mais nous refu­sons une esca­lade mili­taire qui pour­rait se solder par une guerre géné­ra­li­sée entre deux puis­sances nucléaires. Le grand socia­liste Jaurès ne disait-il pas “on ne fait pas la guerre pour se débar­ras­ser de la guerre”. La guerre est une impasse, la seule issue est diplo­ma­tique.

Sur l’adhé­sion à l’Union euro­péenne, je reste­rai fidèle au projet de la NUPES et conti­nue­rai de défendre l’har­mo­ni­sa­tion sociale, fiscale et envi­ron­ne­men­tale comme condi­tion préa­lable à tout élar­gis­se­ment. Je ne revien­drai pas sur l’échange fécond que tu as eu avec François Ruffin, lequel a minu­tieu­se­ment abordé cette diver­gence, notam­ment dans un contexte où le salaire mini­mum en Ukraine ne dépasse pas les 200 euros par mois.  Après le précé­dent élar­gis­se­ment, la moitié des délo­ca­li­sa­tions a eu lieu au sein même de l’Union euro­péenne et a accen­tué encore un peu plus une frac­ture entre les ouvriers et la construc­tion euro­péenne.

Ne repro­dui­sons pas les mêmes erreurs.

La rupture, en France comme en Europe

L’unité pour l’unité n’a aucun sens. L’unité de la gauche ne saurait être réduite à une simple conver­gence de circons­tances ou à un idéal abstrait.

Une vérité s’im­pose : la rupture a été le déno­mi­na­teur commun entre des forces aux histoires, méthodes et projets poli­tiques diffé­rents. Sans rupture, pas d’union.  En incar­nant cette ligne poli­tique, Jean-Luc Mélen­chon, a forgé cette union non par compro­mis, mais par la convic­tion ferme qu’un chan­ge­ment radi­cal était impé­ra­tif. Il a prouvé qu’une alter­na­tive était possible, et ce, contre toute attente.

Cette rupture n’est pas un mot théo­rique envoyé en l’air mais bien une réalité concrète et program­ma­tique. Elle se mani­feste à travers des choix poli­tiques clairs, se distin­guant de la voie emprun­tée par ceux qui préfèrent la coges­tion confor­table avec des forces oppo­sées à nos valeurs.

C’est là peut-être là en réalité que se trouve notre point fonda­men­tal de diver­gence. Je t’ai entendu dire “faites de notre groupe le 1er groupe au Parle­ment euro­péen”. Outre que vous êtes donnés dans les sondages à une quaran­taine de sièges du PPE, le groupe de droite et que le score français ne peut rien y chan­ger, tu omets de préci­ser qu’en toute hypo­thèse le groupe socia­liste ne sera jamais en mesure de gouver­ner seul les insti­tu­tions euro­péennes. Une alliance sera donc recon­duite entre les socia­listes euro­péens, le groupe des macro­nistes (Renew) et la droite comme vous avez gouverné ensemble avec la prési­dente de la commis­sion euro­péenne actuelle Ursula Von Der Leyen. Une distri­bu­tion des postes à pres­tige aura lieu dans un accord de couloir dont les insti­tu­tions euro­péennes ont coutume. C’est le schéma qui se répète inlas­sa­ble­ment : voilà plus de 40 ans que les socio-démo­crates euro­péens gouvernent avec la droite euro­péenne.

Pour quelles poli­tiques ? Aux côtés de la droite, les socia­listes euro­péens votent tous les accords de libre-échange, la réforme du marché de l’éner­gie qui va faire explo­ser nos factures d’éner­gie, ou encore la réforme du pacte asile-immi­gra­tion, forme de copie bis de la loi Darma­nin qui prévoit notam­ment le finan­ce­ment de murs aux fron­tières de l’Union euro­péenne.

