COLLECTIF FEMMES CONTRE LES PRÉCARITÉS, LE CHÔMAGE ET LES DISCRIMINATIONS – 18/09/2017
CDD, temps partiels, horaires variables,les femmes en ont assez !
Abrogation des ordonnances sur la loi XXL !
Lois de sécurisation de l’emploi du 14/06/2013, Rebsamen du 17/08/2015, Macron du 06/08/2015, Loi Travail El Khomri du 08/08/2016, ordonnances du 31/08/2017… Tous ces textes de loi visent l’annulation des acquis, un nivellement vers le bas de tous les droits, la suppression des élu-e-s des salarié-e-s et de leurs moyens de se former par l’expérience.
Les femmes ont subi depuis 30 ans le développement des contrats précaires, l’éclatement des horaires, les situations de « multi-employeur »… 58 % des salariés en CDD, 83 % des salariés à temps partiel sont des femmes. Les écarts de salaires entre les hommes et les femmes – en moyenne de 26 % – demeurent. 60 % des entreprises de plus de 300 salariés, et 70 % de celles de 50 à 300 salariés n’ont pas signé d’Accord sur l’égalité professionnelle entre femmes et hommes. Peu de sanctions à ce jour…
Dans les petites entreprises, la sous-traitance, le nettoyage, la distribution, les services à la personne, les femmes sont les premières à subir le temps partiel et la syndicalisation est difficile.
Cependant, celle-ci progresse et a permis d’obtenir des améliorations des conditions de travail, des requalifications de CDD en CDI, de temps partiels en temps complets, l’intégration de personnels de sous-traitance chez le donneur d’ordres…
A Paris, grâce à la coordination syndicale, les luttes contre le travail du dimanche et les fermetures tardives ont permis d’obtenir plusieurs condamnations.
Depuis les années 2000, une jurisprudence favorable aux salariés a été constituée, en matière d’application du droit du travail, de respect des droits syndicaux, de lutte contre les discriminations sexistes. Les grèves, les sanctions financières, se sont avérées être les seuls moyens efficaces pour contraindre les employeurs à respecter les droits des salarié-e-s.
Mais le recul a déjà eu lieu. Depuis des années, la situation des salariées est déjà bien en deçà de ce qui a été prévu par « notre code du travail ». Du fait des textes récents, contester les abus – comme le non-paiement d’heures de travail, les CDD successifs, la sous-traitance non justifiée, les pratiques discriminatoires… – devient très difficile. L’inversion de la hiérarchie des normes, encore plus néfaste pour les femmes.
La prédominance des Accords d’entreprise sur les Accords de branche, et de ces derniers sur la loi, est possible à titre dérogatoire depuis bien longtemps et a été réaffirmée dans plusieurs domaines par la loi Travail de 2016, puis AUJOURD’HUI par les ordonnances.
Le « principe de faveur », qui faisait prévaloir en toute circonstance le texte le plus favorable aux salarié-e-s, déjà écorné, se détricote définitivement.
Le droit du travail se déclinera selon des Accords de branche OU d’entreprise – notamment
en matière d’aménagement du temps de travail. Certains salariés conserveront des congés payés
supplémentaires, d’autres non.
Certaines salariées verront LA DURẺE DU CONGẺ MATERNITẺ MAINTENUE OU ALLONGẺE PAR UNE CONVENTION COLLECTIVE, d’autres diminuée ! Les allègements d’horaires pour les femmes enceintes, les aménagements de congés de maternité ou pour maladie d’enfants et autres congés entreraient dans la négociation d‘entreprise et pourraient être amoindris.
Le rapport de force pour négocier un Accord d’entreprise prenant en compte les intérêts des femmes n’existera pas, alors que celles-ci demeurent à la périphérie des Instances représentatives du personnel – même si elles y sont assidues – et que la majorité des porteurs de mandats syndicaux restent des hommes. Désormais, les élu-e-s suppléant-e-s ne siégeront plus et donc les intérêts des salariées risquent d’être perdus de vue !
Les Conventions et Accords collectifs des branches qui emploient un taux élevé de femmes sont souvent DÉJÀ inférieurs au code du travail, notamment dans l’aide à domicile ou la propreté.
Donc, jusqu’à maintenant, une femme informée récupérait ses droits en allant en justice et obtenait l’application du principe de faveur, c’est-à-dire des dispositions du code du travail. Avec ces ordonnances, c’est l’inscription dans le marbre d’un salariat féminin de deuxième zone.
Le rôle des Institutions représentatives du personnel – IRP – est essentiel pour faire respecter le droit du travail et les législations en matière d’égalité professionnelle et salariale.
