5 décembre 2025

Nouvel 0bs. Appel. « Toute parole de haine raciste porte en elle la promesse d’un crime »

« Toute parole de haine raciste porte en elle la promesse d’un crime »

« Toute parole de haine raciste porte en elle la promesse d’un crime »

appel d’une centaine de person­na­li­tés contre la dégra­da­tion du débat public

Après un nouvel atten­tat raciste, qui a coûté la vie à Hichem Miraoui à Puget-sur-Argens, à l’ini­tia­tive de SOS Racisme, 98 respon­sables asso­cia­tifs, syndi­ca­listes, univer­si­taires et artistes exhortent les respon­sables poli­tiques à cesser de courir après l’ex­trême droite et l’Etat français à lutter réel­le­ment contre le racisme et l’an­ti­sé­mi­tisme

Les logor­rhées xéno­phobes ? Banales. Quoti­diennes. Dans les médias, sur les réseaux sociaux, dans l’Hé­mi­cycle.
Des paroles de haine décri­vant les étran­gers comme respon­sables de l’in­sé­cu­rité ? Banales. Quoti­diennes.
Des envo­lées contre les musul­mans consi­dé­rés comme des extré­mistes affir­més ou en deve­nir ? Banales. Quoti­diennes.
Des affir­ma­tions présen­tant les étran­gers comme les profi­teurs de notre système de protec­tion sociale ? Banales. Quoti­diennes.
Des séquences expliquant que les Français d’ori­gine magh­ré­bine ou subsa­ha­rienne repré­sentent un danger civi­li­sa­tion­nel ? Banales. Quoti­diennes.

Et, dans le sillage de ce flot de paroles haineuses, des crimes de sang. Sans surprise. Car toute parole de haine raciste – qu’elle exclue sa cible du genre humain ou qu’elle la trans­forme en bouc émis­saire – porte en elle la promesse d’un crime.
Il faut réso­lu­ment prendre la mesure des moments que nous vivons. Après une spec­ta­cu­laire libé­ra­tion des paroles de stig­ma­ti­sa­tion à l’en­droit des étran­gers, des enfants d’im­mi­grés et des musul­mans, la France vit ces derniers mois le retour des crimes racistes.

Il y a quelques jours, un atten­tat raciste a coûté la vie à Hichem Miraoui à Puget-sur-Argens tandis que deux Kurdes ont échappé de peu au même destin.
En avril dernier, Abou­ba­kar Cissé a été mortel­le­ment frappé dans la mosquée de La Grand-Combe dans le cadre d’un assas­si­nat isla­mo­phobe.
Le 31 août de l’an­née dernière, Djamel Bendja­bal­lah a été tué près de Dunkerque par un indi­vidu qui le pour­sui­vait depuis plusieurs mois de sa haine des Arabes et des musul­mans.

Ces vies ôtées ne sont pas le fruit de coups de tonnerre dans un ciel bleu. Elles sont le fruit de la boue de haine raciste qui se déverse de façon de plus en plus ouverte dans le débat public. Phéno­mène dont la France n’a d’ailleurs pas le mono­pole, cette libé­ra­tion de la parole raciste est elle-même le résul­tat d’une offen­sive poli­tique et cultu­relle d’une extrême droite dont le vais­seau amiral reste le Rassem­ble­ment natio­nal (RN). Le meur­trier d’Hi­chem Miraoui a d’ailleurs été clair dans la reven­di­ca­tion de son crime raciste : il a souhaité voir le RN accé­der au pouvoir pour mettre en œuvre sa poli­tique d’ob­ses­sion iden­ti­taire.
Il n’est plus possible de détour­ner le regard. Avec ou sans cravate, l’ex­trême droite n’est jamais respec­table. Les paroles de haine, de racisme, d’an­ti­sé­mi­tisme qui en émanent doivent être combat­tues pied à pied.

Face à cette situa­tion into­lé­rable, nous, respon­sables asso­cia­tifs, syndi­ca­listes, univer­si­taires, artistes, citoyens, lançons un message de fermeté à l’en­droit des respon­sables poli­tiques qui se réclament – avec quelque vrai­sem­blance – de l’adhé­sion aux prin­cipes de la Répu­blique : il est temps d’as­su­mer vos respon­sa­bi­li­tés et de cesser de parti­ci­per à la dégra­da­tion du débat public à laquelle bien trop d’entre vous parti­ci­pez en courant derrière une extrême droite que vous devriez combattre.

Il est temps de cesser de jeter dans l’arène parle­men­taire ces projets et propo­si­tions de lois à répé­ti­tion qui abaissent les droits et main­tiennent un débat d’ex­ci­ta­tion malsaine et haineuse à l’en­droit des étran­gers, des enfants d’im­mi­grés et des musul­mans. D’au­tant que la complai­sance face au racisme et à l’ex­trême droite est davan­tage qu’une complai­sance : elle est une compli­cité qui contri­bue à bana­li­ser ces fléaux et à ainsi nour­rir un climat de discri­mi­na­tions et de violences.