Les socia­listes euro­péens sont égale­ment respon­sables des nouvelles règles budgé­taires qui prévoient la pire cure d’aus­té­rité que notre conti­nent n’ait jamais connu. Cela fait des mois que j’alerte. Nous avions déjà pris posi­tion sur ce sujet avec Jean-Luc Mélen­chon en 2022, en mettant en garde contre un risque de hausse de la TVA. Nous y voilà : Bruno Le Maire et Emma­nuel Macron déroulent leur plan de rigueur impla­cable et nous ont donné le menu de leur saignée sociale : suppres­sion de postes dans les écoles, augmen­ta­tion du reste à charge pour les médi­ca­ments et les consul­ta­tions médi­cales, rabo­tage de la réno­va­tion ther­mique des loge­ments, nouvelle réforme de l’as­su­rance chômage et donc, pour couron­ner le tout, une possible hausse de la TVA.

Bref, faire la poche des pauvres et des chômeurs plutôt que des profi­teurs.

Tu vas me dire que tu ne partages pas forcé­ment ces posi­tions. Mais on ne parle pas de quelques posi­tions isolées. Lorsqu’elles sont majo­ri­taires à plus de 90% dans ton groupe, comment penser sérieu­se­ment que cela va chan­ger ? Tu le sais comme moi, tous ces textes n’au­raient pas été adop­tés si la majo­rité du groupe socia­liste euro­péen ne les avait pas votés et soute­nus. 

Tirer les leçons des échecs passés

L’union que tu prônes en France est, en réalité, proche de celle que tu fais au sein du parle­ment euro­péen: elle nie les leçons cruciales des deux dernières décen­nies. Faire abstrac­tion des messages envoyés par le peuple, comme le rejet cinglant du traité consti­tu­tion­nel euro­péen de 2005, l’émer­gence déter­mi­nante du mouve­ment des Gilets jaunes, et les mani­fes­ta­tions massives contre les réformes des retraites de Macron, c’est choi­sir sciem­ment l’aveu­gle­ment. Sans doute ils te paraissent étran­gers car tu y as peu parti­cipé. Mais ces événe­ments ne sont pas anec­do­tiques à mon sens ; ils sont le reflet d’un désir profond de chan­ge­ment.

Prétendre repar­tir sur les bases d’une social-démo­cra­tie éculée, même repeinte aux couleurs de l’éco­lo­gie, c’est igno­rer les appels à une trans­for­ma­tion radi­cale que les élec­tions de 2022 ont rendus évidents.

La gauche doit être une force de rupture, pas d’ac­com­pa­gne­ment. La véri­table unité repose sur cette fonda­tion. Tout autre chemin est une impasse, une illu­sion dange­reuse qui ne fera que perpé­tuer les cycles d’échecs et de désillu­sions. Dès lors, tous ceux qui pensent que l’union se fera après les élec­tions euro­péennes contre sa force motrice nous condamnent à repro­duire les erreurs de l’ère Hollande.

Cette lettre est peut-être un peu longue, mais la forme me paraît plus propice à l’échange intel­lec­tuel que quelques invec­tives sur twit­ter. Elle vise à nour­rir la réflexion des élec­teurs de gauche, sans doute un peu circons­pects (voire démo­bi­li­sés) face à la désunion de la gauche.

Je veux leur dire que je conti­nue­rai de toutes mes forces à me battre pour réunir le plus large­ment possible sur la base du programme de la NUPES. C’est dans cet objec­tif que j’avais proposé la tête de liste aux écolo­gistes – je ne pense pas que beau­coup de respon­sables poli­tiques aient déjà accepté de se reti­rer de la tête d’af­fiche ?

Pendant que certains veulent faire campagne contre la 1ère force de gauche, nous conti­nue­rons d’ac­cueillir tous les orphe­lins de la NUPES comme les écolo­gistes Damien Carême (euro­dé­puté EELV), Camille Hachez (ancienne respon­sable des Jeunes écolos) ou Arash Saiedi (ex-coor­di­na­teur de Géné­ra­tion.s, le parti de Benoït Hamon).

Car s’il y a un après à construire, c’est l’après-Macron, pas l’après Mélen­chon. Et on ne peut pas le lais­ser dans les mains de Jordan Bardella et Marine Le Pen ni dans les mains de ceux qui ont créé Emma­nuel Macron et permis son ascen­sion. Voilà ce qui devrait nous occu­per.

Manon Aubry

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