5 décembre 2025

France info. Budget 2026 : 20% des Français sont-ils concer­nés par des affec­tions de longue durée contre 5% des Alle­mands, comme l’af­firme François Bayrou ?

 

Les mensonges de Bayrou:

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« 20% des Français sont en affec­tion de longue durée contre 5% de la popu­la­tion alle­mande. (…) Et je ne crois pas que les Français soient en plus mauvaise santé que les Alle­mands », a affirmé François Bayrou, mardi 15 juillet, pour justi­fier une révi­sion du statut des affec­tions de longue durée, c’est-à-dire les mala­dies « dont la gravité et/ou le carac­tère chro­nique néces­site un trai­te­ment prolongé » et dont les soins et trai­te­ments sont pris en charge à 100%, selon le site Ameli.fr(Nouvelle fenêtre). Parmi les mesures d’éco­no­mies envi­sa­gées pour 2026, le Premier ministre veut aussi dérem­bour­ser des médi­ca­ments « sans lien » avec la mala­die – un projet qui inquiète les patients.

Comment expliquer cet écart entre les deux pays ? « Ce n’est pas du tout le même système, on ne peut pas les compa­rer », répond l’éco­no­miste Zeynep Or, direc­trice de recherche à l’Ins­ti­tut de recherche et docu­men­ta­tion en écono­mie de la santé (Irdes), à fran­ceinfo. Les chiffres évoqués par François Bayrou proviennent d’un rapport de l’As­su­rance-mala­die(Nouvelle fenêtre) (PDF) remis au gouver­ne­ment et au Parle­ment le 1er juillet. Selon une étude(Nouvelle fenêtre) datant de juillet 2024, « en 2022, 13,8 millions de personnes béné­fi­ciaient du dispo­si­tif des ALD », repré­sen­tant « 20,1% de la popu­la­tion et 66,1% de la dépense totale rembour­sée par l’As­su­rance-mala­die ». « Un chiffre nette­ment plus élevé que nos voisins euro­péens », signale le premier rapport.

Des critères diffé­rents selon les pays

Dans son rapport, l’As­su­rance-mala­die compare les modèles de prise en charge des patho­lo­gies chro­niques en France, en Belgique, en Alle­magne, en Angle­terre et en Italie. On y apprend que 4,8% de la popu­la­tion alle­mande béné­fi­cie d’une prise en charge finan­cière en tant que patients chro­niques, comme l’a affirmé François Bayrou. Un chiffre qui monte à 12% en Belgique. Toute­fois, selon le pays, les critères ne sont pas du tout les mêmes. En Alle­magne et en Belgique, par exemple, l’ob­ten­tion du statut repose sur des critères finan­ciers. Le reste à charge pour tous les assu­rés est exonéré pour les patients chro­niques « en fonc­tion des dépenses enga­gées et des reve­nus », explique l’As­su­rance-mala­die.

La France, l’An­gle­terre et l’Ita­lie préfèrent des critères cliniques. « En Angle­terre, une exoné­ra­tion est accor­dée pour neuf groupes de patho­lo­gies » et « en Italie, une liste de 64 mala­dies chro­niques donne droit à une prise en charge complète », expose le rapport. En France, une tren­taine de patho­lo­gies entrent dans le dispo­si­tif, un « AVC inva­li­dant » par exemple, ou des « affec­tions psychia­triques de longue durée », un « diabète de type 1 et de type 2 », des mala­dies cardio-vascu­laires ou encore un cancer. Des mala­dies dites « hors liste », mais qui évoluent sur une durée prévi­sible supé­rieure à six mois et dont le trai­te­ment est parti­cu­liè­re­ment coûteux, sont égale­ment inté­grées dans le dispo­si­tif. C’est l’ad­di­tion de toutes ces patho­lo­gies qui concerne 13,8 millions de personnes en France, dont certains cumulent plusieurs ALD. A ceux-ci s’ajoutent des « cas parti­cu­liers » : l’ap­pa­reillage des enfants sourds, l’in­fer­ti­lité et la mala­die cœliaque, plus préci­sé­ment un rembour­se­ment d’une partie des produits sans gluten.

Des statis­tiques incom­pa­rables outre-Rhin

La compa­rai­son entre les systèmes alle­mand et français n’est donc « pas correcte », selon Zeynep Or. « En Alle­magne, chaque personne dont les restes à charge dépassent 2% des reve­nus annuels ne paie plus rien. Et pour les patients chro­niques, ce seuil est de 1% », explique l’ex­perte, autrice d’une compa­rai­son des dépenses de santé en France et outre-Rhin(Nouvelle fenêtre). Faire des calculs à partir de ces exoné­ra­tions n’est pas perti­nent, relève-t-elle. Les femmes enceintes et les enfants de moins de 18 ans sont par exemple exoné­rés d’of­fice des restes à charge. Même en cas de mala­die chro­nique, ils ne seront « jamais comp­ta­bi­li­sés » dans les statis­tiques des personnes qui dépassent le seuil de 1% des reve­nus – et donc dans les 4,8% évoqués par François Bayrou.

L’éco­no­miste cite un autre exemple : « Prenez un diabé­tique, s’il n’est pas hospi­ta­lisé, qu’il n’a ‘que’ le reste à charge de ses médi­ca­ments à payer, puisqu’en Alle­magne, il n’y a pas de reste à charge pour les soins quoti­diens, ça ne dépas­sera poten­tiel­le­ment pas le seuil d’1% de ses reve­nus, et il ne sera pas capté dans les 5%. » Alors même qu’il est atteint d’une mala­die chro­nique, selon la défi­ni­tion française. Ces statis­tiques ne peuvent donc pas, selon Zeynep Or, servir à compa­rer le nombre de malades, comme s’y aven­ture François Bayrou. « Il faudrait des études épidé­mio­lo­giques pour savoir combien de gens sont atteints. Et je pense qu’on a des taux assez simi­laires », estime-t-elle.

Des malades alle­mands fina­le­ment mieux proté­gés

Par ailleurs, la recon­nais­sance du statut de « Chro­nisch kranke Menschen », soit « les personnes atteintes de mala­dies chro­niques », semble plus stricte en Alle­magne, afin de prétendre au seuil des 1% des reve­nus. La personne doit justi­fier d’un suivi médi­cal « au moins une fois par trimestre pour la même mala­die pendant au moins un an » et une gravité parti­cu­lière, expose le minis­tère de la Santé alle­mand(Nouvelle fenêtre). Le statut concerne aussi « toute personne néces­si­tant des soins médi­caux conti­nus sans lesquels il faut s’at­tendre, selon l’éva­lua­tion médi­cale, à une aggra­va­tion poten­tiel­le­ment mortelle de la mala­die, à une dimi­nu­tion de l’es­pé­rance de vie ou à une alté­ra­tion durable de la qualité de vie », peut-on encore lire.

Zeynep Or ajoute que les personnes décla­rant une affec­tion de longue durée en France sont loin de ne rien payer. « Si l’ALD couvre les dépenses liées à un cancer ou un diabète, vous allez payer pour d’autres soins, vous pouvez avoir des dépenses induites », évoque-t-elle. Les dépas­se­ments d’ho­no­raires, la parti­ci­pa­tion forfai­taire de 2 euros, la fran­chise médi­cale ou le forfait hospi­ta­lier, par exemple. « En Alle­magne, c’est un plafond de paie­ment de tous les restes à charge des patients. » Ce qui en fait, à ses yeux, une « protec­tion beau­coup plus impor­tante » et « un système bien aiguisé pour lutter contre les coûts de santé ».

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