Pour que survivent les migrants venant d’au-delà des Alpes

Procès des 7 de Briançon hier :
Une audience excep­tion­nelle dans un contexte d’in­ti­mi­da­tions des personnes migrantes et des mili­tant·e·s soli­daires

L’au­dience du procès des 7 de Briançon pour­sui­vis pour « aide à l’en­trée sur le terri­toire français d’étran­gers en situa­tion irré­gu­lière en bande orga­ni­sée », qui s’est tenue hier le 8 novembre, a été marquée par la force et l’en­du­rance de la défense et la mobi­li­sa­tion paci­fique conti­nue à l’ex­té­rieur du tribu­nal de Gap. Le verdict a été mis en déli­béré au 13 décembre 2018.

C’est dans une ambiance tendue que l’au­dience s’est tenue pendant plus de 17 heures hier au tribu­nal correc­tion­nel de Gap. Les longs débats, qui ont duré près de 11 heures, n’ont pas permis d’éta­blir le carac­tère délic­tueux des faits repro­chés, mais le carac­tère fonda­men­tal du droit de mani­fes­ter a été réaf­firmé.

Au terme d’1h30 de réqui­si­toire et après avoir fina­le­ment (et enfin !) aban­donné la circons­tance aggra­vante de « bande orga­ni­sée », le Minis­tère public n’a même pas pris la peine d’éta­blir la respon­sa­bi­lité indi­vi­duelle de Bastien, Benoit, Eleo­nora, Juan, Lisa, Mathieu et Théo concer­nant les infrac­tions qui leur étaient repro­chées, prin­cipe pour­tant indis­pen­sable en droit pénal. Il a néan­moins demandé au tribu­nal de condam­ner chacun des préve­nu·e·s à respec­ti­ve­ment 6 mois d’em­pri­son­ne­ment avec sursis simple pour Bastien, Benoit, Eleo­nora, Lisa et Théo ; 12 mois dont 8 avec sursis simple pour Juan ; et 12 mois dont 8 avec sursis avec mise à l’épreuve pour Mathieu.

En revanche, les avocat·e·s de la défense (Me Bini­me­lis, Me Bren­garth, Me Chau­don, Me Djer­moune, Me Faure-Brac et Me Leclerc) ont brillam­ment démonté, aux termes de 3h10 de plai­doi­ries, un à un les quelques éléments avan­cés par le Parquet, et ont démon­tré qu’il n’y avait pas d’in­frac­tion à repro­cher à des « marcheurs soli­daires ». Le procès a égale­ment permis aux avocat·e·s et aux préve­nu·e·s de dénon­cer, à nouveau, les viola­tions quoti­diennes des droits des personnes migrantes commises par les forces de l’ordre à la fron­tière franco-italienne, les agis­se­ments illé­gaux restés impu­nis à ce jour du grou­pus­cule Géné­ra­tion Iden­ti­taire et les tenta­tives d’en­traves au droit fonda­men­tal de mani­fes­ter à la fois des préve­nu·e·s mais aussi des personnes exilées.

En face du tribu­nal, un rassem­ble­ment paci­fique de soutien a réuni plus de 2 500 personnes venues de la région de Gap, de Briançon, de Marseille, Toulouse, Grenoble, etc. Collec­tifs, asso­cia­tions françaises et euro­péennes et mili­tant·e·s étaient rassem­blé·e·s pour soute­nir les préve­nu·e·s et dénon­cer les pres­sions, inti­mi­da­tions et pour­suites à l’en­contre des mili­tant·e·s, et porter haut et fort leur atta­che­ment à la soli­da­rité dans les Alpes et au-delà. C’est dans un esprit paci­fique et déter­miné que le soutien s’est orga­nisé de 7 heures à 2 heures du matin, malgré une présence poli­cière dispro­por­tion­née. La préfec­ture avait mobi­lisé plus d’une dizaine de camions de CRS, plus d’une dizaine de camions de gendarmes, de nombreux poli­ciers en civil, et même un canon à eau. En plus des pour­suites inten­tées par le procu­reur de Gap contre Bastien, Benoit, Eleo­nora, Juan, Lisa, Mathieu et Théo, d’autres béné­voles soli­daires des personnes migrantes de Briançon sont convoqués devant la justice en janvier 2019, comme Pierre de l’as­so­cia­tion Tous Migrants.

Nos orga­ni­sa­tions dénoncent l’achar­ne­ment de certains procu­reurs contre celles et ceux qui défendent les droits humains en venant en aide aux personnes migrantes.

Soute­nues par près de 50 000 personnes qui ont déjà signé la péti­tion lancée par les orga­ni­sa­tions signa­taires, celles-ci espèrent donc que le tribu­nal se pronon­cera en faveur de la relaxe des 7 de Briançon, et demandent l’aban­don de toutes les pour­suites pour délit de soli­da­rité contre les personnes, dans les Alpes et ailleurs, qui agissent dans un esprit de frater­nité.

Rappel des faits : Bastien, Benoit, Eleo­nora, Juan, Lisa, Mathieu et Théo sont pour­sui­vi·e·s pour avoir parti­cipé en avril dernier à une marche soli­daire pour dénon­cer les violences commises par le grou­pus­cule iden­ti­taire à l’en­contre des personnes exilées dans la région de Briançon. L’État leur reproche d’avoir à cette occa­sion « faci­lité l’en­trée de personnes illé­gales sur le terri­toire français », et de l’avoir fait « en bande orga­ni­sée ». Ils et elles risquent jusqu’à 10 ans de prison et 750 000 euros d’amende.

9 novembre 2018

Orga­ni­sa­tions signa­taires :

  • Anafé
  • La Cimade
  • Gisti
  • Comité de soutien, personnes incul­pées et Tous Migrants

 

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