Sur BFM TV, larges extraits d’une interview:
C’est dit: Jean-Luc Mélenchon et la France insoumise sont solidaires du mouvement des gilets jaunes et de la journée de protestation du 17 novembre contre la hausse de la taxation sur le carburant. Pour la formation de gauche, il s’agit à la fois de garder le contact avec une opinion animée par une colère vue comme légitime et de bâtir une autre forme d’opposition.
Malgré les réserves d’une partie, minoritaire, du mouvement, la France insoumise et ses chefs approuvent la colère d’une large proportion de leurs concitoyens contre la hausse de la taxation sur le carburant et soutiennent la journée de mobilisation du 17 novembre. Certains, comme François Ruffin, ont même annoncé qu’ils y participeraient « à titre personnel ». La chose a pu passer pour contre-intuitive aux yeux de certains observateurs: comment la formation de l’écosocialisme peut-elle se rhabiller d’un gilet jaune?
Thomas Guénolé, politologue de formation, à présent candidat insoumis aux élections européennes et coresponsable de l’école de la France insoumise, balaie auprès de BFMTV.com ce lundi l’idée d’une contradiction: « On ne se révolte pas contre la hausse en soi mais contre l’injustice fiscale et l’hypocrisie cynique du gouvernement. On dit qu’il ne faut pas surtaxer les dépenses contraintes mais qu’il faut au contraire une politique de sortie du pétrole ».
Selon ce cadre du mouvement de Jean-Luc Mélenchon, l’aspect social de l’événement n’a jamais fait débat au sein de la France insoumise:
« Dès le départ, nous avons estimé qu’augmenter la taxation des dépenses contraintes pèserait lourd dans le budget des plus pauvres, qu’il s’agissait d’une mesure anti-sociale, et que la posture écologiste du gouvernement était un double mensonge: pour l’essentiel, les sommes récoltées n’iront pas financer une politique écologiste et puis, l’écrasante majorité des dépenses en carburant sont contraintes, donc par définition elles ne baisseront pas. »
La gêne s’est en revanche fait sentir aux entournures quand le risque d’une instrumentalisation du mouvement par l’extrême droite a été soulignée en interne. « Il y a eu deux points de vue: certains on dit que puisqu’il y avait des gens d’extrême droite, il était hors de question d’y aller. D’autres, beaucoup plus nombreux, ont dit qu’il était hors de question de laisser l’extrême droite récupérer la chose. » Ce dernier courant l’a emporté.
Pour la France insoumise, l’occasion est belle de diffuser son message tout en conduisant les automobilistes à changer de braquet.
(…) »L’enjeu est de politiser autrement le mouvement, c’est-à-dire de ne pas en faire une simple jacquerie poujadiste anti-impôts mais d’en profiter pour parler d’écologie, aborder l’injustice fiscale. » Politiser le mouvement, largement plébiscité par la population selon un sondage BVA pour La Tribune, ou se mettre à sa remorque? (…) »Il y aurait quelque chose d’absurde à ce qu’une force qui veut unir le peuple et défendre sa cause commence par se pincer le nez devant une colère populaire légitime », appuie Thomas Guénolé. « Nous sommes là pour donner un débouché politique positif à la colère populaire, promouvoir un anti-système constructif », résume ce dernier. Pour Thomas Guénolé, ce processus est la meilleure manière de faire rempart à la montée de l’extrême droite. (…)