5 décembre 2025

Media­part. Mathias Thepot. une nouvelle contre-réforme de l’hô­pi­tal est annon­cée.

Réformes struc­tu­relles : et main­te­nant, au tour de l’hô­pi­tal

extraits

Mathias Thépot

 

Pour l’exé­cu­tif actuel, il n’y a pas de mauvaises écono­mies budgé­taires. Quand bien même ces écono­mies concer­ne­raient un service public déjà à l’os. Et quand bien même ce service public revê­ti­rait une impor­tance capi­tale pour la popu­la­tion. On parle ici de l’hô­pi­tal public. Selon Les Échos du 12 août, «  l’inef­fi­ca­cité des hôpi­taux » serait ainsi dans le viseur du gouver­ne­ment qui compte couper à la hache dans le budget de l’an­née 2026.

Rappe­lons que François Bayrou a fixé à 44 milliards d’eu­ros l’objec­tif d’éco­no­mies pour l’an­née prochaine, afin de rame­ner le défi­cit de 5,4 % à 4,6 % du PIB en 2026. (…)

Hélas, au lieu d’al­ler cher­cher l’argent là où il est, que ce soit en ques­tion­nant les 211 milliards d’eu­ros par an d’aides aux entre­prises, ou en rabo­tant les dispo­si­tifs permet­tant l’op­ti­mi­sa­tion fiscale des grands groupes et des plus riches, le gouver­ne­ment préfère pous­ser les hôpi­taux à renfor­cer « leurs perfor­mances ».

« Une plus grande effi­ca­cité sera deman­dée à l’hô­pi­tal », avait annoncé le 15 juillet François Bayrou. Il a aussi dit qu’il deman­de­rait à l’hô­pi­tal public de « faire des écono­mies en opti­mi­sant par exemple les achats de médi­ca­ments ou en s’ap­puyant sur la méde­cine ambu­la­toire ».

(…)

Face à cette petite musique qui monte d’une cure d’aus­té­rité à venir pour l’hô­pi­tal public, le président de la Fédé­ra­tion hospi­ta­lière de France, Arnaud Robi­net, ne déco­lère pas. « J’ai entendu certains dire que l’hô­pi­tal public ne serait pas effi­cient, cela me met hors de moi », a-t-il aussi déclaré aux Échos.

Certes, quand l’on se plonge dans le dernier rapport datant du 24 juillet de la Direc­tion de la recherche, des études, de l’éva­lua­tion et des statis­tiques (Drees) sur les comptes des hôpi­taux publics, on comprend que leurs finances sont loin d’être d’équerre. Leur défi­cit est en nette hausse et a atteint près de 3 milliards d’eu­ros en 2024.

Mais ceci n’est en rien dû à des hôpi­taux qui seraient rendus obèses par leur train de vie somp­tuaire. Le défi­cit des hôpi­taux se creuse en fait à cause, d’une part, de la baisse rela­tive des rembour­se­ments par la Sécu­rité sociale de la crois­sance de leur acti­vité, large­ment portée par l’am­bu­la­toire. 

Et d’autre part, la Drees a constaté une nette hausse de leur masse sala­riale « en lien avec les mesures natio­nales de reva­lo­ri­sa­tions des rému­né­ra­tions dans la fonc­tion publique hospi­ta­lière ».

Or, il est diffi­cile d’avan­cer aujourd’­hui que le person­nel hospi­ta­lier roule sur l’or. Certes les fonc­tions hospi­ta­lières, notam­ment le person­nel soignant, sont davan­tage soute­nues finan­ciè­re­ment depuis la crise du covid-19, mais les reva­lo­ri­sa­tions sala­riales les concer­nant avaient été quasi inexis­tantes durant la décen­nie précé­dente.

Du reste, depuis le choc de la crise sani­taire, la néces­sité d’al­louer davan­tage de moyens à l’hô­pi­tal public était commu­né­ment admise pour assu­rer un niveau de soin de qualité pour la popu­la­tion. .

(…)

Une véri­table saignée est donc atten­due. Et c’est d’au­tant plus compliqué à accep­ter pour la popu­la­tion que c’est ce même exécu­tif qui a creusé le trou dans les comptes publics. Près de 70 milliards d’eu­ros se sont en effet évapo­rés des comptes publics en 2023 et en 2024 à cause d’une erreur d’ap­pré­cia­tion du gouver­ne­ment et de ses services concer­nant le niveau des recettes fiscales. 

Une erreur que le gouver­ne­ment Bayrou fait désor­mais payer aux services publics et au modèle social. Car en paral­lèle, il ne compte surtout pas déro­ger à la poli­tique de l’offre mise en place depuis 2017, faite de baisses d’im­pôts sur le capi­tal, d’al­lè­ge­ments de coti­sa­tions sociales pour les entre­prises, et de mesures visant à flexi­bi­li­ser le marché du travail.

Tous ces dispo­si­tifs ont eu un coût pour les finances publiques : plus de 50 milliards d’eu­ros de baisses d’im­pôts ont été votées ; les allè­ge­ments de coti­sa­tions étaient de 25 milliards d’eu­ros plus élevés en 2024 qu’en 2017 ; et la forte hausse du nombre d’au­toen­tre­pre­neurs – 800 000 de plus qu’en 2017 – sont autant d’em­plois qui cotisent moins qu’un sala­rié à la Sécu­rité sociale.

Hélas, ces baisses d’im­pôts n’ont pas généré le ruis­sel­le­ment promis en termes de crois­sance écono­mique et de recettes fiscales pour l’État.

Pour finan­cer ce manque à gagner et hypo­thé­tique­ment tenter de rentrer dans les clous de Bruxelles comme il s’y est engagé, l’exé­cu­tif a alors choisi de taper fort dans les seuls postes de dépenses qui peuvent lui rappor­ter des milliards en très peu de temps : ceux de la protec­tion sociale. 

Les retraites d’abord, avec la réforme de 2023 qui repousse l’âge légal de départ de 62 à 64 ans. L’as­su­rance chômage, ensuite, qui a subi pas moins de quatre réformes depuis l’ar­ri­vée d’Em­ma­nuel Macron au pouvoir, et qui pour­rait bien en connaître une cinquième. (…)

Reste, enfin, la santé, qui est la nouvelle martin­gale à écono­mies budgé­taires du gouver­ne­ment. Contrôles accen­tués des arrêts mala­die, baisses de la prise en charge des affec­tions de longue durée (ALD), dérem­bour­se­ment de médi­ca­ments… François Bayrou compte désor­mais grat­ter tout ce qu’il peut au sein de ce poste de dépenses pour trou­ver des milliards.

(…)

Peu surpre­nant dès lors, que l’hô­pi­tal, le premier poste de dépenses de santé en France – 122 milliards d’eu­ros sur 249 milliards d’eu­ros au total – soit désor­mais en plein dans le viseur de l’exé­cu­tif. Après avoir connu un sous-inves­tis­se­ment chro­nique au regard de la hausse des besoins en soins ces dernières années, l’hô­pi­tal public pour­rait donc subir en 2026 ses premières coupes budgé­taires dras­tiques depuis la crise du covid-19. 

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