Le Parisien, Par Julien Duffé et Nicolas Ghorzi
Le 26 décembre 2022
La colère qui couvait ces dernières semaines dans les rangs Insoumis éclate désormais au grand jour. Moins de deux semaines après la condamnation d’Adrien Quatennens pour violences conjugales et sa « radiation temporaire » pour quatre mois du groupe LFI à l’Assemblée, plus d’un millier de militants insoumis et de la Nupes ont signé une tribune au vitriol publiée ce lundi 26 décembre dans Le Monde dans laquelle ils demandent « l’exclusion » du député du Nord et expriment clairement leur défiance, évoquant une « vague de dégoût » et un sentiment de « trahison ».
« Nous appelons les miliant.e.s à l’insoumission », exhortent les signataires, fustigeant « un système vertical privilégiant la protection des cadres dirigeants aux dépens des militants.es et des programmes ». Et d’interpeller publiquement les cadres dirigeants de LFI : « Appliquez vos promesses, agissez : oui, le privé est politique, aucun agresseur n’a sa place dans nos partis, nos organisations, nos institutions, dans nos hémicycles », exhortent les signataires.
La charge est violente, mais elle s’inscrit dans un contexte de turbulences qui sont apparues début décembre avec la mise en place contestée d’une nouvelle direction de LFI autour du député Manuel Bompard et ont redoublé avec les derniers soubresauts de l’affaire Quatennens.
Dès le 13 décembre, date de sa condamnation, les Jeunes Insoumis de Poitiers avaient ainsi annoncé « un arrêt à durée indéterminée » de leur activité militante. Depuis, selon les comptages du Discord Insoumis, forum en ligne de LFI, 25 autres groupes Insoumis à travers la France se sont mis en grève militante et/ou ont appelé à « l’exclusion définitive » d’Adrien Quatennens du groupe parlementaire.
(…)
Député LFI, Antoine Léaument défend la décision de suspension temporaire du député du Nord. « Les débats chez les jeunes ont leur légitimité, mais dire à une personne qui a commis une faute grave qu’il a reconnue : Tu es mis au ban de la société, ton action politique n’a plus cours, ce n’est pas la bonne méthode pour permettre à la personne humaine de s’améliorer ». Un argument également défendu par Jean-Luc Mélenchon.
Sauf que de l’avis de plusieurs cadres Insoumis, les prises de parole de Quatennens dans les heures qui ont suivi sa condamnation ont contribué à semer le trouble. « La décision d’exclure Adrien Quatennens du groupe a été prise avant ses interviews catastrophiques, rappelle la députée Raquel Garrido au Parisien. En donnant une version toute sienne des faits, il a pris appui sur la misogynie dominante pour diaboliser Céline Quatennens et se présenter lui-même comme la victime. »
« Dans la mesure où la décision du groupe était assortie d’une clause de revoyure après le suivi d’un stage de responsabilisation sur les violences faites aux femmes, souligne-t-elle, il est évident que ces interviews, dénoncées par plusieurs députés Insoumis, entreront en ligne de compte pour décider de l’avenir Quatennens au sein du groupe ».
Raquel Garrido, toujours, semble donner crédit à l’information du Figaro selon laquelle l’interview de Quatennens à BFMTV, le 14 décembre, aurait été pilotée en interne par la députée et chargée de communication des Insoumis Sofia Chikirou. « Je constate avec consternation que la stratégie de communication d’Adrien Quatennens a été menée en complicité avec au moins une partie de la nouvelle direction de LFI. C’est un problème politique et de loyauté entre nous », déplore la députée de Seine-Saint-Denis.
(…)
« Tout ceci révèle le besoin d’organiser méthodiquement la délibération des militants au sein de LFI, en gérant les contradictions et oppositions mêmes vives, reconnaît Raquel Garrido. Cela rejoint la demande de démocratie qui est récurrente et désormais urgente. »