A quatre jours du premier tour de la présidentielle, plus de deux-cents universitaires, chercheur·e·s et enseignant·e·s appellent à l’union autour de Jean-Luc Mélenchon, candidat de la France Insoumise, pour « un vote de raison ».
Publié initialement sur Mediapart.
Dans cette campagne présidentielle qui bouleverse tous les repères du jeu politique, il faut rappeler la portée majeure de ce scrutin qui déterminera pour la France mais aussi pour l’Europe les grands axes du cadre politique, économique et social des prochaines années. C’est donc avant tout sur des enjeux de politique publique, sur les programmes des candidat·e·s et sur leur capacité à les porter réellement qu’il convient de se déterminer. Notre engagement ne résulte nullement d’une adhésion inconditionnelle à la personne d’un·e candidat·e : il est avant tout raisonné et fondé sur des critères que nous jugeons décisifs.
Pour commencer, tout projet raisonnable d’émancipation doit aujourd’hui prendre pour point de départ la réalité du changement climatique et la nécessité d’une transition écologique qui implique une rupture radicale dans notre mode de production et de consommation. Il est évident que cette rupture ne pourra se faire dans le cadre néolibéral actuel et nécessitera une intervention publique massive, visant à convertir en profondeur notre modèle économique et environnemental.
Le projet que nous soutiendrons doit simultanément engager une réelle transformation économique et sociale, en n’acceptant aucun compromis avec les forces dominantes de la finance et des grands lobbys industriels, et lutter pied à pied pour réduire fortement la pauvreté et les inégalités, restaurer les services publics et renforcer le pouvoir des salarié·e·s dans l’entreprise.
Ce projet doit aussi en finir avec les politiques désastreuses de l’enseignement et de la recherche, qui soumettent toujours plus l’École et l’Université au diktat du marché sous le prétexte fallacieux d’« autonomie », simple synonyme de mise en concurrence généralisée. Ces politiques n’ont fait que précariser les enseignant·e·s et chercheur·e·s, et reproduire les inégalités dans la jeunesse de notre pays. Il convient donc de leur redonner les conditions de travail et la liberté pédagogique nécessaires à l’accomplissement de leur mission.
Imposé contre la volonté des peuples français et néerlandais qui s’étaient clairement prononcés en 2005, le cadre actuel des traités européens est un carcan qui favorise les dividendes au détriment des salaires et empêche toute politique économique audacieuse de lutte contre le chômage de masse et la précarité. Engager un rapport de force sans état d’âme pour refonder le projet européen est une condition de sa survie et le moyen le plus sûr de donner un coup d’arrêt à la montée de l’extrême droite sur le continent. De même qu’une Sixième République élaborée par les citoyen·ne·s permettra de se doter d’institutions réellement démocratiques, les institutions de l’Europe doivent être refondées pour servir enfin les peuples, et non plus la finance et les pouvoirs économiques dominants. Ajoutons que le beau projet humaniste d’une Europe des peuples, aujourd’hui ruiné et déshonoré par le déficit démocratique de l’UE, les politiques d’austérité et le traitement honteux réservé aux réfugié·e·s, doit impérativement être réhabilité : par une politique généreuse d’accueil et de coopération avec les pays en développement et émergents, et par une lutte impitoyable contre toutes les discriminations racistes.
Enfin, une politique d’indépendance claire à l’écart des grandes puissances, quelles qu’elles soient, apparaît chaque jour plus nécessaire alors que la paix mondiale est en danger.
Des candidat·e·s en lice, seuls Jean-Luc Mélenchon et le programme L’Avenir en commun formulent des propositions qui répondent à ces différents objectifs et, plus encore, engagent une démarche collective cohérente susceptible de leur donner corps et de ne pas trahir une fois de plus les électeurs et les électrices. À quelques jours du premier tour, la dynamique d’union se trouve être désormais celle de la France insoumise : la candidature de Mélenchon est en passe de devenir la candidature unitaire de la gauche. La situation électorale indécise incite plus que jamais à un vote fondé sur l’adhésion à un projet, et non sur des calculs pseudo-rationnels voués à l’échec, comme on a pu le voir avec les primaires. Après des années d’indignation et de résistance face aux régressions sociales et démocratiques, ne passons pas à côté de l’opportunité inédite qui nous est offerte de mettre en œuvre un programme novateur qui concrétise l’essentiel des idées progressistes, qu’il s’agisse du partage des richesses, de l’écologie politique ou encore du féminisme. Elaboré en collaboration étroite avec des intellectuel·le·s critiques, ce programme qui en appelle à l’intelligence et à la solidarité des citoyen·ne·s apparaît comme le seul à même de remettre en cause, à court et surtout à long termes, la montée de l’extrême droite. C’est pourquoi le 23 avril, pour nous, le vote de la raison, ce sera Mélenchon.