La fusion des Institutions représentatives du personnel – DP, CE, CHSCT :
C’est la disparition des élus délégués du personnel réunis chaque mois par l’employeur – titulaires et suppléants – pour traiter les questions individuelles et collectives du quotidien au travail ET QUI DISPOSENT D’UN DROIT D’ALERTE EN MATIẼRE NOTAMMENT DE HARCẼLEMENT ET DE VIOLENCES SEXUELLES.
C’est la disparition du Comité d’Hygiène et de Sécurité des Conditions du Travail – CHSCT – par site, dont la vocation est la prévention de tous les risques de santé physique et mentale liés à l’organisation du travail, aux cadences, aux équipements, pour chaque salarié(e).
C’est aussi la disparition programmée des élu-e-s suppléant-e-s du Comité d’Entreprise, en charge de questionner et de comprendre la stratégie d’entreprise, aux fins de prévenir et d’anticiper la diminution des effectifs notamment.
Cette concentration des IRP va entraîner :
L’effondrement des effectifs des élu-e-s et des syndicalistes susceptibles de s’informer et de défendre l’intérêt des salarié-e-s.
L’éloignement géographique encore plus grand des élus par rapport aux salariés. Jusqu’ici ils étaient au siège social – pour le Comité d’entreprise – ou au site de proximité – pour les CHSCT et les DP. Désormais ils seront tous au siège et en petit nombre.
La disparition des suppléants parmi les élus – TROP SOUVENT DES SUPPLẺANTES – qui deviendraient des doublures, reléguées dans les coulisses, sans présence aux réunions, sans possibilité d’observation, de prise de notes, d’investissement dans la commission formation, la commission logement, les réunions des IRP.
Dans le nouveau Comité social et économique – CSE – les élus et les représentants syndicaux vont s’épuiser ou sélectionner un axe de compétence au détriment des femmes, car là aussi nous aurons une concentration d’élus-hommes et un renforcement des comportements stéréotypés !
La suppression des CHSCT – compétents pour traiter des questions relatives aux violences envers les femmes, au droit à la santé tant physique que mentale, à la prévention de l’épuisement professionnel – aura des conséquences néfastes pour les femmes.
Déjà Mme Dati, Ministre de la justice, a contribué à la réduction des Conseils de Prud’hommes, qui a conduit à un allongement considérable de la durée des procédures. Et aujourd’hui, les délais pour la saisine du même Conseil des prud’hommes ont déjà été raccourcis de 30 ans à 5 ans, puis à 2 ans et ils passeraient maintenant à UN AN !
La négociation collective : les femmes passeront à la trappe !
Dans le cadre de la compétence du Comité d’entreprise :
Avec la loi Rebsamen, le Rapport de situation comparée prévu par la loi Roudy de 1983 a été intégré dans un ensemble beaucoup plus vaste : Base de données économiques et sociales, mise à disposition par l’employeur.
Les négociations portant sur l’égalité salariale entre les femmes et les hommes ont disparu, pour être intégrées dans une négociation sur « l’égalité professionnelle et la qualité de la vie au travail ».
Avec les ordonnances de 2017, les conditions de validation d’un Accord d’entreprise ont été assouplies, et un Accord pourrait être négocié sans la présence d’une organisation syndicale.
Un Accord d’entreprise pourrait décider du contenu et de la périodicité des négociations d’entreprise, et de la nature des informations à transmettre par l’employeur…
Le nombre de représentants du personnel et d’inspecteurs du travail susceptibles de se préoccuper de vérifier la fourniture des données comparatives entre femmes et hommes sur le plan des salaires et des carrières, déjà insuffisant, serait plus restreint encore.
Les Négociations Annuelles Obligatoires (NAO) pourraient être remplacées par des négociations tous les 3 ou 4 ans. Autant dire que les patrons feraient tout ce qu’ils voudraient !
Des licenciements encore plus faciles !
Les licenciements ont été rendus encore plus faciles, depuis la loi du 14/06/2013, du fait d’une modification des modalités des plans de sauvegarde de l’emploi (PSE) et de la possibilité d’une modification substantielle du contrat unilatérale par l’employeur imposant la mobilité géographique.
Avec la loi Travail de 2016 et les ordonnances de 2017, des accords dits « de préservation de l’emploi » s’imposent désormais au salarié et priment sur son contrat de travail. Concrètement, un employeur pourrait modifier unilatéralement la partie variable d’un salaire, la classification, la durée du travail, le lieu de travail. Des baisses de salaires pourraient être imposées.
La dimension européenne, voire internationale, pour apprécier la réalité de difficultés économiques dans le cadre d’un Plan de Sauvegarde de l’Emploi – PSE – disparaît.
Des plans de rupture conventionnelle collectifs pourraient être négociés et mis en oeuvre !
Avec les ordonnances, le plafonnement des indemnités prud’homales serait institué. Le plafond serait de 6 mois de salaire, en cas de licenciement abusif.
