Le projet de Loi Travail est une attaque contre le Code du Travail , contre ce qui est en lui un processus d’unification des conditions salariées, contre une norme qui peut être légalement opposée à son patron;c’est la fin de la « hiérarchie des normes » en faveur des salarié.e.s au profit des patrons et de leurs profits.
Le MEDEF y a vu une divine surprise, ce gouvernement reniant à ce point tous les fondamentaux de gauche avec sa majorité composée de la direction du PS et de ses vassaux soumis (radicaux, ex écologistes, etc.). Les députés LR et leur dizaine de candidats à leur future primaire avouèrent qu’ils n’en attendaient pas tant, que certes même Sarkozy qui est un brutal n’était pas allé aussi loin. Une loi patronale, une loi de droite, une loi antisociale.
Le mouvement contre cette loi a une force certaine et qui dure.
Une intersyndicale de luttes s’est créée nationalement, et quelques soient les limites de ses propositions, elle est un repère dans l’action. Cette fois, au-delà de la présence de l’UNEF et de syndicats lycéens dans ce regroupement, c’est la reconnaissance de la jeunesse comme acteur politique qui est reconnue. On reconnaît que les étudiant.e.s sont massivement des salarié.e.s précaires, que la fin de leurs études ne signifiera pas la sortie du statut de précaires pour nombre d’entre elles et eux. Et que la Loi Travail annonce la précarité à vie et pour presque toutes et tous.
La fin du sectarisme à l’égard de Solidaires et de la CNT montre la reconnaissance par les confédérations CGT et FO de la reconnaissance de l’existence de formes syndicales qui leur échappe, dans la jeunesse et ailleurs.
Face au gouvernement et au patronat, un front nouveau, offensif, se constitue, avec aussi la FSU.
Nuit debout est parti d’un appel du réalisateur de « Merci patron » et a été aussitôt indépendant de toute figure tutélaire. Il est un écho de l’occupation des places en Espagne, et aussi en Grèce, en Égypte , en Turquie. Ne plus être en attente des discussions d’état-majors syndicaux et se réapproprier la parole politique, la réinventer, voilà qui fut mis en acte. Des paroles diverses, singulières, des témoignages de vie aux lectures de poèmes, des appels à une manifestation ponctuelle immédiate à la construction d’une cabane ou à la culture d’un jardin en partage, d’une manifestations de riches en colère à la discussion sur la constitution et les lois. C’est une explosion inattendue de propositions qui a eu lieu, anticapitalistes à coup sûr, écologistes, féministes, autogestionnaires, libertaires, etc.
Ce qui se passe à Paris est différent de ce qui se passe dans une autre métropole comme Toulouse, ce qui se passe à Poitiers est différent de ce qui se passe dans ces deux très grandes villes. Mais partout une nouvelle génération y prend la parole, de façon actuellement encore minoritaire, mais avec fougue.
Le gouvernement, face à ce front majoritaire dans l’opinion, mais qui n’envahit pas les rues comme la gravité de l’attaque le mériterait, louvoie, manœuvre, et ne cède à peu près rien. Et il cogne les manifestant.e.s de plus en plus systématiquement. Sa majorité se dérobant à lui, il a recours au 49.3. Il affirme ce faisant que la loi Travail est son identité profonde. S’opposer à cette loi, c’est s’opposer à la nature de ce gouvernement.
Et des députés PS frondeurs ont tenté, avec des députés Front de gauche et écologistes, de faire une motion de censure de gauche contre ce gouvernement-vainement. Même les frondeurs du Ps disent qu’il faut en finir avec ce gouvernement! Pour la première fois une dissidence du parti majoritaire s’oppose à ce gouvernement, en cette Cinquième république où la soumission des députés à l’exécutif est une règle, une règle grotesque.
Face à cet enjeu de société et de civilisation il faut en finir avec ce gouvernement, il faut les virer, les dégager. Ne soyons pas en retard sur les « frondeurs » pour le dire haut et fort…
Dégager El Khomri qui a donné son nom à cette loi néolibérale de choc, c’est une urgence.
Dégager Cazeneuve, le Ministre de l’Intérieur, qui, derrière une allure insipide de comptable de mafieux, affirme une brutalité que des forces de police travaillées par la haine FN exécutent avec un zèle remarqué; A Paris et Marseille lors de la manifestation du Premier mai, à Rennes tous les jours au point que les manifestants viennent de préférence casqués depuis qu’un jeune homme a perdu un œil, à Nantes la situation est proche. Dernièrement des interdictions de manifester sont distribuées. Ce Cazeneuve qui avait montré sa rouerie lors de l’assassinat par un gendarme de Rémi Fraisse doit dégager. C’est un minimum en défense de nos libertés.
Valls qui est le pion du MEDEF, celui qui porte la loi Travail et son monde, est notre adversaire principal actuellement. Son projet politique est de cliver le Ps et constituer un parti entre la droite du PS et la partie la plus coopérante de LR. Il devrait devenir directeur de cabinet de Juppé, à moins que celui qui se montra « droit dans ses bottes » en 1995 face au mouvement social, ne trouve Valls trop excité dans sa jouissance à tenter de détruire la gauche.
Bref, Valls, El Khomri, Cazeneuve, Macron et les autres : dehors !
Alors que dire de pépère le bouffon qui tient lieu de président de la république ? Il est ami de Valls et de Macron, il est le responsable de cette politique.
C’est ce régime des Hollande, Valls et Macron que nous voulons dégager.
C’est la première formule politique qui s’impose à nous, à toutes les manifestantes et manifestants. Cet objectif doit être porté massivement. Peut-être un référendum ou une votation citoyenne seront nécessaires pour faire entendre cette exigence.
« Qu’ils se soumettent ou qu’ils se démettent » est la traduction politique du « ni amendable ni négociable » syndical.
La question de l’alternative politique est alors posée. Quelle politique de gauche pour remplacer ce gouvernement à la faillite morale consommée ? Un rassemblement des forces antilibérales en rupture totale avec Valls et la direction du PS est possible, nécessaire et urgent.
C’est la voie que l’ « appel des 100 » récent trace comme perspective, au-delà de toutes ses insuffisances. Face à la droite et à ses supplétifs de la direction du PS, face au FN qui appelle à toujours plus de répression, nous devons agir vite.
Pascal Boissel, 16–5–2016