https://www.gisti.org/spip.php?article6861
Chargé de juger si la décision d’expulser un imam était conforme au droit, le Conseil d’État s’est montré plus perméable aux objectifs politiques délétères poursuivis par le ministre de l’intérieur qu’aux arguments juridiques qui lui étaient opposés : adhérant sans distance ni réserve à ses thèses, il a, par une ordonnance rendue le 30 août dernier, validé l’expulsion.
Ainsi la dernière digue a-t-elle cédé : il faut se résoudre à constater que la conception toute personnelle des « valeurs de la République » – substituant la désignation d’un ennemi intérieur aux principes de la devise nationale – que le ministre ressasse jusqu’à plus soif pour justifier sa croisade est partagée dans tous les palais, de l’Élysée à Matignon et jusqu’au sein du Palais Royal. Pourtant, aucune loi ne menace d’expulsion l’étranger qui méconnaîtrait ces « valeurs ». En revanche, c’est l’État de droit qui est menacé lorsque, pour les juges chargés d’interpréter la loi, les mots perdent leur sens. (…)
n tel dévoiement des règles de droit, au service de thèses alimentant elles-mêmes une politique aventureuse et dangereuse pour la démocratie, ne peut qu’inquiéter profondément : l’État de droit vacille lorsqu’un juge complaisant à l’égard de l’exécutif abdique sa mission.
Le 2 septembre 2022
Signataires :
- ADDE (Avocats pour la défense des droits des étrangers)
- Gisti (Groupe d’information et de soutien des immigré·es)
- SAF (Syndicat des avocats de France)