Les élections départementales marquent une troisième défaite, après les élections municipales et européennes, pour le Parti Socialiste et les orientations mises en œuvre par F. Hollande et M. Valls. Cette politique du gouvernement plonge le pays dans l’austérité et le chômage, sans rupture avec celle que la droite menait précédemment. En mettant en œuvre une politique ouvertement pro patronale et au service de la finance, le gouvernement porte l’entière responsabilité d’une démobilisation de l’électorat populaire de 2012. On aurait tort de voir dans le maintien de l’abstention à un haut niveau le reflet de l’indifférence ou de la passivité, mais plutôt une manifestation de colère devant un comportement qui utilise le suffrage universel pour bafouer ce qu’il revendique.
La droite profite de cette situation, et enregistre une nette victoire en regagnant la majorité des départements. Elle radicalise son discours et ses actes, elle cherchera à imposer demain encore plus d’austérité et de précarité. Il faudra résister à ces nouvelles régressions qu’elle engagera dans les départements.
Surtout, le Front National s’enracine sur tout le territoire et capte un quart de l’électorat, même s’il fait élire moins de candidat-e-s qu’il ne le prétendait et ne réussit pas à gagner un seul département. Il constitue un danger mortel pour la société française. Son programme vise à détruire les conquêtes sociales et démocratiques réalisées par le peuple de ce pays. Il vise à diviser, à opposer les un-e-s aux autres, à jouer sur les peurs, le racisme, le sexisme et l’homophobie. Son histoire, ses soutiens, et la politique qu’il mène là où il dirige des collectivités le montrent : ce n’est pas un parti démocratique et il pratique les mêmes politiques que la droite contre les solidarités et les protections sociales.
Une partie de l’électorat de gauche s’est mobilisé quand il fallait, au second tour, empêcher l’élection de candidats du Front National. Mais M. Valls aurait tort d’y voir un soutien à sa politique : cette mobilisation contient un niveau d’exigence qui pousse au contraire à une autre politique, à l’opposée de celle de Manuel Valls, qui affirme, droit dans ses bottes, qu’il ne changera rien. La poursuite de cette politique ne peut mener qu’à un désastre supplémentaire.
Les résultats du Front de gauche et de la gauche alternative se sont sensiblement améliorés, au premier comme au second tour : 9,3 % pour les candidat-e-s Front de Gauche et 13,8 % pour les candidat-e-s commun-e-s Front de Gauche/EELV dans 448 cantons, ainsi qu’une résistance face à la droite et au FN des candidat-e-s du Front de gauche plus solide que celle des candidat-e-s socialistes qui défendaient la politique gouvernementale. Ces résultats sont un point de départ à consolider ; iIs montrent que des forces sont disponibles quand le Front de gauche s’engage vers un rassemblement plus large pour proposer une alternative à cette politique de renoncement.
A l’issue de ces élections, des voix se sont exprimées, au sein même du Parti Socialiste, pour contester la politique du gouvernement. Les différent-e-s représentant-e-s du Front de gauche se sont exprimé-e-s pour appeler à une nouvelle alliance, une nouvelle coalition, un nouveau rassemblement, de toutes les forces qui, à gauche, proposent une alternative à la politique de ce gouvernement. Il s’agit désormais de travailler aux contenus d’un rassemblement entre Front de Gauche, EELV, Nouvelle Donne et socialistes refusant l’actuelle impasse de la politique gouvernementale…
C’est l’objectif des Chantiers d’Espoir, qui, dès le 11 avril, se mettent en place pour construire la nouvelle dynamique populaire dont nous avons besoin. Allant plus loin que le nécessaire accord entre les forces politiques concernées, ces Chantiers doivent prendre la forme d’une démarche citoyenne et militante, rassemblant des personnalités, des citoyen-ne-s engagé-e-s dans les associations et les syndicats, dans les collectifs de lutte et de résistance. Dans toutes les localités, les forces disponibles peuvent converger et impulser des assemblées citoyennes.
Pour barrer la route au retour d’une droite radicalisée et en alliance avec l’extrême droite, il faut offrir un projet alternatif, une volonté d’innovation, un espoir de changement ; Et ce projet doit être en rupture avec la politique antisociale et les reculs écologiques et démocratiques du Président de la République et du Premier ministre. Cette alternative devra dégager des pistes cohérentes articulant des mesures concrètes avec un nouvel horizon, qui leur donne tout leur sens. Elle devra se nourrir des exigences issues du mouvement social, autour de grands axes répondant à l’urgence sociale et démocratique : faire sauter les verrous européens qui enferment dans l’austérité perpétuelle, augmenter les revenus et créer les emplois utiles sur le plan social et environnemental, instaurer un contrôle public sur la finance et ne pas laisser les actionnaires faire la loi, entreprendre enfin la transition écologique, engager la société vers une nouvelle étape d’égalité des droits et des solidarités, vers une profonde transformation des institutions pour plus de démocratie…
Il est possible et nécessaire de concrétiser ce nouveau rassemblement des forces de gauche et écologiste opposées à la politique de Valls, lors des prochaines élections régionales de la fin de l’année.
Dans l’immédiat, le rassemblement doit se faire entendre avec force en soutien aux actions engagées par les collectifs anti-austérité et les syndicats, notamment la journée de grève interprofessionnelle du 9 avril, contre la loi Macron. Cette loi est le meilleur exemple d’une politique qui préfère répondre aux attentes du Medef qu’aux exigences sociales de la population et en particulier des électeurs et des électrices de gauche, et qui provoque la catastrophe sociale et politique en cours. Il faut la mettre en échec, empêcher son adoption par la mobilisation sociale comme dans les votes aux assemblées. D’autant que quelques heures après la défaite de son parti, Manuel Valls a annoncé une aggravation supplémentaire des mesures qu’elle contient, en « déverrouillant les CDI » dans les PME et en assouplissant les règles qui autorisent la baisse des salaires ou l’augmentation des horaires de travail en échange d’un « non-licenciement » quand la situation de l’entreprise est « difficile »… Ce que la droite n’avait jamais osé, Macron et Valls le font.
C’est bien la nécessité et l’urgence d’une alternative de gauche que révèlent ces élections départementales, et c’est bien à la construction d’un nouveau rassemblement populaire qu’il faut s’atteler.
« Ensemble ! », le mardi 31 mars 2015.