Télé­rama: Loi sur l’im­mi­gra­tion : pour l’Uni­cef, “les droits des enfants ont été sacri­fiés”

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Loi sur l’im­mi­gra­tion : pour l’Uni­cef, “les droits des enfants ont été sacri­fiés”

Par Julia Vergely  Publié le 22 décembre 2023

(…) Après une bataille parle­men­taire chao­tique, la loi sur l’im­mi­gra­tion a été défi­ni­ti­ve­ment votée ce mardi 19 décembre. Outre une séquence poli­tique désas­treuse, elle signe d’im­por­tants reculs sur le plan des droits humains. Les asso­cia­tions dénoncent notam­ment de nombreuses et graves atteintes aux droits des enfants. La réac­tion d’Ade­line Hazan, ancienne dépu­tée euro­péenne et maire de Reims (PS), et prési­dente de l’Uni­cef depuis 2022.

Comment avez-vous reçu ce vote ?
Nous sommes catas­tro­phés. D’au­tant plus que nous avons beau­coup travaillé avec les parle­men­taires sur ce texte et que nous avions réussi à faire passer plusieurs dizaines d’amen­de­ments dans la première version de la loi. Ils venaient proté­ger notam­ment les mineurs isolés, les jeunes majeurs issus de l’aide sociale à l’en­fance, l’ac­cès à l’hé­ber­ge­ment d’ur­gence pour les enfants… Ils ont été complè­te­ment suppri­més par le texte de la commis­sion mixte pari­taire (CMP). Les droits des enfants ont été sacri­fiés sur l’au­tel d’une poli­tique stric­te­ment poli­ti­cienne. Désor­mais, le texte contient une série d’at­teintes à la Conven­tion inter­na­tio­nale des droits de l’en­fant. Cela me navre. Le gouver­ne­ment avance que des articles seront censu­rés par le Conseil consti­tu­tion­nel, ce n’est pas sérieux : faire voter un texte dont on sait parfai­te­ment l’in­cons­ti­tu­tion­na­lité, on n’a jamais vu ça. Un sujet aussi impor­tant que l’im­mi­gra­tion ne mérite pas un tel trai­te­ment. À l’Uni­cef, nous atten­dons donc beau­coup du Conseil consti­tu­tion­nel.

(…)

Quelles sont les mesures qui portent atteinte aux droits des enfants ?
Une des plus problé­ma­tiques est le condi­tion­ne­ment des allo­ca­tions loge­ment et des allo­ca­tions fami­liales à cinq ans de rési­dence ou deux ans et demi pour les immi­grés qui travaillent. C’est une vraie atteinte au droit à un loge­ment décent, reconnu par la Conven­tion inter­na­tio­nale des droits de l’en­fant. Cela veut dire qu’une famille dému­nie, en diffi­culté finan­cière, bien qu’en situa­tion régu­lière, ne pourra plus trou­ver de loge­ment. Pour nous, c’est extrê­me­ment choquant. L’ab­sence de loge­ment est, on le sait, un frein pour avoir un travail. Cet article est l’ou­ver­ture de la préfé­rence natio­nale.

Les restric­tions au regrou­pe­ment fami­lial sont égale­ment très choquantes. Le regrou­pe­ment était déjà enca­dré par des condi­tions de ressources et de loge­ment, et la durée du séjour néces­saire du deman­deur est allon­gée de six mois, alors qu’elle était déjà de dix-huit mois. Ça veut dire, concrè­te­ment, qu’un parent installé en France depuis déjà un an et demi devra encore attendre six mois pour être rejoint par ses enfants mineurs. Il s’agit d’une véri­table atteinte au droit de vivre en famille. Par ailleurs, la créa­tion d’un fichier de mineurs non accom­pa­gnés délinquants est scan­da­leuse. La justice a déjà beau­coup d’ou­tils à sa dispo­si­tion. Ça n’a aucun sens et cela stig­ma­tise encore davan­tage des mineurs.

Les personnes sans-papiers seront désor­mais inter­dites d’ac­cès aux héber­ge­ments d’ur­gen­ce…
(…) Nous savons que cette mesure va se solder par une hausse du nombre de personnes sans-abri, dont des familles avec enfants. Et on ne cesse de le répé­ter : à l’heure actuelle, déjà trois mille enfants dorment à la rue. La situa­tion ne peut qu’em­pi­rer. (…)

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