Plus de 250 anciens dirigeants de toutes tendances du syndicat étudiant dénoncent les propos de Jean-Michel Blanquer sur une prétendue dérive fasciste de l’organisation, et les appels de certains députés à sa dissolution.
Tribune. Il y a quelques jours, des parlementaires de droite demandaient la dissolution de l’UNEF [Union nationale des étudiants de France]. Désormais, c’est le ministre de l’éducation nationale qui parle de pente fasciste pour qualifier son activité.
Quels seraient les actes justifiant ces attaques ? L’organisation de quelques groupes de parole non mixtes pour les étudiantes et étudiants victimes de discriminations. Cette pratique intéresse, interroge, inquiète. Elle bouscule et fait débat.
Nous ne pouvons accepter que des députés proposent la dissolution de cette organisation. Nous ne pouvons encore moins admettre l’idée que l’UNEF soit renvoyée dos à dos avec un groupuscule d’extrême droite, condamné pour incitation à la haine raciale. Nous ne pouvons tolérer les propos d’un ministre qui banalisent le fascisme et participent ainsi à la confusion idéologique ambiante.
Idéal émancipateur
Militantes et militants, dirigeantes et dirigeants avec des diversités de parcours, nous avons été par le passé des acteurs et actrices engagés de cette organisation. L’idéal émancipateur, républicain, laïque, antiraciste et féministe a toujours été notre boussole, un idéal au service des intérêts sociaux et moraux de tous les étudiantes et étudiants.
Au cours de ses cent dix ans d’histoire, quelle qu’ait été la tendance dirigeante, l’UNEF a toujours été en tête des batailles relatives au budget de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. Elle a su porter un discours anticolonial dans une société française qui était loin d’y souscrire. Elle s’est engagée, en mai 1968, dans ce mouvement qui a conduit aux changements sociaux et moraux que nul ne conteste aujourd’hui.
L’UNEF, c’est aussi un mouvement décisif contre la sélection en 1986 et la mobilisation historique contre le contrat première embauche (CPE) qui n’avait d’autre ambition que de précariser, encore et encore, les jeunes de notre pays.
Précarité insupportable
Signataires de ce texte, pour certaines et certains avec des désaccords parfois profonds avec des pratiques et des orientations syndicales et idéologiques de l’UNEF, nous pensons que, par son histoire et les valeurs issues de la charte de Grenoble qu’elle incarne, l’UNEF a toute sa place dans le débat public.Article réservé à nos abonnés Lire aussi L’UNEF, de plus en plus isolée et critiquée pour ses « réunions non mixtes racisées »
A l’heure où les étudiantes et les étudiants, et la jeunesse sont particulièrement touchés par la pauvreté et la précarité, le gouvernement se doit d’être à l’écoute des organisations représentatives des étudiantes et des étudiants. Cette exigence nous paraît d’autant plus incontournable que nous avons, sous nos yeux, ces dizaines de milliers de jeunes qui basculent dans une précarité insupportable, renoncent à poursuivre leurs études, abandonnant ainsi leurs projets d’avenir.
Aussi, nous condamnons l’outrance injurieuse des termes employés et nous nous opposons à toute volonté de dissolution d’une organisation de jeunesse telle que l’UNEF.
Liste des signataires, membres de l’Association des anciens de l’UNEF, fondée en 1938.
Une réflexion sur « Tribune libre, Le Monde, « Non à la dissolution de l’UNEF » »