Nous exhor­tons l’Etat à user de toute son auto­rité pour réaf­fir­mer les prin­cipes répu­bli­cains partout, pour toutes et pour tous, quelles que soient les reli­gions, couleurs de peau, natio­na­li­tés ou origines.

Nous deman­dons à cet égard que la lutte contre le racisme et contre l’an­ti­sé­mi­tisme – et ceci de manière indi­vi­sible – soit réel­le­ment portée, avec les réformes légis­la­tives néces­saires, des poli­tiques publiques adap­tées et des moyens à la hauteur des ambi­tions de cette lutte.

Nous deman­dons aux jour­na­listes et aux médias de mesu­rer leur respon­sa­bi­lité dans l’évo­lu­tion du trai­te­ment de ces ques­tions depuis les lende­mains de l’ac­cès de Jean-Marie Le Pen au second tour de l’élec­tion prési­den­tielle, le 21 avril 2002. Car, au-delà des médias dédiés à la haine raciste, bien des espaces média­tiques ont contri­bué à bana­li­ser le RN tout en rédui­sant à néant l’ex­pres­sion de paroles anti­ra­cistes.

Enfin, nous appe­lons les citoyennes et les citoyens qui se recon­naissent dans notre appel à se mobi­li­ser massi­ve­ment. Face au feu roulant du racisme, nous avons la respon­sa­bi­lité d’op­po­ser une force anti­ra­ciste supé­rieure en nous tenant fort loin des concur­rences victi­maires qui risquent de toutes et tous nous empor­ter. Alors, malgré la peur, la sidé­ra­tion ou la rési­gna­tion qui pour­raient nous gagner, il est temps de ne plus rien lais­ser passer. Dans nos quar­tiers, dans nos villes ou dans notre pays. Dans la rue ou sur les réseaux sociaux. Face à des respon­sables poli­tiques ou en présence de nos amis.

Assez des meurtres qui frappent les musul­mans et les Arabes.
Assez des expé­di­tions racistes – écho aux « raton­nades » d’hier – qui se multi­plient.
Assez des mani­fes­tants qui défilent dans nos villes avec des symboles nazis.
Assez des rabbins que l’on frappe.
Assez des paroles de haine qui enva­hissent l’es­pace public.

C’est en étant animés par les prin­cipes d’éga­lité et de frater­nité, en nous mettant en mouve­ment et en retrou­vant le goût des mobi­li­sa­tions collec­tives que nous stop­pe­rons le souffle de la haine. Et ceci au profit du souffle d’hu­ma­nisme qui doit rede­ve­nir la bous­sole de la Répu­blique française et de notre société.

Pour signer cet appel collec­tif contre le racisme et l’an­ti­sé­mi­tisme, c’est ici