Certes, en cas de discrimination – sexiste ou autre – de harcèlement ou « d’atteinte aux libertés fondamentales d’un salarié », les 6 mois d’indemnités deviennent un plancher… Cependant, il faut que cela fasse suite à une action en justice ou que cela concerne une représentante du personnel et il faut prouver la discrimination ou le harcèlement !
Tout cela va faciliter les licenciements à caractère sexiste, notamment pour les femmes qui ont de fortes contraintes familiales (mères isolées…) ou bien syndicalistes.
Une remise en cause du CDI
Les ordonnances verraient donner la primauté aux Accords de branche en ce qui concerne la règlementation des CDD : ce qui peut aboutir à faire disparaître la limitation de renouvellement et la durée maximum de 18 mois, ainsi que les délais de carence entre deux CDD.
Des contrats courts, dérogatoires à la loi, existent depuis 1982 – les « CDD d’usage » ou « contrats d’extras », très utilisés dans les commerces et l’hôtellerie – qui permettent de contourner toutes les obligations légales… Leur utilisation serait encore étendue, de même que celle des « contrats de projet » ou « CDI de chantier », dont le concept apparaîtrait dans la loi.
Un recul de l’encadrement du temps partiel
L’encadrement du travail à temps partiel n’est plus à l’ordre du jour au niveau national :
La négociation par branche devrait désormais décider de cette question. Le minimum de 24 heures hebdomadaires, prévu en cas de temps partiel par la loi du 14/06/2013, ne reste applicable, pour les nouveaux contrats signés, qu’en cas d’absence d’un Accord de branche.
D’ors et déjà, la plupart des branches qui recourent fortement à du temps partiel ont signé des Accords prévoyant un horaire minimal hebdomadaire inférieur au seuil de 24 H – 16 H, par exemple, dans la propreté.
Les majorations d’heures complémentaires pourraient être très réduites. Un salarié qui effectue des heures complémentaires pendant 12 semaines consécutives pouvant exiger l’intégration de ces heures à son contrat, la loi du 14/06/2013, qui autorise la pratique des avenants temporaires à un contrat (jusqu’à 8 par an) a déjà rendu la revalorisation d’un contrat plus difficile.
Une nouvelle dérèglementation des horaires
L’émiettement des emplois, le temps partiel imposé et les horaires séquencés et/ou éclatés sur toute la semaine sont le lot de nombreuses femmes. Des mères isolées voient leur emploi menacé du fait du non-respect des délais de prévenance en cas de modification d’horaires et globalement, de pratiques quotidiennes abusives des employeurs.
Refuser des heures complémentaires et supplémentaires devient impossible. Les possibilités d’allongement des horaires, en cas d’Accord d’entreprise ou d’établissement, ou à défaut, en cas d’un Accord de branche ont été portées à 12 H par jour et 46 H par semaine sur 12 semaines. Les délais de prévenance en cas de changement d’horaires pouvant être réduits à 3 jours
au lieu de 7.
Disparition des rémunérations majorées pour heures supplémentaires ou complémentaires. La rémunération majorée pourrait être ramenée à 10 % – au lieu de 25 % – par un Accord de branche. La loi Aubry avait annualisé le temps de travail à 1607 heures, ce qui est déjà compliqué à gérer. En cas d’un Accord de branche, le cumul des heures travaillées pourrait s’effectuer sur 3 ans, ce qui autoriserait la disparition des majorations d’heures supplémentaires.
Les possibilités d’horaires excentrés, de fermetures tardives, de travail de nuit, sont encore étendues. La dérèglementation des horaires, déjà très forte, risque d’être si forte que nombre de femmes pourront difficilement conserver leur emploi, étant donné leurs responsabilités familiales.
Une nouvelle extension des abus liés à la sous-traitance
La sous-traitance d’activités a connu une extension démesurée depuis 30 ans, et elle ne peut souvent être justifiée – ni par la nature spécifique des tâches externalisées ni par le caractère variable de l’activité.
L’application de l’article L. 1224–1 (anciennement L. 122–12) relative à la reprise des salariés en cas de passation d’un marché ou de cession d’entreprise tendrait à disparaître, alors que jusqu’à maintenant elle était modulée selon des jurisprudences récentes. La convention collective devrait prévoir les modalités du transfert des contrats de travail – le maintien des avantages individuels acquis (portant sur divers éléments de rémunération), à défaut d’un nouvel accord collectif, pouvant être supprimé.
Donc des baisses de salaires ou des licenciements encore facilités pour des personnels avec ancienneté : Encore des femmes, toujours les femmes !
ABROGATION DES LOIS TRAVAIL 1 ET 2, DE SẺCURISATION DE L’EMPLOI DE 2013, MACRON ET REBSAMEN DE 2015…
Contact : Maison des femmes de Paris, 163 rue de Charenton, Esc 13, Bat 4. 75 012 Paris
Adresse mail : femmescontreprecarites@outlook.fr