Urgence à gauche : rompre avec l’Eu­rope de l’aus­té­rité !

Le 24 août, le direc­teur de Libé­ra­tion titrait son édito « contre l’Euro, les extrêmes s’at­tirent ». Mais le danger natio­na­liste est déjà là et il est la consé­quence des poli­tiques libé­rales et austé­ri­taires menées par des gouver­ne­ments de droite et sociaux-démo­crates en Europe.

« Contre l’Euro, les extrêmes s’at­tirent », tel est le titre de l’édito de Laurent Joffrin daté du lundi 24 août. Ce titre comme le contenu de l’ar­ticle appellent de notre part une réponse. Pas seule­ment parce que le direc­teur de Libé­ra­tion commet volon­tai­re­ment un affront vis-à-vis de toute la gauche radi­cale par son titre provo­ca­teur et réduc­teur, mais parce qu’il avoue en réalité, qu’à ses yeux, il ne peut y avoir d’autres poli­tiques que celles impo­sées aux peuples par l’Union euro­péenne, ajou­tant un clou supplé­men­taire au cercueil de l’idée euro­péenne.

En préa­lable, préci­sons que les propos de Jacques Sapir, avec lesquels nous sommes en total désac­cord, n’en­gagent que lui-même, et qu’il ne repré­sente en rien la gauche radi­cale.

Mais que propose Laurent Joffrin pour sortir de la logique austé­ri­taire sans fin dont sont victimes les Grecs depuis des années ? De l’ac­cord qui leur est imposé, Paul Krug­man, prix Nobel d’éco­no­mie, dit pour­tant qu’elles confinent à « la folie », tradui­sant « l’en­vie de vengeance, la destruc­tion totale de la souve­rai­neté natio­nale » et consti­tuant « une trahi­son grotesque de tout ce que le projet euro­péen était censé repré­sen­ter. » Comment se satis­faire d’une posture qui ne propose pas les clés d’une solu­tion alter­na­tive mais bien celles d’une prison, celle dans laquelle les peuples euro­péens devraient être enfer­més ad vitam aeter­nam, puisque d’après Laurent Joffrin il n’y a pas d’autres voies possibles, si ce n’est une voie forcé­ment « anti-euro­péenne, euro­phobe et natio­na­liste ». Raccourci bien commode quand en fait on refuse de recon­naître aux peuples le droit d’exer­cer et de faire respec­ter leur souve­rai­neté.

Retrou­vant les accents de la sainte alliance du oui au réfé­ren­dum en 2005, le direc­teur de Libé­ra­tion est choqué que des orga­ni­sa­tions de la gauche radi­cale puissent envi­sa­ger une poli­tique de rupture avec l’aus­té­rité euro­péenne. Il faudrait donc subir les exigences des diri­geants de l’eu­ro­groupe, mené de main de fer par le gouver­ne­ment alle­mand avec le soutien de la troïka, qui ont fait de l’euro un carcan, une arme de guerre contre les droits des peuples et les droits sociaux ?

Non, le « drame grec » ne révèle pas le danger d’une collu­sion entre les deux extrêmes, pure calom­nie qu’on utilise quand on n’a pas d’ar­gu­ments. Non la crise grecque révèle surtout ce qu’est l’Union Euro­péenne, une machine de guerre contre les peuples euro­péens, une entité anti­dé­mo­cra­tique qui les a enchaî­nés à des trai­tés qui fonc­tionnent comme des cami­soles de force. Dans quel but ? Celui de servir une mino­rité, une oligar­chie finan­cière, qui exige toujours plus de sacri­fices à la majo­rité des popu­la­tions.

Une autre Europe est possible

Ce n’est pas la volonté de sortir de ce piège qui pose problème et qui mène­rait droit, d’après Laurent Joffrin, à l’exa­cer­ba­tion natio­na­liste. Le danger natio­na­liste est déjà là et il est la consé­quence des poli­tiques libé­rales et austé­ri­taires menées tant par des gouver­ne­ments de droite que par les sociaux-démo­crates en Europe. L’exa­cer­ba­tion natio­na­liste est davan­tage le fait des diri­geants euro­péens qui essaient de dres­ser les peuples les uns contre les autres en dési­gnant à la vindicte les « mauvais élèves » de l’Union Euro­péenne. Rappe­lez-vous les « PIGS », les cochons qui dési­gnaient en plus de l’Ir­lande les peuples du sud de l’Eu­rope. Ce ne sont pas les Grecs qui veulent sortir de l’euro mais c’est bien Monsieur Schäuble, ministre de la finance qui voudrait bien sortir la Grèce de la zone euro.

Alors oui, face aux attaques sans précé­dent des insti­tu­tions euro­péennes, il est légi­time que les peuples et les forces progres­sistes et véri­ta­ble­ment de gauche s’or­ga­nisent afin d’en­vi­sa­ger une riposte à l’échelle euro­péenne en travaillant à des propo­si­tions alter­na­tives au dogme libé­ral. Cela peut aller jusqu’à la déso­béis­sance aux trai­tés et à la rupture avec tous les carcans euro­péens. Cela renvoie à une idée d’une autre Europe, une Europe de justice sociale, de colla­bo­ra­tion entre les peuples, une Europe de la soli­da­rité. Une idée d’Eu­rope bien éloi­gnée, il faut en conve­nir, de la construc­tion cauche­mar­desque de l’Eu­rope actuelle.

Myriam Martin porte-parole de « Ensemble ». Tribune publiée sur Libé­ra­tion.fr

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