Premiers signa­taires :
Marijosé Alie, 
jour­na­liste, musi­cienne et écri­vaine
Sharif Andoura, comé­dien
Rachid Arhab, cofon­da­teur du média Liik
Hanna Assou­line, prési­dente des Guer­rières de la Paix
Josiane Balasko, actrice
Nico­las Bancel, histo­rien, profes­seur à l’Uni­ver­sité de Lausanne
Vincent Beau­grand, direc­teur géné­ral de France Terre d’Asile
Emma­nuel Bellan­ger, histo­rien
Nadia Bendja­bal­lah, porte-parole du collec­tif Justice pour Djamel
Jean Bengui­gui, comé­dien
Joce­lyne Béroard, auteure-compo­si­trice-inter­prète
Magali Bessone, profes­seure de philo­so­phie
Sophie Binet, secré­taire géné­rale de la CGT
Pascal Blan­chard, histo­rien
Claude Boli, histo­rien
Joëlle Bordet, cher­cheuse psycho­so­cio­logue
Nassim Bour­zoufi, ensei­gnant, porte-parole du collec­tif Justice pour Djamel
Julia Cagé, écono­miste
Audrey Céles­tine, poli­tiste
Mickaël Chelal, socio­logue
Caro­line Chevé, secré­taire géné­rale de la FSU
Cathe­rine Coquery-Vidro­vitch, profes­seure émérite univer­sité Paris-Dide­rot
Philippe Corcuff, profes­seur de science poli­tique à Sciences-Po Lyon
Harlem Désir, cofon­da­teur et ancien président de SOS Racisme
Fatou Diome, écri­vain
Toumi Djaïdja, initia­teur de la Marche pour l’éga­lité de 1983
Hermann Ebongue, président de Spor­ti­tude France
Yekbun Eksen, porte-parole du CDKF
Laurent Escure, secré­taire géné­ral de l’UNSA
Ahouefa Fagbemi, prési­dente de la Cité des Chances
Julie Ferrua, codé­lé­guée géné­rale de Soli­daires
Kaltoum Gachi, copré­si­dente du MRAP, avocate
Greg Germain, acteur et réali­sa­teur
Michaël Ghnas­sia, avocat au conseil d’Etat et à la Cour de Cassa­tion
Emma­nuel Gordien, président du Comité Marche du 23 mai 1998
Murielle Guil­bert, codé­lé­guée géné­rale de Soli­daires
Mimouna Hadjam, prési­dente d’Africa 93
Chems-Eddine Hafiz, recteur de la Grande Mosquée de Paris
Hania Hamidi, secré­taire géné­rale de l’Unef
Sacha Halgand, cores­pon­sable du projet Salam, Shalom, Salut
Jona­than Hayoun, réali­sa­teur et scéna­riste
Pierre Henry, président de France Frater­ni­tés
Albert Hersz­ko­wicz, Réseau d’Ac­tions contre l’An­ti­sé­mi­tisme et tous les Racismes/RAAR
Laurent Joly, histo­rien, direc­teur de recherches au CNRS
Marcel Kabanda, histo­rien et président d’Ibuka France
M’ha­med Kaki, président de l’as­so­cia­tion cultu­relle Les Oranges
Patrick Klug­man, avocat
Hélène Lacas­sagne, prési­dente de la Ligue de l’en­sei­gne­ment
Mehdi Lallaoui, réali­sa­teur, respon­sable asso­cia­tif
Maud Le Pladec, choré­graphe, danseuse, direc­trice du Centre choré­gra­phique natio­nal-Ballet de Lorraine
Yannick L’Horty, écono­miste
Kamel Jendoubi, ancien ministre, président du Comité pour le respect des liber­tés et des droits de l’homme en Tuni­sie (CRLDHT)
Sandrine Lemaire, histo­rienne
Mary­lise Léon, secré­taire géné­rale de la CFDT
Lorenzo Leschi, coor­di­na­teur du collec­tif Golem
Ben-J Loubayi, artiste
Jean-Baptiste Lucien, comé­dien et réali­sa­teur
Jacky Mamou, président du collec­tif Urgence Darfour
Gilles Mance­ron, histo­rien
Henry Masson, président de la Cimade
Marie-Anne Matard-Bonucci, histo­rienne
Frédé­rique Matonti, poli­tiste
Romain Mont­beyre-Sous­sand, cores­pon­sable du projet Salam, Shalom, Salut
Sohée Monthieux, artiste
Paul-Max Morin, poli­tiste
Cathe­rine Nave-Bekhti, secré­taire géné­rale de la CFDT Educa­tion Forma­tion Recherche Publiques
Maëlle Nizan, prési­dente de la Fage
Moha­med Ousse­kine, retraité et frère de Malik Ousse­kine
Jonas Pardo, forma­teur anti­ra­ciste
Thomas Piketty, écono­miste
Clément Reversé, maître de confé­rences en socio­lo­gie
Firmine Richard, comé­dienne
Sébas­tian Roché, direc­teur de recherche au CNRS
Viviane Rolle-Romana, ethno­psy­cho­logue et direc­trice de La case des femmes
Serge Romana, profes­seur de méde­cine, géné­ti­cien
Alain Ruscio, histo­rien
Daniel Sabbagh, poli­tiste
Réjane Sénac, poli­to­logue
Haoues Seni­guer, maître de confé­rences en science poli­tique à Sciences-Po Lyon
Nour-Eddine Skiker, président de Jalons pour la Paix
Smaïn, humo­riste et comé­dien
Domi­nique Sopo, président de SOS Racisme
Benja­min Stora, histo­rien
Djida Tazdaït, fonda­trice des JALB (Jeunes arabes de Lyon et sa banlieue), ancienne dépu­tée euro­péenne
Natha­lie Tehio, prési­dente de la Ligue des Droits de l’Homme
Sylvie Thénault, histo­rienne
Vincent Tiberj, socio­logue, poli­tiste
Ara Tora­nian, copré­sident du Comité de coor­di­na­tion des orga­ni­sa­tions armé­niennes françaises (CCAF)
Jacques Toubon, ancien Défen­seur des droits
Guillaume Tray­nard, avocat
Fabien Truong, socio­logue, écri­vain
Agnès van Zanten, socio­logue
Auré­lie Van Den Daele, metteuse en scène, direc­trice du Centre Drama­tique Natio­nal du Limou­sin – Théâtre de l’Union
Thomas Venet, socio­logue
Sophie Véné­ti­tay, secré­taire géné­rale du Snes-FSU
Michel Wieviorka, socio­logue
Youlie Yama­moto, porte-parole d’At­tac France
Valé­rie Zenatti, écri­vaine

Cet article est une tribune, rédi­gée par un auteur exté­rieur au jour­nal et dont le point de vue n’en­gage pas la rédac­tion.

https://www.nouve­lobs.com/societe/20250611.OBS104830/toute-parole-de-haine-raciste-porte-en-elle-la-promesse-d-un-crime-l-appel-d-une-centaine-de-person­na­lites-contre-la-degra­da­tion-du-debat-public.html

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