Oui c’est un choc.
Nous avons vu Bernard il y a quelques semaines encore, car il s’était investi dans l’Institut d’Etudes Populaires (IEPop) et nous avait en particulier aidés à nouer des liens avec la maison de quartier de la Gibauderie.
Bernard disait qu’il avait quelques menus ennuis de santé. Il s’excusait d’avoir des difficultés d’élocution ces derniers temps.
Il avait été parmi les premiers organisateurs du premier collectif AC! (Agir ensemble contre le chômage), en 1993–94.
Nous avions organisé l’accueil des premières marches de chômeurs, des premières manifestations à Paris, des premières distributions de tracts sur le marché qui avaient permis de constituer un petit groupe actif mêlant chômeurs et salariés, syndicalistes, étudiants et militants politiques.
L’un des moments forts de cette période d’AC! avait été l’improbable caravane contre le chômage que l’on avait fait tourner dans la région, en recourant à un cirque familial. Et bien sûr l’ouverture de la première Maison de la solidarité.
Il y eut aussi ces formidables départs en car pour Amsterdam ou Francfort, pour les manifs internationales contre la précarité. Nous y allions avec quelques dizaines de militants et de chômeurs qui parfois n’étaient jamais allé à de grandes manifestations. Et nous retrouvions là-bas des cortèges de militants internationalistes de toutes les couleurs, des plus modérés aux plus radicaux.
Le « mouvement des chômeurs » avait préparé le grand mouvement social de 1995 et il avait ensuite bénéficié de la dynamique de mobilisation créée par cet hiver de luttes. Quelques années plus tard, les chômeurs occupaient les Assedic, avec comme mots d’ordre, l’augmentation immédiate de tous les minima sociaux et l’abolition du chômage!
Le mouvement altermondialiste prenait son essor. Bernard le rejoinit en devenant un militant d’ATTAC.
Ancien communiste, il rejetait aussi bien les restes d’un certain sectarisme que les compromissions de ceux qui craignaient de voir leur vie se terminer sans que leurs talents militants soient récompensés.
Dans les années 2000, il a tout naturellement rejoint les collectifs antilibéraux, il s’est réjoui de la création du Front de gauche, il demeurait impatient de voir l’émergence d’un véritable mouvement politique rassemblant l’ensemble de la gauche encore à gauche, un mouvement unitaire, populaire, écologiste, humaniste.
Ancien enseignant et militant de l’éducation populaire, il prenait un soin tout particulier à la simplicité des argumentaires, à la promotion des nouveaux militants, à l’efficacité des collectifs.
Il concevait l’engagement comme une manière de vivre, sa vie comme un engagement.
C’est aussi comme cela qu’il a décidé, avec une incroyable sérénité, de finir sa vie.
Bertrand Geay
Et oui … Bertrand, moi justement le moment où tu commences c’est le moment que je n’ai pas connu ; par contre que de moments partagés à partir des Comités Juquin (de celui de Poitiers) où Bernard était en effet toujours actif pour construire et faire avancer, et ceci avec une grande gentillesse !!! « Juste quelqu’un de bien … » (comme dit la chanson).