Signataires :
Sarah Abdelnour (sociologue) ; Joseph Abdou (mathématicien) ; Erika Abrams (écrivain et traductrice littéraire) ; Jean Agnès (professeur honoraire, philosophe de l’éducation) ; Bruno Amable (économiste) ; Fabien Archambault (historien) ; Soulef Ayad-Bergounioux (historienne) ; Isabelle Backouche (historienne) ; Marie-Hélène Bacqué (sociologue) ; Flora Bajard (sociologue) ; Aziz Ballouche (géographe) ; Olivier Baron (économiste) ; Christophe Baticle (sociologue) ; Nicolas Bautès (géographe) ; Vincent Béal (sociologue et politiste) ; Alain Becker (Education physique et sportive, syndicaliste) ; Valentin Behr (politiste) ; Luc Benoit (américaniste) ; Michael Bermond (géographe) ; Eric Berr (économiste) ; Sandrine Berroir (géographe) ; Sophie Blanchard (géographe) ; Béatrice Bloch (enseignante-chercheuse en lettres) ; Géraldine Bois (sociologue) ; Christophe Bonneuil (historien) ; Sylvain Bordiec (sociologue) ; Rachele Borghi (géographe) ; Cédric Bouquet (enseignant-chercheur en psychologie) ; Vincent Bourdeau (philosophe) ; Noëlle Burgi (politiste et sociologue) ; Pascal Buresi (historien) ; Jean-Luc Chappey (historien) ; Amandine Chapuis (géographe) ; Alexis Charansonnet (historien) ; Isabelle Charpentier (politiste et sociologue) ; Francis Chateauraynaud (sociologue) ; Sébastien Chauvin (sociologue) ; Jean-Jacques Cheval (enseignant-chercheur en sciences de l’information et de la communication) ; Vérène Chevalier (sociologue) ; Thibault Cizeau (sociologue) ; David Clarys (enseignant-chercheur en psychologie) ; Julie Claustre-Mayade (historienne) ; Annie Collovald (politiste et sociologue) ; Aurélie Condeveaux (anthropologue) ; Joan Cortinas (sociologue) ; Christel Coton (sociologue) ; Annie Couëdel (enseignante-chercheuse en sciences de l’éducation) ; Thibault Courcelle (géographe) ; Jean-Claude Croizet (enseignant-chercheur en psychologie) ; Pablo Cueco (musicien) ; Fanny Darbus (sociologue) ; Ségolène Darly (géographe) ; Jean-François Dejours (professeur de philosophie) ; Jean Dellemotte (économiste) ; Sophie Denave (sociologue) ; François Denord (historien et sociologue) ; Natalie Depraz (philosophe) ; Yveline Dévérin (géographe) ; Catherine Deville Cavelin (physicienne) ; Paul Dirkx (sociologue) ; Etienne Douat (sociologue) ; Vincent Dubois (sociologue et politiste) ; Jean-Numa Ducange (historien) ; Frédéric Dufaux (géographe) ; Julien Dufour (sociologue) ; Cédric Durand (économiste) ; Séverine Durand (sociologue) ; Marie Duret-Pujol (enseignante-chercheure en études théâtrales) ; Miguel Espinoza (philosophe) ; Odile Espinoza (psychologue) ; Jean Estebanez (géographe) ; Marie Estripeaut-Bourjac (chercheur en littérature et en études sur le genre) ; Pierre Fargeton (musicologie) ; Guilhem Farrugia (enseignant en communication) ; Artemisa Flores (sociologue) ; Jérémie Foa (historien) ; Sylvie Fol (urbaniste) ; Arnaud Fossier (historien) ; Bernard Friot (sociologue) ; Martine Garcia (biochimiste) ; Sandrine Garcia (sociologue) ; Camille Gardesse (urbaniste-sociologue) ; Isabelle Garo (philosophe) ; Christophe Gaubert (sociologue) ; Florence Gauthier (historienne) ; Bertrand Geay (sociologue) ; Pascale Gérardi Guillas (Pr. Droit-Economie-Gestion en BTS) ; Armelle Giglio (anthropologue) ; Clément Gilbert (biologiste) ; Marjorie Glas (sociologue) ; Isabelle Gouarné (politiste) ; Mathieu Grégoire (sociologue) ; Josiane Guichot (psychanalyste) ; Fabien Guillot (géographe) ; Aurélien Hazan (chercheur en sciences de l’ingénieur) ; Mathieu Hély (sociologue) ; Philippe Henry (géologue et géochimiste) ; Pierig Humeau (sociologue) ; Stéphane Inglin (professeur de Génie Industriel en BTS) ; Sabina Issehnane (économiste) ; Vincent Jacques (philosophe) ; Sébastien Jahan (historien) ; François Jarrige (historien) ; Fanny Jedlicki (sociologue) ; Anne Jollet (historienne) ; Marc Joly (sociologue) ; Michel Joubert (sociologue) ; Eric Jouen (professeur de Technologie en BTS) ; François Jouve (mathématicien) ; Razmig Keucheyan (sociologue) ; Dany Lang (économiste) ; Christian Lazzeri (philosophe) ; Frédéric Lebaron (sociologue) ; Christophe Le Digol (politiste) ; Brice Le Gall (sociologue) ; Sophie Lecostey (économiste) ; Philippe Légé (économiste) ; Nathalie Lemarchand (géographe) ; Pierre Le Masne (économiste) ; Benjamin Lemoine (sociologue) ; Benoît Leroux (sociologue) ; Léa Lima (sociologue) ; Wenceslas Lizé (sociologue) ; Carlos Alberto Lobo (philosophe) ; Fabien Locher (historien) ; Cédric Lomba (sociologue) ; Arnaud Mace (philosophe) ; Florent Margnat (physicien) ; Maxime Marie (géographe) ; Ivan Marin (mathématicien) ; Jérôme Martin (docteur en histoire, professeur d’histoire-géographie au lycée Jean Renoir, Bondy) ; Pascal Martin (sociologue) ; Jean-Luc Martineau (historien) ; Gérard Mauger (sociologue) ; Céline Mazliak (professeur d’histoire retraitée) ; Paul Mazliak (professeur de biologie retraité) ; Fanny Mazzone (enseignante-chercheure en sciences de l’information et de la communication) ; Claire Miramon (psychanalyste) ; Julian Mischi (sociologue et politiste) ; Vincent Moeneclaey (sociologue) ; Christian de Montlibert (sociologue) ; Marianne Morane (géographe) ; Laurence Maurel (sciences du langage) ; Laurence Mullaly (section 14) ; Alain Musset (géographe) ; Anneliese Nef (historienne) ; Adrien Normand (chimiste) ; Christian Papinot (sociologue) ; Christophe Pebarthe (historien) ; Adrien Pégourdie (sociologue) ; Eric Pellet (enseignant-chercheur en linguistisque, stylistique) ; Etienne Pénissat (sociologue) ; Sandra Perez (géographe) ; Marc Perrenoud (sociologue) ; Johann Petitjean (historien) ; Frédéric Pierru (sociologue) ; Michel Pigenet (historien) ; Christian Pihet (géographe) ; Aurélie Pinto (sociologue) ; Louis Pinto (sociologue) ; Sylvie Pittia (historienne) ; Claude Poliak (sociologue) ; Tristan Poullaouec (sociologue) ; Bernard Pudal (politiste) ; Romain Pudal (sociologue) ; Joseph Rabie (urbaniste, artiste, chercheur) ; Cécile Rabot (sociologue) ; Janine Reichstadt (philosophe) ; Freddie-Jeanne Richard (biologiste) ; Fabrice Ripoll (géographe) ; Jean Rivelois (sociologue) ; Jean Rivière (géographe) ; Daniel Rome (économiste) ; Martine Roques (psychologue) ; Max Rousseau (politiste et géographe) ; Arnaud Saint-Martin (sociologue) ; Thomas Sauvadet (sociologue) ; Pierre Sauvêtre (sociologie) ; Nadine Schaeffer (infirmière) ; Manuel Schotté (sociologue) ; Jérémy Sinigaglia (sociologue) ; Arnault Skornicki (politiste) ; Séverine Sofio (sociologue) ; Eric Soriano (politiste) ; Ghislaine Stouder (historienne) ; Marie-Albane de Suremain (historienne) ; Aude Nuscia Taïbi (géographe) ; Julien Théry-Astruc (historien) ; Adrien Thibault (sociologue) ; Martin Thibault (sociologue) ; Daniel Thin (sociologue) ; Olivier Tonneau (chercheur en littérature) ; Christian Topalov (sociologue) ; Pierre Torasso (mathématicien) ; Michel Tort (psychanalyste) ; Gérard Touchard (enseignant-chercheur en sciences de l’ingénieur) ; Olivier Tric (enseignant-chercheur en architecture) ; Christian Tutin (économiste) ; Annick Valibouze (mathématicienne, syndicaliste) ; Stéphane Vaquero (sociologue) ; Vincent Veschambre (géographe) ; Xavier Vigna (historien) ; Anne Viguier (historienne) ; Sébastien Villemot (économiste) ; Julien Vincent (historien) ; Monika Wator (sociologue) ; Perin Emel Yavuz (historienne de l’art) ; Karel Yon (politiste).